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Déclaration de la ‘’MAJORITE’’ / MRN : Un cri de détresse

Le Niger démocratique traverse les moments les plus difficiles de son histoire. Jamais, il n’a été aussi méticuleusement et savamment divisé ; jamais ses enfants n’ont été – et pour quel dessein sinistre – méthodiquement opposés, jamais l’économie n’a été saccagée par des prédateurs de gros poils qui ont relevé l’unité du détournement et du vol dans le pays au milliard, jamais l’école et la jeunesse n’ont été aussi abandonnées, jamais le pays n’a été confronté à un problème de sécurité qui a fragilisé l’Etat désormais incapable de protéger des populations, jamais des écoles n’ont été fermées du fait de l’insécurité avec des milliers d’enfants qui ne vont plus à l’école, jamais des problèmes de régions (cas des fêtes tournantes et de l’insécurité) n’ont été «régionalisés» que sous ce régime des socialistes. Jamais la démocratie n’a été «sectarisée», violentée, minée par les injustices criardes et une exclusion sauvage que par le socialisme nigérien. Ce sont des problèmes vrais que vivent les Nigériens dans leur âme et personne ne saurait les empêcher de le dire, d’exprimer leurs malaises, leur mal-être. Gémir lorsqu’on a mal n’est que naturel…

Après une déclaration moche dans laquelle, la MRN, amputée de l’APR dans une telle démarche, assurait Bazoum Mohamed de son soutien, la même structure revient à la charge, avec en fin de semaine dernière, le samedi plus précisément, une autre déclaration qui est le signe que le régime est fébrile, traversé par quelques appréhensions, conscient enfin sans doute de ses fragilités et d’une situation nationale délétère dont il pourrait redouter les complications. Mais au lieu d’avoir la responsabilité qu’impose le contexte qu’une conjoncture régionale et internationale oblige au tact et à la finesse politique, la MRN croit que des déclarations peuvent la protéger, oubliant que le peuple ne croit plus en elle et que les Nigériens, attendant plus des actes concrets, ont plus que jamais tourné le dos à son socialisme «frelaté» et à l’iniquité de sa gouvernance, de loin la plus désastreuse que les Nigériens n’aient jamais connue depuis plus de soixante ans. Gouverner, c’est de l’art qui appelle un savoir-faire autant qu’un savoir être qui manquent cruellement aux socialistes nigériens, plus portés par leurs vanités et leur arrogance. Pourtant, objectivement, il y a à faire attention : la dernière chronique de Jean-Baptiste Placca interpelle.

La dernière déclaration de la MRN ne surprend pas car elle reste dans le même registre, dans le même sillage, celui notamment de faire croire que tout va bien et qu’elle serait sur la bonne voie quand la réalité montre et dit tragiquement tout le contraire. Comment peut-on de manière si sui cidaire se mentir ainsi pour croire pouvoir triompher sur le faux ? Depuis quelques jours et après ce qu’on a appelé la conférence des cadres initiée par Bazoum Mohamed pour aborder avec des Nigériens la situation du pays, certains avaient cru naïvement que le régime avait enfin compris la gravité de la situation pour annoncer de grandes décisions afin de décrisper le climat politique et social, et appeler au sursaut patriotique afin de sauver un pays sur lequel planent plusieurs menaces en rendant possibles le pardon et la réconciliation. Le PNDS, peut-il comprendre qu’il est allé trop loin depuis dix ans qu’il a gouverné ce pays et qu’il a détruit la nation fragile, elle et ses valeurs, les valeurs de probité, de rigueur que d’autres régimes ont inculquées aux Nigériens dont on n’avait jamais douté, ailleurs et en d’autres temps, de l’intégrité ?

Le régime, dans ses maladresses, ne sait plus comment s’en prendre pour corriger ses défauts et communier avec un peuple qui ne croit plus. Depuis la sortie du président mal préparée d’un point de vue communicationnel, l’on a vu des acteurs politiques, ouvriers du régime, envahir l’espace médiatique pour recadrer le message du magistrat suprême et dire que les Nigériens ne comprennent plus français pour comprendre le langage philosophique du président philosophe. Peuvent-ils croire que les Nigériens puissent comprendre cette déconstruction- reconstruction du discours présidentiel qui tente laborieusement de donner un sens nouveau mais raté du message de Bazoum Mohamed sur une situation réelle que des populations vivent douloureusement dans le pays ? Les Nigériens ne sont pas dupes ! Et ils ne mangent pas de cette salade.

