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Adversité politique entre Bazoum et Tchiana : Les confidences d’un ministre à sa copine

Au Niger, être un adversaire politique, c’est se vouer des inimitiés redoutables, sans concession ; c’est se nourrir les uns les autres de haines immenses que rien ne peut, sur un terrain politique, et surtout dans un contexte démocratique, justifier. La conception étriquée que l’on avait eue de la démocratie dont les vents soufflaient jusqu’au Niger pendant la décennie 90 ne pouvait qu’aider à avoir cette vision extravertie de l’adversaire politique. Des hommes politiques dans le pays s’étaient souvent détestés à tel point qu’ils ne pouvaient ni se rencontrer ni se parler. Ils donnaient alors une mauvaise image de la démocratie et de l’adversité politique dans le pays. Après trois décennies de pratique démocratique, l’on ne peut toujours pas se détacher de cette conception de la démocratie, des acteurs se vouant des inimitiés irrationnelles comme celles, plus vieilles, qu’Issoufou avait pour le Général Baré et pour Mahamane Ousmane, et celles, plus récentes, qu’il avait pour Hama Amadou qu’il tenait à enterrer politiquement vivant. Les deux mandats d’Issoufou, de ce point de vue, avaient été les plus horribles de l’Histoire de la jeune démocratie nigérienne.

Faut-il croire, comme le pensent certains observateurs, que pour comprendre l’inimitié entre Issoufou Mahamadou et Hama Amadou, qu’il faut remonter au départ de Lumana de l’alliance au pouvoir. À l’époque, celui qui fut le Secrétaire général du parti, refusa d’obtempérer aux injonctions de son parti pour rallier la majorité. Or, Bazoum Mohamed ne peut leur cacher son irritation face à certains opportunistes.

Depuis quelque temps, l’on est en train de voir pousser les haines politiques qui se déplacent pour se situer entre deux hommes –Mohamed Bazoum et Ladan Tchiana – qui, dans la gestion de leur adversité politique, ne peuvent plus se faire de concession, manquant de fairplay dans leurs gestes et dans leurs paroles. Peut-être même d’élégance. Les critiques acerbes que l’opposant Ladan a contre le régime en place et avec lequel il a divorcé il y a quelques années, justifient sa radicalité à l’endroit du système. Un système qu’il a choisi pourtant de soutenir pour finir par découvrir toute la puanteur et la laideur dont il est fait. En l’absence de tout autre leadership qui s’exprime à l’Opposition quand tous se complaisent dans un mutisme qui surprend, le président d’Amen-Amine a sans doute compris qu’il y a un espace vide qu’il peut occuper pour reconstruire son image de présidentiable et d’alternative crédible sur le champ politique. Mais, les deux n’en font-ils pas trop ? Le Niger si fragile a-t-il besoin de ces rigidités et de ces radicalités ?

