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Une opposition politique en panne de stratégie de combat !

« Si la majorité actuelle fait ce que beau lui semble dans le pays, c’est tout simplement parce que l’opposition politique est amorphe », s’est indigné un militant d’un parti de l’opposition, dans une tribune libre d’une plateforme sociale ! Ce constat de la paralysie de l’opposition politique nigérienne est largement partagé par bon nombre d’analystes indépendants, dont l’éminent universitaire Souley Adji, Maître de Conférence à l’université Abdou Moumouni de Niamey et chroniqueur chez notre confrère, ‘’L’Enquêteur’’. La seule voix audible de l’opposition politique actuelle est un lointain écho du baroud d’honneur que semble livrer, de nos jours, le président de l’Alliance du Mouvement pour l’Emergence du Niger (AMEN-AMIN), Omar Hamidou Tchiana, alias ‘’Ladan’’. Mais, trop esseulé, manquant sans doute de stratégie de combat bien élaborée et bien calée, le personnage peine encore à imprimer à son action politique un engagement total et une détermination sans faille pour être le porte-étendard d’une jeunesse ou d’une opinion publique à la recherche d’une nouvelle icône politique nationale. Pourtant, ce ne sont pas les belles occasions qui font défaut pour permettre à l’opposition politique nigérienne de sortir de sa torpeur actuelle. La gestion de la pandémie du COVID-19, la hausse vertigineuse du gas-oil, l’augmentation des prix des denrées de première nécessité, la question sécuritaire, et cerise sur le gâteau, l’Uraniumgate. Voilà, peutêtre l’un des grands rendez-vous ratés de l’opposition politique nigérienne actuelle, qui aurait pu tenter d’exploiter à fond cette affaire, en demandant, par exemple, à l’Assemblée nationale, une mise en accusation de l’ex-président de la République, Issoufou Mahamadou, pour haute trahison. On sait de façon certaine que cette demande n’aurait eu aucune chance de prospérer du fait du vote mécanique entre majorité et opposition, néanmoins, elle aurait eu le mérite de poser le devant la représentation nationale.

