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Redéploiement de Barkhane au Niger / Les acrobaties de la majorité au pouvoir : Entre opportunisme et hypocrisie face à la France

 La bourde du Président Bazoum Mohamed a manifestement ébranlé le pouvoir en place. Après les tentatives de certains ministres et conseillers qui ont tenté, en vain, d’éteindre le feu allumé de la main présidentielle, ce sont les partis de la majorité au pouvoir qui se sont employés à la tâche. Le samedi 5 mars 2022, ils ont rendu publique une déclaration dans laquelle le Pnds Tarayya et ses alliés ont fait remarquer que « le Niger est entouré de cinq foyers de tensions et de guerres asymétriques dans lesquelles nos vaillantes forces de défense et de sécurité ont su défendre et préserver l’intégrité de notre pays avec bravoure et détermination ». L’entrée en matière de la déclaration des partis de la majorité présidentielle laisse ainsi penser qu’il s’agirait d’une position qui exclue toute présence militaire étrangère sur le sol nigérien. Pourtant, il n’en est rien. La suite est un vrai cocktail, une salade qui traduit, souligne Issa Kanga, dans un post sur les réseaux sociaux, la position hypocrite des partis alliés au pouvoir. Il dénonce… Son jugement n’est peut-être pas faux. Prétendre reconnaître de grands mérites aux forces de défense et de sécurité nigériennes sans leur laisser de mener leur mission, dans la plénitude de la souveraineté nationale relève d’une pirouette des plus osées. Il s’agit, dit un observateur, de ménager la chèvre et le chou.

Selon une source politique qui a requis l’anonymat, l’objectif de la déclaration des partis de la majorité présidentielle n’était pas de vanter les mérites des forces de défense et de sécurité, mais il leur fallait sacrifier à cette routine. Selon des observateurs, l’hommage rendu aux Forces de défense et de sécurité nigériennes n’est visiblement qu’un accessoire utile, des ornements dont les partis de la majorité présidentielle croient devoir se parer avant toute homélie sur la présence de forces militaires étrangères, particulièrement les forces françaises de Bharkane, Takuba étant mortnée. Leur préoccupation, dit notre source, était de deux ordres. Il s’agissait, dit-elle, d’exprimer leur solidarité et leur soutien au Président Bazoum, sévèrement critiqué au sein de l’opinion nationale pour avoir déclaré avoir libéré et reçu immédiatement des terroristes au palais présidentiel. C’était lors d’une conférence des cadres qu’il a animée le 25 février 2022 à Mahatma Ghandi. Et en se faisant le devoir d’exprimer leur solidarité et leur soutien sans ambages au Président Bazoum, les partis de la majorité présidentielle ont fait d’une pierre, deux coups en réaffirmant leur adhésion au redéploiement des forces armées françaises initialement présentes au Mali.

Faut-il déduire que la libération des terroristes et l’invite faite aux forces françaises de Barkhane de venir s’installer au Niger procéderaient d’une quête de paix et de cohésion sociale pour le Niger ?

Les partis au pouvoir disent avoir vu dans les boutades du Président Bazoum un « langage clair, franc et direct sur les perspectives de redéploiement au Niger des forces étrangères, «redimensionnées et réajustées» pour l’accompagnement de notre pays dans la lutte contre les groupes armés terroristes ». On ignore ce que les partis politiques de la majorité entendent par « redimensionnées et réajustées ». Cependant, ils s’en réjouissent, non sans consacrer au rituel qui veut qu’il soit fait mention des Fds nigériennes. Et pour ne rien laisser au hasard, les partis de la majorité présidentielle assimilent la décision de Bazoum Mohamed à un « engagement responsable dans sa quête de paix et de cohésion sociale ». Fautil déduire que pour les partis au pouvoir, la libération des terroristes par le Président Bazoum et l’invite faite aux forces françaises de Barkhane de venir s’installer au Niger procéderaient d’une quête de paix et de cohésion sociale pour le Niger ?

Dans la voie choisie par Bazoum Mohamed, il bénéficie, en tout cas, comme la déclaration l’a si bien fait ressortir, du soutien ferme des partis de la majorité qui disent l’encourager à prendre, en sa qualité de magistrat suprême, chef des armées, toutes initiatives tendant à renforcer la sécurité, la paix et la quiétude sociale entre citoyens nigériens. Seulement, les mesures préconisées et prises par le Président Bazoum et avant lui, Issoufou Mahamadou, n’ont pratiquement rien apporté au Niger. Rien que des larmes, de la désolation et de vastes territoires laissés à la merci des terroristes. La libération des terroristes et la présence militaire française sont réellement sujettes à caution. Pour les organisations de la société civile, la motivation du pouvoir de Niamey est ailleurs. S’il croit tant aux forces de défense et de sécurité nigériennes, pourquoi recourt-il tant à des forces militaires étrangères qui, du reste, n’ont apporté aucune valeur ajoutée dans la lutte contre le terrorisme ?

Il n’y a jamais autant de poux que sur les têtes roses

Ce sont des milliers de soldats qui se retrouveraient finalement au Niger, aux portes du Mali, font observer à Hassoumi Massoudou, les journalistes français qui l’ont interviewé lors de sa visite en France. Ils semblaient eux-mêmes surpris par la facilité avec laquelle les autorités de Niamey ont accédé à la requête de l’Elysée. « Je ne connais pas le nombre », laisse entendre le ministre des Affaires étrangères nigérien, étalant la légèreté dont on accuse les autorités nigériennes, prêtes à tout pour faire plaisir à l’Elysée.

Faisant sans doute allusion à la précision du chef de l’État qui a eu la maladresse d’indiquer que parmi les chefs terroristes, il y avait même un zarma, ses soutiens politiques ont souligné qu’il n’y a, dans la démarche de Bazoum Mohamed « ni ethnicisme ni volonté de violer l’indépendance de la justice ». Pourtant, ce n’est pas l’avis de nombreux Nigériens qui ont vu dans ce propos de Bazoum Mohamed une volonté de stigmatisation d’une des composantes de la population nigérienne. La mention n’apportait rien à l’information qu’il avait donnée. Quid, donc, des partis au pouvoir qui disent « fustiger l’attitude de ceux qui tenteraient d’exploiter et de mal interpréter le message du Président Bazoum, allant jusqu’à lui faire des procès d’intention ? Si, pour le pouvoir, il s’agit là d’habitudes malsaines qui consisteraient à chercher des poux sur un crâne rasé, certains rétorquent qu’il n’y a jamais eu autant de poux que sur les têtes roses.

Doudou Amadou