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Issoufou/Bazoum : Après le duo le duel

Le paysage politique nigérien a connu les couples Tandja- Hama, Bazoum-Issoufou, Ousmane-Doudou Rahama, pour ne parler que ces plus grands partis. Et dans chacun des cas l’on a cru à la force des alliances, à l’indestructible ciment qui lie ces hommes. Si le premier et le troisième couples ont fini par s’éclater, annonçant des séparations douloureuses qui viennent trahir des années d’amitiés et d’aventures épiques menées ensemble, presque fraternellement, laissant des militants désabusés et circonspects, tristes de perdre la force et l’âme de leurs combats politiques et de leur parti, pour le second, l’alliance de fer entre Issoufou Mahamadou et Bazoum Mohamed bat de l’aile, ne pouvant, elle aussi, résister aux vicissitudes de la vie politique que des intérêts et des choix divergents pourraient profondément chambouler. Personne ne doute aujourd’hui qu’il y a des chamailleries mêmes sourdes et isolées au sein du parti de Foumakoye Gado et du pouvoir de la Renaissance acte III. Les hommes, par le pouvoir qu’ils gèrent et qui les divise, ne peuvent plus s’aimer comme ils pouvaient s’aimer à conquérir le pouvoir. Conquérir le pouvoir et gérer le pouvoir ce sont deux choses différentes qui impactent différemment les relations humaines et politiques. Le PNDS, quoi qu’on dise, ne peut échapper à la règle : ses hommes ont des coeurs qui battent et qui ont leurs humeurs et leurs affects et depuis quelques temps que leurs coeurs, en même temps qu’ils peuvent porter de l’amour, peuvent aussi être chargés de haines et de rejet de l’autres. L’ami, en politique, n’est pas forcément toujours l’ami.

En politique, c’est connu, les amitiés à l’usure du temps et des aléas, résistent peu, perdant de leur ténacité et de leur sincérité au fil des déceptions et des trahisons. Combien de fois, a-t-on vu des inséparables arriver à des relations exécrables, à des moments d’incompréhension, de doute où la confiance qui en est le ciment se perd pour faire place aux suspicions, et hélas, aussi, pour aboutir à des séparations qui laissent sur le champ politique des douleurs et des rancunes et souvent des acteurs à jamais perdus l’un pour l’autre, incapables de pardon et de réconciliation ? On a fait croire aux Nigériens que le PNDS serait un autel où la foi politique et le culte dû à un certain homme qui régirait le parti d’une main de fer, l’on ne saurait s’attendre à y voir quelques frictions, quelques contestations de la part d’autres responsables politiques car, s’en défend-on, comme il fallait s’y attendre, sans connaitre les sagas judiciaires du genre de ceux qu’on a l’habitude de voir au niveau d’autres formations politiques, on vous montre tout de suite la porte : l’on est alors vite congédié du parti et humilié ; pour les cas les plus gênants avec une déclaration fracassante faite de gros mots, ou, par une simple déclaration écrite. Issa Bagalam, Souley Oumarou, Sabo Saidou, Ibrahim Yacoubou etc. Et récemment, le sieur Issa Lémine qui en a eu aussi pour son grade. Mais, quand les choses se passeraient entre un Issoufou, désormais ancien président, et un Bazoum, Président en exercice, la donne pourrait changer pour bousculer les rigidités d’un système imposé dans le parti quand un autre, au moyen du pouvoir qu’il détient aujourd’hui, pourrait réussir à faire pencher la balance de son côté et brouiller les règles en sa faveur. Il va sans dire qu’aujourd’hui, pour être le président déclaré élu, Bazoum a une longueur d’avance sur son ami-adversaire qui, artificiellement collé – symboliquement aux flans des collines de Kombo, géographiquement proches du palais – à un pouvoir qu’il croit avoir imposé, n’a en réalité aucune force pour agir au vu et au su des Nigériens qui ont montré à quel point ses apparitions à ses côtés les agacent.

Il ne faut pas se bercer d’illusions, ce n’est plus la lune de miel entre les deux hommes et il y a des raisons objectives pour que l’on s’attende à cette situation. Les Nigériens, depuis de longs mois, après que Bazoum ait montré de bons signes pour gouverner mieux au bonheur des Nigériens, appellent leur nouveau président à s’affranchir d’un attelage avilissant, aliénant, pour gouverner par lui-même ainsi qu’il pourrait le vouloir pour le pays. Mais, le président-philosophe semble manquer d’audace à se libérer du diktat du patronat du parti et de celui qui lui a fait le bonheur de diriger le Niger.