Sous la 5e République, lorsque le groupe parlementaire de l’opposition politique déposait des motions de censure contre le gouvernement dirigé par Hama Amadou, Issoufou Mahamadou et ses camarades savaient déjà que leur action avait toutes les chances d’aboutir, avec bien sûr la complicité de qui vous savez A l’époque, leur objectif principal était d’abattre Hama Amadou et de l’empêcher à tout pris de prendre la présidence de son parti le MNSDNassara et de susciter un débat national en direct à la télé sur des questions d’intérêt national afin de dénoncer les travers du régime en place, don Hama est le Chef du Gouvernement. A cette époque, l’Assemblée nationale était encore valable pour être le théâtre de ces joutes verbales et autres envolées lyriques spectaculaires qui emportaient souvent l’adhésion du public nigérien. De nos jours, cette tribune populaire n’est, hélas, plus que l’autel sacrificiel de l’intérêt national, mieux, la caisse de résonance d’une classe dirigeante devenue insouciante face aux douleurs profondes du peuple. Alors, l’opposition politique n’arrive plus à faire entendre sa voix, à plus forte raison sa cause, tant elle brille par une apathie déconcertante. Si l’opposition politique nigérienne était assez courageuse et imaginative, elle pourrait tirer un meilleur parti de cette affaire de l’Uraniumgate, ne serait- ce qu’ébranler l’actuelle majorité au pouvoir, à défaut de la renverser. Lui, Issoufou Mahamadou, lorsqu’il était un fervent opposant, savait exploiter la moindre occasion pour prêcher pour sa paroisse. Il s’investissait à fond et pleinement dans son sujet et en se donnant tous les moyens possibles pour parvenir à ses fins légitimes ou pas, c’est selon, voyez-vous ! Comment arrivaitil à entrer en possession de documents administratifs censés rester confidentiels, notamment les fameuses LAP et PSOP entre autres ? Plus tard, l’on saura que tous les documents publiés par Maman Abou, Directeur de Publication de l’hebdomadaire ‘’Le Républicain’’, provenaient du président du PNDSTarayya de cette époque dont on sait que Maman Abou était très proche. Issoufou Mahamadou ne lésinait point sur ses efforts, son énergie et sur son patrimoine pour mener son combat politique, car il savait ce qu’il recherchait. Ce témoignage est fait à rebours, en raison de notre profond désaccord avec le personnage pour un tas de raisons politiques. Mais, cela ne devrait pas conduire, nécessairement, à ne pas lui reconnaître cet investissement personnel exceptionnel qui lui a permis d’avoir eu une longévité sur tous ses adversaires politiques et de demeurer encore toujours influent sur son parti politique. Ne pas admettre ce fait pourrait relever de la mauvaise foi politique ou simplement de la myopie politique ! De tous les quatre leaders politiques de la première génération du Niger post-Conférence Nationale Souveraine (Mamadou Tandja, Mahamane Ousmane, Issoufou Mahamadou), il était, sans doute, le plus détesté au niveau des couches populaires et une partie de l’élite intellectuelle. Son idéologie politique, le Socialisme, semblait sonner creuse dans une société très en retard même dans sa scolarité, a fortiori dans sa citoyenneté, pour comprendre et internaliser les grandes valeurs et les concepts fondamentaux professés par cette doctrine politique. Mais, à force de travail acharné, il était parvenu, progressivement, à se corriger de cette image défavorable auprès d’une partie de l’opinion publique nationale, grâce à une habilité politique pour masquer ses défauts, au prix d’un engagement dévotionnel extraordinaire. Sous les conseils éclaires des sages du parti, il avait réussi à adoucir son tempérament politique tempétueux et à se forger une stature présidentielle. En dépit de multiples revers politiques, il ne renonça jamais à se remettre en selle, en se disant que la prochaine fois serait la bonne. En fait, il était tout simplement habité par une foi inébranlable dans sa quête du graal suprême à l’intérieur de laquelle il avait construit toute sa personnalité. Il ne vivait que pour devenir Président de la République, même en se rasant la barbe devant le miroir géant de sa salle de bain. C’est peut-être là la grande différence avec l’opposition politique actuelle très belle seulement pour se voir à travers un miroir déformant, mais incapable d’incarner les exigences et les hautes valeurs attendues de la part d’hommes et de femmes ayant fait l’honneur chaste de servir loyalement et dignement la patrie.

Voilà où la perte du feu sacré chez les hommes et femmes politiques nigériens aura conduit la démocratie nigérienne aujourd’hui en grand péril ! L’absence de grande figure politique pour incarner la mission de redéfinition du visage du Niger d’aujourd’hui et de demain explique largement l’état lamentable dans lequel se trouve ce qui est censé être l’alternative politique crédible au pouvoir politique en place, à savoir l’opposition politique. Hier, c’étaient les Ibrahim Yacoubou et consorts qui aboyaient contre la caravane du régime de la renaissance, mais depuis la pandémie du COVID-19, excuseznous, du ‘’ventre creux’’, ils ont rejoint le banquet funeste de la renaissance, encore au stade des desserts, en compagnie d’illustres convives et autres compagnons d’infortune dans une vie antérieure, Albadé Abouba et Seini Oumarou, notamment cette soi-disant Coalition pour une Alternance Politique (CAP21). Quant à Mahamane Ousmane, depuis ses cuisants revers judiciaires, il a disparu des radars politiques et son parti, ‘’Tchanji’’, ne fait que se vider de sa substance avec les migrations de ses plus proches parmi les proches, Doudou Rahama, Jina et autres, vers d’autres horizons politiques plus dégagés que l’attitude démissionnaire de Mahamane Ousmane, alias Nafarko. Quant à Hama Amadou, il doit être profondément déçu du fatalisme de ses troupes et de ses lieutenants. Que restait-il alors de consistant pour continuer la lutte pour l’avènement d’un Niger meilleur, plus démocratique et prospère ? Rien, aujourd’hui, hélas ! Quel gâchis considérable ! Quel désespoir politique et social ! Quel dommage, tout simplement !

Manifestement, le costume d’opposant politique n’est pas un habit prêtà- porter, mais bien un vêtement cousu sur mesure juste et précis et qui n’admet pas des retouches de réajustements, dussent-elles être l’oeuvre du célèbre styliste français, Christian Dior !

Adamou Maiga