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Sécurité présidentielle : Bazoum Mohamed aurait-il décidé de prendre en mains sa sécurité

Pendant longtemps, la question a été au centre du débat public, nombre de Nigériens trouvant simplement aberrant que le Président Bazoum ait gardé la même Garde prétorienne qui a assuré la sécurité de son prédécesseur. Une preuve irréfutable de la continuité qu’il a promise mais qui le met assurément dans une posture délicate. Fidèle soldat au service d’Issoufou Mahamadou, le général Tchiani est-il en mesure de servir Bazoum Mohamed avec la même loyauté ? Après six mois d’exercice du pouvoir et de collaboration, la confiance est visiblement remise en cause. Il faut assurément beaucoup plus que la garantie de l’ancien président pour que l’actuel se sente protégé et en sécurité. L’information faisant état d’un renvoi de 71 des 80 agents commis à sa sécurité rapprochée traduit certainement chez Bazoum une inquiétude de sous-traiter sa sécurité directe. Les divergences de vue quant à la conduite des affaires publiques sont passées par là. La lutte contre la corruption, en particulier, représente la grande pomme de discorde entre les deux hommes. Bazoum veut combatte ce fléau qu’il dit compromettre gravement les capacités de développement du pays tandis que son prédécesseur et mentor entend assurer ses arrières et celles de ses affidés. Mais il n’y a pas que ça qui les divise. Aux postes-clés de l’État, le Président Bazoum qu’on dit n’avoir pas mis de bâtons dans les roues à Issoufou pendant 10 ans, entend placer des hommes de confiance qui mettront en oeuvre sa politique. Une perspective qui affaiblit progressivement l’ancien président qui perd ainsi de solides appuis dans les arcanes du pouvoir. La purge, subtile, il faut le dire, a déjà commencé et de fidèles adeptes de l’ancien président sont en train de se retrouver, du jour au lendemain, en “chômage”.

Un président qui meurt d’envie de convaincre

Pour l’ancien président comme pour nombre de ses affidés, la continuité est en train de tourner au vinaigre. Bazoum Mohamed, dans leur entendement, n’est qu’un clone d’Issoufou et à ce titre, ne peut déroger aux desiderata de celui- ci. Or, Bazoum semble avoir fait le pari de démontrer qu’il peut, à contrario, être un excellent parti pour le peuple nigérien dont une bonne partie a contesté la légitimité et la légalité de sa candidature à la présidence. Un pari qui, s’il n’est pas près d’être gagné, préfigure de belles perspectives pour le Président Bazoum. A condition, toutefois, qu’il reste constant et conséquent sur ses engagements à faire de la lutte contre la corruption son cheval de bataille.

Seulement, ce pari, non seulement, discrédite son prédécesseur dont les deux mandats ont été jalonnés de corruption à grande échelle, mais le Président Bazoum ne peut de toute façon le réussir s’il doit rester fidèle à la continuité. Et il l’a fort bien compris puisque la célébration de ses 100 premiers jours à la tête de l’Etat a été marquée par un changement de paradigmes notable. Le slogan « Consolider et avancer » mute et devient, à la une du journal gouvernemental, « Rassembler et avancer ». Un changement de cap qui annonce l’existence de divergences profondes sur la nature de la gouvernance à privilégier.

Contrarié et contraint de revenir sur ses choix, le Président Bazoum veut visiblement se donner les moyens de sa politique

Si, donc, le Président Bazoum s’est effectivement débarrassé de 71 des 80 agents de sécurité rapprochée, ce qui ne peut se faire que sur une base sélective, il est fort à craindre que la rupture entre l’ancien et le nouveau président ne soit totale. Bazoum Mohamed aurait-il décidé de prendre sa sécurité en mains qu’il ne s’en prendrait pas autrement. La volonté de s’émanciper de son mentor est d’autant plus perceptible chez Bazoum que, aussi bien à propos de la gouvernance économique que sur le plan sécuritaire ou encore dans le style de gouvernance, il a affiché une nette différence avec son prédécesseur. Et comme il a dû avaler plein de couleuvres, fortement contrarié dans la gestion des affaires publiques et contraint de revenir sur des choix opérés ¯ il a été obligé de se séparer de son conseiller en communication, Waziri Idrissa ¯ le Président Bazoum s’est visiblement résolu à se donner les moyens de sa politique. Se prémunir contre toute éventualité apparaît dès lors comme la panacée.

En attendant d’avoir plus d’éléments d’appréciation, les lignes du pouvoir sont désormais diffuses. On ne sait plus qui est du pouvoir et qui est de l’opposition, tant le Président Bazoum arrive, pour le moment, à ménager la chèvre et le chou. Jusqu’à quand ? S’il parvient à jouer sur les tableaux, notamment en s’émancipant de son mentor, ne serait-ce que sur le plan sécuritaire, tout en créant les conditions d’une décrispation politique, le Président Bazoum pourrait espérer faire appliquer sa politique. La lutte contre la corruption à laquelle il semble tenir est à ce prix.

Yaou