Des Chefs d’Etat amis du Niger au secours de la Renaissance III ?

L’on a appris de sources diplomatiques que trois chefs d’Etat étrangers auraient demandé à Issoufou Mahamadou, ancien président de la République, de quitter le pays pour permettre à son « ami » de régner librement, comme lui, l’a fait pendant dix ans sans que son parti ou un autre ne lui ait imposé quoi que ce soit. Si tant est que son choix de quitter le pouvoir pour que ce qu’il appelle son alternance se réalise même dans les conditions que l’on sait, alors il doit comprendre que ce n’est plus lui qui est au pouvoir et qu’il doit s’éloigner autant que possible du pouvoir pour éviter ces confusions de rôle à la tête de l’Etat. D’ailleurs, pensent bien d’analystes, il aurait pu s’inspirer de l’exemple sénégalais avec Abdou Diouf qui avait choisi de quitter le pouvoir et de s’éloigner de son pays et du pouvoir, pour ne pas avoir à être accusé de gêner ses successeurs. Comment le Sénégal, peut-il oublier un tel fils qui s’est imposé un tel comportement magnanime, refusant que le pouvoir l’éblouisse à perdre ses lucidités ? Quand des hommes se surestiment, pensent qu’ils sont indispensables et incomparables, pétris de vanités, alors il faut croire qu’on ne peut rien attendre de tels hommes. Mais pourquoi donc Issoufou ne veut pas laisser tranquille son successeur gouverner par luimême ? De quoi doit-il avoir si peur pour vouloir coûte que coûte exercer un contrôle d’un pouvoir qu’il a, de toute façon, perdu et qu’il ne doit pas manipuler même si, par quelques précautions et calculs, il se serait arrangé à le désigner, à le préférer et même à l’imposer ? Pourquoi, donc, n’a-t-il pas obtempéré à ces conseils avisés de la part de chefs d’Etat étrangers qui savent sans doute que la doublure inconfortable qu’il impose à Bazoum à la tête de l’Etat ne pourrait perdurer sans pousser à bout de patience un homme qui aspire à rentrer dans l’Histoire ? Est-ce à comprendre qu’il est décidé à le coincer, à le gêner, à le contrôler, à le frustrer jusqu’à ce qu’il en ait assez pour menacer de lui laisser « sa » chose ?

Bazoum doit continuer à se complaire dans ce carcan ?

Au risque de ne pas pouvoir bouger et « avancer » ainsi qu’il le clamait au bout de son mandat, Bazoum doit, pour survivre politiquement, briser les chaînes, sortir du carcan, pour émerger et redécouvrir ses potentialités, ce qu’il a comme énergie et comme leadership pour enfin prendre son pouvoir et agir vite pour rattraper le retard de deux ans qu’il a accusé sur un mandat de cinq ans. Le Niger, et même le PNDS, a des cadres compétents, des Nigériens intègres, capables d’initiatives pour transformer le pays. Le Niger a des chances, il a des ressources et des hommes valables. Il faut le lui laisser la chance d’en profiter pour que ce pays qui n’a que trop souffert, comme Patrice Talon en si peu de temps a réussi à transformer son pays, puisse enfin, lui aussi, repartir pour enfin laisser briller dans le pays mille et un feux, mille et un soleils ! Les Nigériens ne peuvent pas être l’espèce la plus tarée de la race pour être ce pays à la traine, toujours dernier, et surtout pour être ces hommes méconnaissables, tant leur visage a gravement changé pour porter ces hideurs par lesquelles on ne les reconnait plus ? Pourtant, il y a quelques années, l’homme nigérien était apprécié partout, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, et il a montré à quel point il est pertinent et compétent, rigoureux et exigeant, travailleur et discipliné. Pourquoi en si peu de temps, sommes-nous devenus si médiocres, sans aucune envergure, portant ces nouveaux masques socialistes qui nous rendent ces laideurs répugnantes ?

Bien d’observateurs se demandent alors, face à un tel entêtement à lui dénier sa présidence, pourquoi Bazoum, devrait-il avoir cette flexibilité, cette mollesse injustifiable pour qui gère des destinées humaines, cette soumission incompréhensible comme si quelques complexes lui feraient douter de la légitimité de son pouvoir ? Et de lui-même.

Mairiga