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Présence militaire étrangère au Niger : Bazoum Mohamed complimente, l’armée française tue

Le point de presse animé par le Président Bazoum Mohamed, la veille de l’entrée en territoire nigérien, de la colonne militaire française, a été, en fin de compte, une partie d’encensement de la France, de défense de ses intérêts et d’apologie pour ses autorités, pleines de magnanimité vis-à-vis du Niger. Une sortie dont Bazoum Mohamed aurait pu se passer, tant elle a suffi pour détruire, en un soir, le début de confiance qu’il s’est forgé dans les cœurs de ses compatriotes. La France ne gagne pas grand-chose au Niger ; au contraire, elle paie cher, perd de l’argent mais aussi des hommes, pour nous aider à rester debout », tel est en substance, l’éloge fait par le Président Bazoum à la France. Son panégyrique semble avoir dopé les convictions civilisatrices et humanitaires de l’armée française  qui en a donné une suite tragique. En tout cas, le propos de Bazoum a beaucoup plu en France où les médias l’ont largement repris dans leurs colonnes sous des formules flatteuses. Le journal français, Le Figaro, titre « Le président du Niger reconnaissant envers la France et ses sacrifices ». Un titre qui en dit long sur ce que pense la presse française des autorités nigériennes. Des autorités tournées en dérision, les mots reconnaissant et sacrifices ayant été mis entre guillemets. Personne, en vérité, à l’exception bien entendu du président Bazoum Mohamed et de ses potes, accrochés, on ne sait, à quel intérêt, n’est dupe quant aux sacrifices de la France au Niger. Bazoum Mohamed en a fait allusion, sans gêne.

L’armée française a tué au Niger. Et à ce jour, trois jours après les incidents, on n’a pas encore entendu le moindre regret de la part des autorités françaises.

Ses propos, ailleurs, dans les cercles de décision français, ont énormément plu. Et ils ont suffi à enivrer les éléments du convoi militaire qui irait, dit-on, à Gao, au Mali et qui a été bloqué, à Téra. Alors qu’elle a été bloquée, cinq jours, à Kaya, au Burkina Faso, sans aucun mort, au Niger, en moins de 48 heures, l’armée française a tiré et tué des personnes. Deux, exactement et 18 blessés, dont 11, grièvement. Pour les Nigériens, la messe est dite. Pour les Nigériens, il est clair que la France est certainement en territoire conquis au Niger. La sentence, sévère, vis-à-vis des autorités actuelles, est qu’elle a permis à une armée étrangère de tirer à balles réelles sur des manifestants civils. Selon le ministre de l’Intérieur, les manifestants auraient été particulièrement violents. Ce que l’opinion nationale a du mal à admettre, les vidéos en provenance de Kaya ayant montré des cas de violences exceptionnelles.

L’armée française a tué au Niger. Et à ce jour, trois jours après les incidents, on n’a pas encore entendu le moindre regret de la part des autorités françaises. Ni regret, ni excuses ! Quant aux autorités nigériennes qui ont fait savoir, par voie de communiqué du ministre de l’Intérieur, que c’est l’armée française qui a tiré et tué les manifestants, on n’en encore rien enregistrer comme réactions à l’encontre de la France. On ne s’y attend d’ailleurs pas, du moins si l’on s’en tient aux propos flatteurs du Président Bazoum vis-à-vis de la présence militaire française.

En attendant les sanctions contre le ministre de l’Intérieur et les chefs militaires qui ont conduit la mission de Téra…

Depuis les évènements malheureux de Téra, liés à la sortie médiatique du Président Bazoum Mohamed, il s’est subitement creusé une sorte de fossé entre ce dernier et ses compatriotes, désabusés quant à sa capacité à faire la différence avec Issoufou Mahamadou.

Bazoum Mohamed, qui a passé son temps à faire l’éloge de la France et de son prédécesseur, un homme particulièrement impopulaire aux yeux des Nigériens, a raté sa sortie. Il aurait dû se taire et laisser dire. Mais il a parlé, pour faire la part belle à Issoufou et à la France. Une erreur de communication qui le fait passer, tout au plus, comme un pantin sans aucune personnalité propre. Il a trop parlé de son prédécesseur pour ne pas susciter la colère de ses compatriotes.

La France a tué des Nigériens sur le sol nigérien et on attend le Président Bazoum pour s’expliquer sur cette conduite de conquérants de ses amis français. En attendant, bien sûr, qu’il fasse payer le ministre de l’Intérieur et les chefs militaires qui ont conduit la mission de Téra.

Doudou Amadou