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Gouvernance, espoirs et déceptions au Niger : L’aventure ambigüe de Bazoum Mohamed

Porté à la tête de l’Etat à la suite des élections controversées de décembre et février 2021, Bazoum Mohamed semble balloté entre des idées de gouvernance totalement exclusives. Il ne cesse de faire et de renouveler des promesses de gouvernance vertueuse, mais n’arrive pas à se déterminer concrètement. C’est encore le cas, le 13 janvier 2022 où, on ne sait piqué par quelle mouche, il a invité les acteurs de la société civile à une concertation sur des sujets d’intérêt général. Une concertation qui a duré quatre heures d’horloge mais qui n’ont pas permis au chef de l’État de convaincre ses interlocuteurs du jour de sa bonne foi, encore moins de ses capacités à réaliser ce qu’il promet. L’affaire du ministère de la Défense nationale est un cas probant. Malgré le sort, carabiné, qui a été récemment réservé à ce scandale par la renonciation de l’État à se constituer partie civile, le Président Bazoum Mohamed ne s’est pas gêné pour en parler, promettant, comme toujours, de parvenir à quelque chose là où les faits le démentent. Une attitude qui le ridiculise à la limite, lui enlevant tout crédit sur les grandes questions et préoccupations de ses compatriotes.

Il est aujourd’hui admis de toutes parts que Bazoum Mohamed est comme le personnage de Cheikh Hamidou Kane, embarqué dans une aventure ambigüe où on a de plus en plus du mal à le situer, et donc, à le suivre et à comprendre ce qu’il veut pour le Niger, ce qu’il peut faire et s’il compte réellement le faire.

Le style de gouvernance a changé et les Nigériens l’applaudissent par rapport à ça. Il prend la peine d’écouter les autres, y compris sur les questions qui fâchent et qui aurait irrité à mort son prédécesseur, il se déplace pour aller voir ses compatriotes en détresse et décompresse de mieux en mieux un climat social tendu.

Il ne peut non plus faire en sorte que la justice soit rendue, en toute impartialité, sur des affaires dont il connaît parfaitement la gravité pour ne pas conduire les auteurs et leurs complices à la potence, comme dirait le Pr Katambé. Il a beau être président de la magistrature, chef de l’État et chef suprême des armées, il ne peut bousculer les dogmes du système auquel appartient et qui l’a engendré. Ne lui demandez pas de faire ce qu’il ne peut pas.

Pourtant, Bazoum Mohamed est président de la République, investi officiellement le 2 avril 2021 pour présider aux destinées du Niger pendant cinq ans. Présider aux destinées du Niger ?

Bon, n’exagérons pas, car c’est bien lui qui porte le titre de chef de l’État, mais ne lui demandez ce que seuls les dieux peuvent faire. Laissez-le dans son aventure ambigüe, car c’est une tragédie intérieure plus que suffisante pour détruire un homme. Bazoum Mohamed est face à un choix cornélien : soit il fait, et c’est toujours sur les actes que l’on est jugé et non les discours ; soit, il se tait, définitivement lorsqu’il est question de parler de certains sujets. Or, Bazoum Mohamed ne sait pas, ne peut pas se taire. Il poursuivra, donc, son aventure ambigüe sans se rendre compte, un instant, qu’il court sur un tapis de course.

Laboukoye