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Mendicité : notre label exporté qui nous humilie à l’extérieur

Non a la mendiciteDepuis quelques années, alors que le régime d’alors crie partout qu’il aurait réussi à transformer le Niger, à créer une classe moyenne et à produire de nombreux milliardaires, les masses laborieuses, elles, se sont davantage paupérisées, précarisées même dans bien de cas. De la même façon, que la migration est la conséquence des échecs des politiques publiques, la mendicité est la preuve que la démocratie, dans notre pays, n’a fait que renforcer et creuser les inégalités pour laisser émerger les misères les plus criardes et ce depuis que, bizarrement, le pays tombait dans les mains d’un socialisme qui a curieusement produit plus de misère et compromis les chances d’égalité dans le pays. C’est d’ailleurs pendant qu’Issoufou Mahamadou était aux commandes du pays, et qu’il prétend avoir fait du Niger un Doubaï tropical, que l’on a vu les Nigériens, et surtout de nombreuses Nigériennes, accompagnées d’enfants, quitter le pays pour les pays du Maghreb et de la côté, pour aller, non pour travailler et gagner dignement leur vie, mais pour aller mendier, exportant ainsi à l’international, non notre or, ou notre clichi mais notre misère ainsi exposée chez les voisins, et souvent plus loin jusqu’à Dakar. Cette réalité humiliante contrastait avec le discours ambiant de l’époque qui s’évertue à présenter le Niger comme la nouvelle nation émergente où, gonflées de vanité, les autorités de l’époque, osent même parler de croissance à deux chiffres qui était tout de même invisible pour les Nigériens. Les partenaires, y compris la Banque Mondiale, trompés par des statistiques mensongers qui leur sont servies, étayaient de tels optimismes alors que dans le pays, tout va mal, les Nigériens n’ayant jamais été aussi pauvres. Il suffisait de voir comment nos campagnes sont devenues misérables et comment les villes se sont ruralisées, avec des niveaux de vie qui ont drastiquement baissé. Quand on regarde la qualité de l’alimentation des Nigériens et notamment, des citadins, contentés de Dambu et de galettes pimentées, l’on ne peut que plaindre le nouveau Niger qu’on nous décrivait avec des allures édéniques.

Le phénomène de la mendicité s’était développé sous la Renaissance, ou si l’on veut, sous les Renaissances mortifères d’Issoufou Mahamadou et de Bazoum Mohamed qui, même avec le pétrole qu’ils avaient la chance de gérer les premiers dans le pays, ne purent rien changer dans nos vies. Alors que le Benin, il y a quelques années pour bien célébrer les fêtes de fin d’année, en expulsait de ses rues polluées de mendiants nigériens, d’autres, après des sévices corporels et morales dans les pays du Nord, les lynchaient et les abandonnaient sur les frontières, les laissant là à la merci de tous les risques. Les télévisions de la sous-région n’arrêtaient pas d’en parler, exposant la meute de mendiants qui envahissaient les rues de leurs villes désormais assiégées par les nôtres devenus la part humiliante de notre existence. La campagne de dénigrement orchestrée par les médias de la sous-région, avait heurté la fierté du régime qui arrivait et tout de suite, Bazoum Mohamed, avait ordonné, au moyen d’un avion affrété, le rapatriement des mendiants nigériens de plusieurs contrées infestées de gueux. Après le phénomène de Kantché, vécu il y a quelques années, sous le même système, l’on se demandait alors comment mettre fin à cette situation déshonorante qui ne fait que prendre de l’ampleur.

Arrivés au Niger, on dirigea les différents rapatriés vers leurs régions et leurs villages. Mais la mesure était insuffisante pour, de manière structurante, mettre fin au phénomène et pour que les uns et les autres comprennent qu’il y a une autre manière de vivre dignement et de se battre courageusement dans la vie. De tout temps : les Nigériens qui partaient à l’extérieur du pays, partaient pour se battre, pour mener quelques activités et gagner leur vie. Ils avaient alors gagné en confiance et avaient réussi économiquement avec aujourd’hui de nombreux compatriotes qui se sont fait une belle place dans l’économie des pays où ils exercent.

C’est au moment où le Niger mène une marche altière pour reconquérir sa souveraineté confisquée, marchant fièrement, que l’on apprend par une télévision burkinabé que des mendiants nigériens envahissaient la ville de Bobodioulasso, dont les rues sont aujourd’hui bondées « d’errants », quémandant pour la subsistance, mais nous humiliant là, sans qu’ils ne s’en rendent compte, mais comptant heureux quelques francs déposés dans leurs sébiles. Les autorités de la ville, gênées dans leur vie et dans leur ville, ont proféré des menaces d’expulsion et on peut imaginer quelle gêne elles peuvent éprouver à décider de telles mesures en un tel moment crucial dans la vie des deux pays.

Le Niger ne mérite pas ça. Les Nigériens d’une époque ne savent pas se comporter d’une telle manière. Ils étaient si fiers de lui qu’ils ne peuvent se rabaisser à quémander à tout vent, à visage découvert. Mais depuis quelques années, par les échecs sans doute des politiques publiques, une certaine misère a corrompu les consciences et nous sommes devenus si vils à vouloir tout par la facilité. Nous perdions alors le sens de la responsabilité, notamment parentale, le sens de la dignité humaine, de l’effort, de la mystique du travail qui avaient pourtant défini l’homme nigérien si exigeant envers lui-même pour aimer et vouloir le travail bien fait. Qu’estce qui nous est donc arrivé pour tomber si bas ? Quand les intellectuels ne viennent au pouvoir que pour voler, comment peuton s’occuper des préoccupations des populations, désormais abandonnées à elles-mêmes ? Les lâchetés de nos politiques ont détruit nos peuples réduits au rang de parias.

Plus jamais ça !

Notre image et notre réputation dans le monde sont à protéger. Nous devrons être fiers de l’identité que nous donnons de nousmêmes au monde qui nous regarde. Comment ne pas se souvenir de cette époque où, sous Kountché, le Nigérien était partout respecté car reconnu comme quelqu’un de sérieux, de rigoureux, d’exigeant envers luimême, d’intègre ? Combien étaient-ils les Nigériens qui avaient alors brillé à l’International dans de grandes écoles où ils sortaient majors de promotions et dans de grandes institutions où ils laissaient de beaux souvenirs de travailleurs intègres et compétents ? Il revient donc aux pouvoirs publics après avoir commandé une étude sérieuse, de mettre en place un comité chargé de réfléchir sur cette question afin de penser les voies et moyens pouvant permettre d’endiguer le fléau. Mais sans doute , que la première solution serait de mettre en oeuvre un programme sérieux de lutte contre la pauvreté qui passe aussi par la conception de projets qui responsabilisent les populations, les fixent sur leurs terroirs et leur donnent les moyens de vivre plus dignement.

Oui, nous devrons nous défaire de ce visage hideux qui fait de nous la risée du monde. Faut-il donc aller jusqu’à criminaliser la mendicité, surtout quand elle vient de personnes qui ne peuvent se prévaloir d’aucun handicap qui légitimerait leur « profession ». Non, refusons que la mendicité serve de métier à des partisans du moindre effort pour que chacun de nous apprenne à se battre dans la vie, dans sa vie car la vie est un combat, et c’est lâche de ne pas combattre.

Réapprenons à être Nigériens. De vrais. C’est-à-dire des hommes et des femmes fiers.

Par Korombeysé  (Le Canard en furie)