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Gestion de l’Etat : Quel crédit accordé à la parole politique de nos dirigeants ?

Au Niger, les hommes politiques, par leurs inconstances, leurs paroles sans cesse reniées, par leurs retournements de vestes qui ont réduit, dans l’imaginaire du Nigérien, la politique à un jeu de fausseté, au mensonge, faisant croire que l’on ne saurait avoir de droiture et d’honneur à suivre, à défendre et à revendiquer en politique et qu’on peut, pour tout, tout s’autoriser, l’essentiel étant de parvenir à ses fins. C’est triste et c’est faux. En politique, l’on a, quoi qu’on dise, des valeurs à défendre, des lignes à suivre, des convictions à porter et celles- ci ne doivent pas être à géométrie variable. Voilà tout le problème de chez nous : les hommes politiques pensent que l’on ne défend que son intérêt, jamais un idéal, une conviction, des principes de vie et de politique, notamment dans une politique qui se veut un art noble dans lequel, seuls les hommes dignes peuvent alors se hasarder.

Ils sont méconnaissables, les nôtres dans le champ politique, aujourd’hui d’une couleur, un autre jour d’une autre. Sur 80%, l’on ne peut compter sur aucun ; l’écrasante majorité étant comme dirait l’autre, des girouettes, tournant au gré des vents. Lors de ses travaux en séance plénière de la première session ordinaire, au titre de l’année 2023, ayant débuté depuis des semaines, le samedi dernier, ainsi qu’il est de coutume à l’hémicycle, des ministres ont été interpellés sur des questions d’actualité. Dieu faisant bien les choses, parmi les deux ministres invités par la représentation nationale, il y avait un qui avait un certain discours à l’opposition d’où il opéra la spectaculaire gymnastique qui le fit atterrir à la Renaissance, partant dit-on, pour s’en excuser auprès de l’Opposition désertée, parce que des militants auraient trop faim, et que pour ce, il appelait sans cesse à faire le grand virage du déshonneur. Et comme dirait un Nigériens lambda, Dieu a fini par le rattraper pour les pauvres citoyens qu’il bluffait en d’autres temps avec ses paroles mielleuses. Aujourd’hui qu’il a la responsabilité de régler l’épineux problème d’électricité auquel les Nigériens font face, l’on découvre son impuissance, comme pouvait l’avouer avant lui le DG de la Nigelec qui, à bout d’idées pour régler les problèmes de la Nigelec, presque dépassé, informait les Nigériens qu’il n’y a que Dieu, wallaï, pour régler le problème, poussant à s’interroger sur les compétences qui lui ont valu de diriger cette prestigieuse société importante pour l’économie nationale et pour la sécurité du pays.

C’est dans un Tweet que le Président Omar Hamidou dit Ladan Tchiana, tout en exprimant sa « solidarité aux habitants de Niamey plongés dans le noir depuis des jours » à la suite de coupures intempestives, s’en prenait au régime des socialistes dont il plaint « l’échec général des politiques sécuritaire, éducative, économique et sociale du PNDS-Tarayya qui plonge le Niger dans l’abîme ». Mais le faisant, il envoie un pic gentil pour un des compagnons de lutte de l’opposition qui a passé de l’autre côté, rappelant les discours qu’il avait, il n’y a pas si longtemps à l’encontre de ses anciens-nouveaux amis. Ibrahim Yacoubou, peut-il ne pas douter que ces propos rappelés sont bien les siens ? Dieu a voulu qu’il soit là où il peut régler les problèmes d’énergies qui se posent aujourd’hui avec acuité aux Nigériens mais l’on ne peut, face à la réalité, que plaindre son impuissance, l’homme n’ayant aucun moyen de montrer qu’il est à la bonne place pour les convaincre de sa capacité à relever les défis énergétiques. C’est donc opportunément que l’on peut relire ces propos qu’il tenait en d’autres temps où le « guerrier » avait des convictions et une parole trop blessante : « Au Niger, 60 ans après l’indépendance, s’il y a un domaine qui résume en lui seul le manque de vision stratégique, l’incompétence, la faillite, l’incurie, les éléphants blancs, le mépris des citoyens, l’impunité de super-dirigeants intouchables, c’est bien celui de l’électricité ». Répondant à une question que lui posait le député Khoumaini Daoud sur le problème de l’accès à l’électricité au Niger, l’ancien syndicaliste et ancien militant du SNAD, le Ministre d’Etat, ministre de l’Energie et des Energies Renouvelables, M. Ibrahim Yacoubou, qui avait à répondre d’une telle question n’avait pas convaincu. Il était même difficile de reconnaitre l’homme qui avait ces discours forts et poignants, souvent percutants. Il sombrait dans le doute. Quand le ventre commande à la tête, il est difficile de rester soi-même. Alors que l’on ne peut rien entendre de ce qui s’entreprend pour améliorer l’accès des Nigériens à l’électricité et notamment ceux des campagnes, il vient gaver les Nigériens de projets incertains, disant à qui veut l’entendre que : « Nous visons dans cette stratégie de faire en sorte que 80 % de Nigériens d’ici 10 ans puissent avoir accès à l’électricité. Aujourd’hui, nous sommes à peu près à 20% et dans le monde rural, où vit 80 % de la population, nous sommes à moins de 5% ». Il ne maitrise plus le temps, car dans dix ans, il se peut que ce ne soit plus ses alliés et lui-même qui soient au pouvoir. C’est à l’échéance du mandat du président qu’il faut fixer un objectif que les Nigériens pourront apprécier. Depuis combien de temps – peutêtre depuis que Pierre Foumakoye Gado restait à l’Energie – que l’on n’a plus revu ces cérémonies où le ministre allait actionner les installations pour annoncer officiellement qu’une localité est désormais électrifiée. Peut-on d’ailleurs amener de l’électricité dans des zones où sévit l’insécurité ? Et ça le ministre de l’Energie ne le dit pas. Peut-il être plus sincère à dire qu’il y a aussi, malgré le soutien de la Banque Mondiale, d’autres paramètres qui rendent compliquée l’électrification de certaines zones du pays ? Et d’ailleurs à quoi bon augmenter le nombre de consommateurs quand l’effort pour augmenter la production ne suit pas ? L’on sait pourtant que le Niger dispose de techniciens et autres ingénieurs respectables qui peuvent aider, si tant est qu’on peut les écouter, à régler le problème. Notre politique énergétique, c’est à nous en tant que peuple souverain, qu’il revient de la définir et de la décider. Les autres ne peuvent pas la décider pour nous. Peut-on d’ailleurs aujourd’hui dire aux Nigériens quelle politique énergétique le régime poursuit pour croire qu’il en fait un défi pour une économie et un niveau de vie qui en dépendent fortement ? Mais alors que fait-on de nos cadres ? Quelle garantie peut-on avoir chez le ministre qui n’est même pas sûr de rester là, au même poste, quand il affirme aussi vaguement qu’ « Avec les projets que nous avons en cours avec la Nigelec, nous serons capables dans quelques années de réaliser, à court terme, au moins l’électrification de plus de 2.000 localités dans notre pays. Le Président de la République nous a instruit, de mettre en place une sorte de programme spécial, à partir du critère démographique ». Tout est imprécis : « dans quelques années », « à court terme », … Pendant que le président de la République est presque à la moitié de son mandat, quels actes sont posés pour convaincre que le régime est dans une telle démarche ? Rien. Car parler de l’électricité et de son accessibilité, c’est aussi parler de son coût insupportable pour l’économie et les ménages nigériens dont il réduit drastiquement le pouvoir d’achat et ce depuis la loi de finances sous Issoufou que les Nigériens décriaient sans être entendus et ce alors même que des princes mêmes du système en souffraient.

