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Dégradation des voies dans la ville de Niamey : La ‘‘traversée des chaussées’’, une pratique néfaste pour le patrimoine routier

Dans la capitale Niamey et au-delà, dans les grandes agglomérations, les routes bitumées en bon état se comptent sur le bout des doigts. Malgré l’insuffisance de ces infrastructures indispensables aux activités économiques et sociales, le peu de routes encore en état, sont soumises à une mauvaise pratique d’incivisme de la part de certains citoyens. En effet, à Niamey, c’est dans l’obscurité et le silence de la nuit, tels des voleurs, que certains habitants à coup de pioche, vandalisent les routes pour faire passer leur tuyauterie d’eau ou des fils de courant électrique et cela, au mépris du bien commun construit à coup de plusieurs milliards de FCFA.

Ici, c’est le village de Saga, dans le quatrième arrondissement sur la route menant à Malam Koira. Cette route construite en 2019 reliant Saga au centre-ville a permis aux usagers de souffler et de voir le temps du trajet et le prix du taxi réduit considérablement. Actuellement, ce bien public fait l’objet de dégradations sous l’effet de l’action de l’homme et de la nature. « Il y a plus d’une semaine, aux environs de minuit, une voiture avec à son bord plusieurs hommes ont cassé la chaussée à coup de pioche.  Au matin, nous étions stupéfaits de constater que le goudron a été détruit », déplore M. Ismaël. Même constat au quartier Gamkalley, la route est dans un état délabré à des endroits avec des fuites d’eau qui dégradent la chaussée, rendant impraticable la moitié de la voie.

Pour cet habitant du quartier qui s’est confié à nous, « si la voie est dans cet état de dégradation avancée, c’est à cause des agents de l’ex SEEN et de leur tuyauterie qui ne cessent de fuiter ». Ainsi, depuis plus de trois semaines, aucune action de colmatage n’a été entreprise. D’après le maire du quatrième arrondissement, Mme Tchamago Fouta Mariama, après constat de cette action sur le terrain, l’intéressé détenait en sa possession une autorisation de la Ville de Niamey, car dit-elle, le droit d’accorder des autorisations pour de telles actions a été retiré aux arrondissements communaux. « La ville de Niamey est la seule autorité habilitée actuellement à autoriser ou à refuser des demandes de traversée de chaussée », indique-t-elle.

 

En effet, de telles situations sont perceptible un peu partout dans la capitale Niamey, comme à Yantala, Recasement première latérite, sur le pavé qui passe à la devanture de la pharmacie recasement. Sur ce pavé, à plusieurs endroits, les blocs de pavé sont sortis de terre, rendant la circulation pénible, notamment pour les engins à deux roues qui sont contraints d’emprunter les passages pour piétons. Selon les habitants du quartier, cette dégradation est le résultat des « œuvres » de certains habitants pour faire traverser des tuyaux et des fils.

Selon le directeur de la voirie et divers réseaux de la ville de Niamey, M. Boubacar Harouna, généralement ce genre de pratiques sont exécutés avec l’autorisation de l’autorité compétente. « Il y a une demande qui est adressée soit au niveau de l’arrondissement communal, soit au niveau de la ville. La direction concernée statue sur la nécessité d’autoriser, donc ça ne se fait pas anarchiquement », explique-t-il.

En effet, dit-il, à partir de 2018, tout a été réglementé par la loi 2018-032 du 24 mai 2018 déterminant le patrimoine routier national et fixant les règles de sa protection, suivie du décret 2023-316 du 6 avril 2023 portant modalité d’application de ladite loi. « Maintenant, ces genres d’interventions se font sur des axes un peu vieillissants, pas sur des axes officiels ou des avenues et c’est uniquement pour l’adduction d’eau potable. Mais nous avons adopté un système de fonçage au lieu de couper la chaussée », souligne-t-il. Ainsi, cette loi prévoit des mécanismes de répression face aux récalcitrants qui détruisent les voies publiques sans autorisation, toute les fois qu’ils sont pris la main dans le sac ou à l’issue d’une enquête. Ces sanctions, dit-il, peuvent aller de l’amende à une peine d’emprisonnement et il va plus loin en précisant que les véhicules qui laissent couler de l’huile de moteur sur la voie publique sont passibles d’être amendées tout en étant contraintes de nettoyer la voie.

Par ailleurs, d’après les explications du directeur de la voirie, après la pose des tuyaux, la partie détruite de la voie est laissée pour se stabiliser. « Il faut qu’on laisse les véhicules circuler pendant au moins une semaine avant de reprendre la couche », précise-t-il. La remise en état de l’ouvrage endommagé par la SEEN incombe à elle puisque les coûts sont inclus dans la facture établie par la mairie et c’est pareil pour les particuliers.

Toutefois, malgré le colmatage que subissent ces ouvrages abimés, ils ne retrouvent jamais leur état initial. Pire, en période d’hivernage ces endroits servent de nid aux eaux pluviales. « Peut-être, ils ne sont pas partis en profondeur où il y a une fuite dans les conduites de refoulement. On a tellement de problèmes avec la SEEN, il faut qu’on leur écrive pour les interpeller qu’au niveau de telle avenue, tel boulevard et telle rue, on a une fuite d’eau pour éviter d’éventuels dégâts. Le premier ennemi de la route aujourd’hui, on dit que c’est l’eau », conclu-t-il.

Hamissou Yahaya (ONEP)