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Remplacement de Brigi Rafini à la CEN-SAD : Faut-il y voir une sanction ?

C’est par la presse que l’on apprenait, pour une première fois sur décision du président de la République, le remplacement au Secrétariat exécutif de la CEN-SAD (Communauté des Etats Sahélo-sahariens) de celui qui a été, dix ans durant, le Premier ministre d’Issoufou Mahamadou. On apprend qu’il est remplacé sans que rien, officiellement, ne puisse justifier cette décision. Du moins dans le pays. L’on ne peut donc qu’être surpris d’apprendre que l’ancien Premier ministre d’Issoufou, casé lui aussi à un poste juteux, perde sa place au bénéfice d’un autre et ce sans que rien en amont ne prépare les Nigériens à un tel scénario. Sur l’échiquier politique national, il devrait en principe, être «invisible». Mais, on l’a souvent vu. Issoufou Mahamadou lui aurait notamment demandé de voler au secours du « petit Alio» qu’on chassait du Conseil des jeunes du Niger. Il y a quelques semaines, le président du Conseil national de la jeunesse, à la suite de plusieurs années de résistance et de mandats dépassés, a fini, grâce à l’entregent du ministre de tutelle, par être détrôné. Le conseil a pu ainsi renouer avec la régularité et la normalité que l’on veut imposer à des transitions militaires mais qu’on ne peut faire respecter chez soi. Pendant des années, l’ancien président Issoufou fit semblant de ne rien entendre de ce problème, laissant le « jeune-vieux » président à la tête de la structure des jeunes alors qu’il était en plus hors mandat pendant plusieurs années. Son Tazartché ne dérangeait pas.

Pour courir au secours du protégé d’Issoufou qui vient ainsi de perdre une place aussi stratégique et de confort, on a vu le Secrétaire exécutif de la CEN-SAD que fut Brigi Rafini se rendre au siège des scouts du Niger où l’ancien président de la structure des jeunes met ses forces pour continuer à mener un certain activisme. Il semble vouloir montrer à ceux qui ont joué à le faire partir du conseil des jeunes qu’il a plusieurs cordes à son arc et qu’il sait se débrouiller même quand il lui arrive de perdre un appui du pouvoir depuis qu’il a changé de main dans le même parti. On a vu ainsi l’ancien Premier ministre, au nom de la CEN-SAD, prendre des engagements pour l’ancien président du conseil de la jeunesse et faire pour lui des promesses tout en saluant la qualité du travail qu’il mène, là, au niveau des scouts du Niger. Brigi avouait ainsi indirectement qu’on pourrait avoir eu tort de l’avoir « chassé » du Conseil. Selon certains observateurs, c’est cette intrusion imprudente qui expliquerait les déboires de l’ancien Premier ministre d’Issoufou.

En se servant de sa position pour prendre un parti pris dans son pays, Brigi Rafini pourrait avoir abusé de ses pouvoirs dans ce qui serait un conflit entre des milieux du pouvoir. Les structures, surtout régionales et continentales, n’existent pas pour des individus. Certains diront que le mouvement scout est très ancien au Niger et jamais, une autorité à un tel niveau, ne s’y était intéressée pour agir en faveur d’un individu, jouant sur des proximités et des affinités politiciennes. Parmi la multitude de raisons invoquées pour expliquer le renvoi de Brigi Rafini, celle-ci parait plus pertinente. Il y a donc quelques spéculations autour du remplacement au Secrétariat exécutif de la CEN-SAD de Brigi Rafini, surtout lorsqu’on considère que l’homme visé par la mesure est un proche de l’ancien président. Le renvoi de l’ancien Premier ministre peut-il cacher le malaise entre le Président Bazoum et son prédécesseur dont certains milieux parlent. Ici et là, dans les salons feutrés mais aussi dans les fadas, on évoque régulièrement des mésententes, en tout cas des divergences désormais notoires entre socialistes que le pouvoir, naturellement, divise. C’est à juste titre que certains observateurs se demandent si son remplacement n’est pas une sanction.

Mais la raison semble être ailleurs

En vérité, même si ces extrapolations peuvent être pertinentes, il semble que c’est le Tchad qui a, pour des raisons qui lui sont propres, demandé et obtenu le départ de Brigi Rafini de la CEN-SAD ; ce qui pourrait avoir été une aubaine pour Bazoum Mohamed. Mais alors, pourquoi l’ancien Premier ministre du Niger est devenu persona non grata pour le Tchad au point que le pays de Mahamat Idriss Déby demande sa tête? Le Président Bazoum doit-il finalement être obligé de lui trouver un autre point de chute pour le caser afin de contenter son prédécesseur ? Ou bien Brigi Rafini va-t-il finalement décider décider de prendre sa retraite politique comme il l’aurait souhaité alors qu’il était Premier ministre ?

Pendant qu’il occupait le poste de Premier ministre auprès d’Issoufou, Brigi aurait exprimé, à maintes reprises, son désir d’être déchargé afin de jouir de sa retraite. Mais, à chaque fois, Issoufou a trouvé des arguments convaincants pour le maintenir à la tête du gouvernement au point que celui-ci a fini par perdre des plumes. Le peu de crédit qu’il avait auprès de bien de Nigériens qui avaient connu l’administrateur chevronné n’a pas survécu aux affaires et scandales qui ont jalonné les 10 ans d’Issoufou. Car Brigi Rafini se fait le complice d’une gouvernance inique qui a autant divisé les Nigériens que détruit l’économie nationale. Certains pensent que s’il a tenu, à un moment, à quitter la primature, c’est moins pour une quelconque lassitude qu’à cause de la gouvernance scabreuse qu’Issoufou a imposée. Les affaires, les scandales financiers, les injustices, seraient aux antipodes de ses principes de vie et de politique. L’heure est venue pour l’ancien militant du parti de Djermakoye de prendre la plus grande décision de sa vie.

Alpha