Ladan Tchiana, exclu du capital de la Seen par des manoeuvres juridiques

La tension a monté d’un cran depuis que, investissant les réseaux sociaux, l’Opposant ne rate aucune occasion pour tirer à boulets rouges sur le régime, dénonçant sans gant son illégitimité autant que son incompétence à gérer l’État, une radicalité qui a sans doute agacé les tenants du pouvoir et Mohamed Bazoum au premier plan. Est-ce donc, pour répliquer à une telle attitude de la part de Ladan Tchiana que le gouvernement a entrepris une manoeuvre juridique pour sortir Ladan Tchiana du capital de la société ? Il en était pourtant un des plus grands actionnaires privés nigériens.En tout cas, c’est ainsi que l’intéressé lui-même explique la décision du gouvernement qui, à l’entendre, ne vise qu’à lui régler des comptes et peut-être espérer qu’on arrive ainsi à le faire taire pour ne plus avoir à entendre ses discours radicaux et critiques à l’encontre de la Renaissance acte III et de son chef. Mais si l’on entend l’Opposant qui ne se cache plus pour dire tout le mal qu’il pense du régime, à l’Assemblée nationale ou sur les médias, notamment sociaux, il reste que l’on n’entend pas l’homme auquel il s’attaque toujours, Bazoum Mohamed en l’occurrence, que des responsabilités nouvelles obligent à la retenue et à l’élévation. Mais selon des sources crédibles, il ne faut pas croire pour autant qu’il n’est pas un adversaire actif, peut-être même rancunier, apprend-on d’une dame bien informée. C’est à la suite de l’interpellation du Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou,le 15 avril 2023, où le député jouait à rapprocher des événements historiques, notamment dans le souvenir du discours mémorable du Lieutenant-colonel Seini Kountché après son coup d’État, que les Nigériens ont eu écho de la manifestation de cette adversité chez le président nigérien. Bazoum Mohamed, rapporte-t-on, n’aurait pas apprécié la prestation de son chef de gouvernement devant la représentation nationale en guise de réplique au député de l’Opposition. Il avait donc pris la parole, avant l’ouverture du Conseil des ministres, pour fustiger l’intervention terne et sans allure du PM qui ne fut pas, selon lui, à la hauteur de « l’attaque » de Ladan. Après l’interpellation et le voyage en Europe du PM, lors duConseil des ministres qui avait suivi donc, avant même d’entamer l’ordre du jour, on apprend que le Président a tenu d’abord à faire entendre qu’il était très déçu de ce que le Premier ministre a pu dire, très en deçà de ce à quoi il s’attendait pour répliquer au député Ladan Tchiana. Alorsqu’il s’attendait à ce que ce soit avec la verve caustique d’un Massoudou Hassoumi pour« smatcher » Ladan Tchiana – ce sont ses mots – Ouhoumoudou n’a eu que des mots trop doux qui ont trop ménagé le député de l’Opposition. Bazoum n’était donc pas satisfait de la prestation de son Premier ministre, se demandant même, très agacé, qui est Tchiana pour qu’il en vienne à déranger tant. On aura compris que les critiques du député font mal, et plus qu’à un autre, à Mohamed Bazoum lui-même qui en souffre certainement en silence depuis de longs mois qu’il était l’unique adversaire affiché qui le contrarie et le défie.

Ladan Tchiana ne s’attaque jamais à Issoufou, mais à Bazoum

Cette information, le courrier l’a recoupée avec une autre source proche de la Primature qui l’a confirmée. Comment, donc, les deux hommes sont arrivés à se haïr tant ? Qu’estce qui peut sous-tendre ces haines insurmontables, nouvelles et fortes ? Il y a de quoi s’en préoccuper car l’adversité politique, malgré les contradictions, doit rester saine. Aussi, lorsqu’il affirme qu’il aurait aimé que ce soit Hassoumi Massoudou pour « smatcher » Ladan Tchiana, est-ce à croire qu’il le voudrait aussi au poste de Premier ministre ? Faut-il également comprendre qu’il voudrait plutôt d’un bagarreur à cette place importante pour ne plus avoir de paix avec les Nigériens et susciter partout des fronts et des colères ? Faut-il croire que pour autant, le pouvoir n’a-t-il pas suffisamment permis à Bazoum Mohamed de s’assagir, de mieux comprendre les responsabilités nouvelles qu’il a à assumer ?

Comprendre la rivalité…

Selon certains analystes, depuis que Ladan Tchiana a quitté la barque de la Renaissance, jamais, il n’a eu de mots discourtois à l’encontre d’Issoufou Mahamadou et de sa gestion. Aussi, s’était-on étonné de le voir subitement revenir à la charge depuis que Bazoum accédait à la magistrature suprême du pays. Pour certains, les affinités du député de l’opposition avec un certain Alhousseini Ousmane, ancien ambassadeur au Ghana et proche d’Issoufou Mahamadou, qui avait été son parrain académique et son professeur de maths jusqu’au BAC, expliquent qu’il soit plus proche d’un clan que d’un autre, et notamment d’Issoufou. Pour ces sources, LadanTchian a n’est pas par hasard le plus grand détracteur de Bazoum Mohamed avec lequel bien de faits les divisent. En tout cas, nombre de personnes pensent qu’à cet homme auquel il ne peut rien refuser, le président d’Amen-Amine se rangerait du côté d’Issoufou dans ce qui peut diviser le Pnds Tarayya en deux clans rivaux. Son opposition farouche à Bazoum Mohamed est-elle un signe ?

Mairiga