Comment peuvent-ils reconnaître dans leur fameuse déclaration que «le Niger reste le plus confronté» à la menace sécuritaire et ne pas comprendre ceux qui – et ils sont nombreux désormais – dans le pays rejettent leur politique et demandent une refonte totale d’une gouvernance qui ne voit partout que l’argent à gagner pour prendre le soin de caser un tel et un tel à un «poste juteux» et tant pis qu’il n’y ait pas de résultats pour le pays, l’essentiel étant que les siens se soient grassement enrichis. Le Niger, peut-il continuer à vivre ainsi et surtout quand, dans le même moment, échappant au contrôle du régime et de son socialisme hybride, le coût de la vie ne fait que montrer en flèche et que les ménages se précarisent ? Pourquoi, le PNDS et ses alliés ne le disent pas, pourquoi ils ne disent pas que la situation inquiétante pousse plusieurs secteurs de la vie nationale, notamment certains dont les acteurs sont proches du régime, à aller en grève depuis des jours. Ce que les Nigériens disent n’est pas qu’une seule vie de l’esprit.

Et comme on peut s’y attendre – la Renaissance ayant habitué les Nigériens à ces condamnations faciles se refusant à regarder en face la triste réalité d’un pays qui vit et va mal – les socialistes reviennent avec leurs obligés politiques, alliés soumis et assujettis, pour dire, manquant de solutions aux problèmes vrais des Nigériens, que ce sont d’autres qui seraient à la base de tout dans le pays. Analyser un discours, est-ce du seul ressort, du seul apanage des socialistes, de leurs seules compétences pour croire qu’un autre ne puisse pas lire entre les lignes pour donner sens à un message politique fut-il le plus énigmatique et surtout quand cela vient d’un homme qui n’a jamais su que parler avec sa sincérité pour dire sans gang ce qui vient de son coeur et de son âme ? Finissant de brosser la situation d’un pays qui va mal et qu’ils gouvernent depuis plus de dix ans – ce qui aurait suffi à faire comprendre qu’ils sont incapables puisqu’ils reconnaissent dans la déclaration que la situation ne fait que se dégrader au plan sécuritaire de jour en jour – les socialistes et leurs alliés en viennent à la conclusion facile que ce que vit le Niger ne viendrait que de la lecture étriquée de gens malveillants qui chercheraient noise à leur système. Aussi, disent-ils que «C’est le lieu de fustiger l’attitude de certains de nos concitoyens qui tentent d’exploiter et de mal interpréter le message du Président de la République, Chef de l’Etat lors de la conférence des cadres ». Mais alors, pourquoi avoir besoin d’expliquer «un langage clair et franc» ? La clarté, a-t-elle besoin d’explication, de justifications somme toute fastidieuses ? La clarté, n’estce pas ce que tout le monde – y compris les non-initiés – peut comprendre ? On ne joue pas avec l’intelligence d’un peuple, ni ne ruse avec l’Histoire. Et on entend cette phrase terrible dont on ne sait plus à quoi elle rime : «Or, dans la démarche du Président de la République, il n’y a ni ethnicisme, ni volonté de violer l’indépendance de la justice». Pourquoi parler de ce qui n’existerait pas ? Qui a dit, en utilisant le «Je», et pas une fois dans son intervention, sachant bien qu’un «nous» au moins le mettrait hors de tout soupçon, qu’il a fait libérer des terroristes et qu’il les a même reçus au palais de la présidence où ne peuvent plus aller des adversaires politiques depuis plus de huit ans ? La MRN ? Peut-elle croire que Bazoum ne sache plus la différence entre «Je» et «nous» ? Soyons sérieux, voyons !

Et on peut comprendre la mise en scène de la déclaration avec les acteurs mis en focus. Il se trouve que le renforcement de la cohésion auquel appelle la MRN, faut-il être sincère avec soi-même, ne se fait ni avec de la démagogie, ni avec les paroles d’un artiste, ni encore avec les paroles prêchées d’un leader religieux quelconque. Et si tant est que le régime croit à la cohésion nationale et voudrait travailler à son «renforcement », il doit aller au-delà des mots pour poser des actes courageux, politiquement forts qui peuvent convaincre et vaincre des coeurs sceptiques. Les Nigériens ne demandent d’ailleurs pas mieux mais ils croient que le régime, jusqu’ici, et ce malgré les professions de foi qu’on a entendue maintes fois, n’est pas sur la bonne voie et avec la bonne manière. Un pays est un bien commun pour lequel, un groupe, fut-il majoritaire, ne peut, seul, décider. En effet, le Niger n’appartient pas plus à Bazoum Mohamed et sa majorité qu’à ces autres Nigériens qu’on voudrait écraser et anéantir parce qu’ils ne seraient pas politiquement avec le régime, pensant autrement pour assumer leur différence dans la démocratie.

Dans cette déclaration, l’on ne lit aucune volonté de désamorcer une bombe sociale et politique qui couve, gravement explosive dans une société faite de malaises et de colères profondes, inassouvies. Il n’y a pas de magie : si Bazoum veut régner en président de tous les Nigériens, il doit savoir écouter les autres Nigériens et donner des chances à la paix et son pouvoir déjà contesté depuis huit moi. S’il se veut président d’un clan, c’est son choix. Il doit l’assumer. Mais la roue tourne…

Et on aura compris que le régime vit des moments de constipation politique, inquiet à regarder un horizon qui s’assombrit.

A.I