Hommage à Sanoussi Tambari Jackou

Feu Sanoussi Tambari JackouSanoussi Tambari Jackou, figure emblématique de la politique nigérienne, nous a quittés le lundi 18 juillet 2022 à Niamey à l'âge de 82 ans. Sa disparition laisse un vide immense au sein de la nation, car cet homme d'exception n'a laissé aucun Nigérien indifférent. Ceux qui l'ont connu se souviennent de ses nombreux combats pour la démocratie, la justice et la bonne gouvernance au Niger, qu'il a menés avec une passion et une détermination inébranlables.

Natif de Kornaka, Sanoussi Tambari Jackou a marqué l'histoire politique du Niger par son intelligence et sa capacité à transformer ses adversaires en alliés. Cette habileté, souvent perçue comme de la versatilité, était en réalité le reflet de son engagement à œuvrer pour le bien commun et la stabilité politique du pays. Il a consacré sa vie à l'instauration, la consolidation et la défense de la démocratie, de 1990 jusqu'à son dernier souffle, souvent au prix de nombreuses privations.

Sanoussi Jackou était reconnu pour son éloquence et sa capacité à animer les débats politiques avec une verve inégalée. Ses mots percutants et ses traits d'esprit redoutables faisaient de lui un orateur respecté et craint. Il a enrichi le vocabulaire politique nigérien de termes comme « Wassosso », « Tchékanda » et « PAAC » (parents, amis, alliés et connaissances), dénonçant sans relâche la mauvaise gestion, le népotisme et l'ethno-régionalisme.

Grand tribun et débatteur redoutable, Jackou n'avait pas sa langue dans sa poche. Ses anecdotes, souvent teintées d'humour et de malice, restaient gravées dans les mémoires. Il n'hésitait pas à interpeller ses adversaires politiques ou à critiquer publiquement des pratiques qu'il jugeait néfastes, même lorsque cela impliquait des figures de son propre camp. Sa liberté de parole et son courage faisaient de lui une personnalité à part dans le paysage politique nigérien.

Le parcours politique de Sanoussi Jackou a été jalonné de moments marquants, depuis ses débuts dans les années 1970 avec la tristement célèbre « Affaire Mukozu » jusqu'à son rôle central lors de la Conférence Nationale Souveraine de 1991-1992. Il a été un membre fondateur de la Convention Démocratique et Sociale (CDS Rahama) et a servi comme premier vice-président du Haut Conseil de la République. Élu député national, il a siégé au bureau de l'Assemblée nationale où il a mené des combats acharnés pour la bonne gouvernance et la justice sociale.

Sa carrière politique fut également marquée par son passage au gouvernement en tant que ministre d'État en charge de l'Enseignement Supérieur sous le régime du Colonel Ibrahim Baré Mainassara. Toujours prêt à surprendre, il avait une fois diffusé une conversation téléphonique avec le Président Baré pour répondre aux revendications des étudiants, démontrant ainsi son engagement envers la transparence et la satisfaction des besoins du peuple.

Fondateur du Parti Nigérien pour l’Autogestion (PNA Al Oumma), Jackou a navigué entre diverses alliances politiques, restant fidèle à ses convictions jusqu'à la fin. Après avoir perdu un troisième mandat de député, il a été nommé Ministre-Conseiller par le Président Issoufou Mahamadou, puis reconduit par le Président Bazoum comme Conseiller transversal, un poste qu'il a occupé jusqu'à sa mort. Même dans ces fonctions, il n'a cessé de défendre les plus vulnérables et de s'exprimer librement contre les abus de pouvoir.

Sanoussi Tambari Jackou n'était pas seulement un homme politique ; il était également économiste, enseignant, historien, et fondateur de l'hebdomadaire « La Roue de l’Histoire ». Sa vie intellectuelle riche et son engagement indéfectible pour la démocratie et les droits humains ont laissé une empreinte indélébile dans l'histoire du Niger.

Pour honorer sa mémoire et perpétuer son héritage, sa famille et ses proches ont lancé la Fondation Sanoussi Tambari Jackou. Cette fondation, présidée par Dr Djermakoye Hadiza Jackou, vise à promouvoir la démocratie, les droits humains fondamentaux, et la bonne gouvernance. Apolitique et inclusive, elle s'engage à fédérer toutes les couches sociales autour des idéaux que Sanoussi Jackou défendait de son vivant.

Sanoussi Tambari Jackou repose désormais en paix, mais son esprit et ses idées continuent d'inspirer. Sa lutte pour la justice sociale, la liberté et la démocratie demeure un exemple pour tous. Puisse sa mémoire et ses actions guider les générations futures dans la construction d'un Niger plus juste et démocratique.

Repose en paix!

Boubacar Guédé (Nigerdiaspora)