L’âge de cet jeune ministre pouvait lui permettre de comprendre qu’il n’avait pas à être pressé pour miser sur une renouvellement générationnel de la classe politique qui s’amorce et que rien ne peut empêcher, quand beaucoup d’autres, depuis quelques années, ont tiré leur révérence. Il avait à travailler sur ses convictions, à sa stabilité idéologique et comportemental pour que les Nigériens croient en lui et partagent ses idées. Mais là, ne s’est-il pas ruiné une carrière qui s’annonçait brillante et prometteuse ? En politique, il faut savoir jouer avec le temps et les conjonctures. Mais c’est tant pis !

L’autre question d’actualité posée au ministre de l’Action Humanitaire et de la Gestion des Catastrophes, M. Laouan Magagi posé par le député Boulou Mamadou, a porté sur les dispositions envisagées pour mettre à l’abri les populations des communes de Diffa, de Gueskerou, de Bosso, de Chetimari, de Toumour, quand on sait que la saison des pluies s’installe progressivement et que la Komadougou Yobé pourrait, comme l’année passée, déborder. La réponse du ministre est d’autant inquiétante qu’au lieu de compter sur les efforts de l’Etat, une fois encore, comme dans d’autres situations, le Niger ne compte que sur l’Extérieur capricieux dont il n’a pas la maitrise de la libération des fonds qu’il pourrait promettre. D’ailleurs, ces fonds sont directement gérés par ses ONG, l’Etat ne voyant que des voitures qui circulent dans le pays, soulevant de la poussière, n’ayant aucune maitrise de leurs activités. Voici donc la réponse que le ministre donne aux députés : « Dans le mois de mai, nous avons pris des dispositions avec l’ensemble des partenaires pour nous réunir chaque lundi pour examiner la situation de la semaine précédente et de prendre des mesures pour apporter des réponses aux populations. Donc, nous avons un plan triennal de gestion des inondations qui est actuellement en cours. Il s’élève à 44 milliards de francs CFA dans lequel le gouvernement du Niger contribuera à 40 % et les partenaires techniques et financiers à hauteur de 60 %. Présentement, le HCR est en train de construire près de 294 maisons en matériaux locaux plus résistant dans plusieurs villages, pour que les populations puissent, de leur propre chef, construire à partir de ces prototypes qui réduiront les dégâts en cas d’inondation ». Le ministre M. Laouan Magagi, peut-il donner la garantie que les fonds de l’Etat au moins sont disponibles et immédiatement décaissables dès que surviendra une inondation ? Mais que fait-on des autres parties du pays, notamment ces grandes villes comme Maradi et Niamey qui souffrent depuis quelques années, presque à chaque saison des pluies, d’inondations ? Que fait-on des zones riveraines du fleuve ? Un Etat, dit-on, est prévoyant.

Bref, aucune des paroles n’est rassurante. Quand la Sirba débordait, remplissant le fleuve de sable et d’eau rouge, que n’avaient pas promis les socialistes ? Un barrage pour contenir les eaux pour les utiliser à d’autres fins. Mais depuis qu’ils bluffaient les Nigériens de cette promesse, qu’ont-ils fait ? Ils ont oublié. Jusqu’à ce que les mêmes drames reviennent. C’est ça, le socialisme au pays d’Issoufou Mahamadou.

Mairiga