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Les ateliers de couture sous pression, les femmes stressées

Le mois de Ramadan a amorcé sa dernière ligne droite. Dès le début de ce mois, les fidèles musulmans commencent les préparatifs de la fête qui est le couronnement d’un mois de dévotion. L’un des éléments clés de ces préparatifs est la confection des habits destinés à être portés le jour de la fête. Beaucoup de nigériens se ruent vers les couturiers pour s’offrir  ces tenues. A deux semaines de la fête, les couturiers sont déjà débordés par la  clientèle. Partout dans les ateliers de couture de la capitale, l’ambiance et la pression de travail sont presque les mêmes. Certains tailleurs et brodeurs ne s’arrêtent que pour prier ou rompre le jeûne. Les sonorités des machines retentissent dans tous les coins. A côté,  les femmes vivent un véritable calvaire avec des rendez-vous non respectés et des va-et-vient incessants chez les couturiers.

C’est le bruit assourdissant des machines à coudre qui nous accueille dans l’atelier de couture d’Abdoul-Rachid Issa. Couturier depuis 2008, le jeune homme affirme  qu’il a arrêté de prendre les tissus et pagnes des clients depuis le 15ème  jour du jeûne. «Certains nous proposent même le double du prix, mais on refuse de prendre. Ils nous supplient mais ils sont les premiers à nous créer des problèmes si nous n’honorons pas nos engagements», a-t-il dit. Les prix de la couture chez Abdoul-Rachid varient de 8.000 à plus pour les pagnes, de 10.000 à plus pour les lèches et Bazin, et les  broderies de 20.000 à plus. Sa principale clientèle est constituée de femmes et d’enfants. Il peut coudre 3 complets par jour. La principale difficulté pour Abdoul- Rachid Issa, ce sont les coupures d’électricité qui continuent depuis le début de ce mois. «Entre les rendez-vous manqués, l’impossibilité de travailler, nous souffrons énormément. Seuls ceux qui ont des moyens arrivent à s’en sortir en travaillant avec des groupes électrogènes», explique Abdoul-Rachid. Avant d’ajouter que «nous n’avons toujours pas eu de problème avec les clientes, néanmoins avec les coupures si nous n’arrivons pas à honorer nos rendez-vous, elles ne comprendront pas surtout les enfants. Pour éviter cela, nous cousons d’abord les habits des enfants avant de commencer pour les adultes».

Pour certaines clientes, l’absence d’électricité n’explique pas le retard et le non-respect des rendez-vous chez les tailleurs. Parmi les tailleurs, certains sont accusés de négligence et surtout de cupidité par rapport à leur attitude de vouloir collectionner plus de clients en période de fête. Mme Ramatou Aboubacar,  dit avoir prévenu son tailleur de prendre ses dispositions pour qu’elle puisse avoir ses habits à temps pour la fête. Ayant été victime de faux rendez-vous l’année dernière, elle ajoute que ce sont les tailleurs qui sont à la base de ses chagrins à chaque fête. «Qu’ils apprennent à dire non quand ils sont dans l’impossibilité de coudre nos habits dans le temps», dit-elle.

Installés dans leur atelier situé au quartier recasement, M. Omar N’Diaye et Abdoulaye Sall s’activent comme ils peuvent pour terminer leurs commandes à temps. «Nous avons remarqué que le nombre de commandes est en baisse par rapport aux années précédentes. Donc, en ce moment, on est sans pression. N’empêche, nous faisons ce qui est de notre possible pour livrer nos commandes à temps. Les commandes que j’ai eues cette année sont pour la plupart destinées aux enfants et aux femmes. Pour l’instant, tout se passe bien», confie M. Omar N’Diaye. Il affirme que l’affluence de cette année est différente des années précédentes car les temps sont durs. «Si la situation financière des clients était bonne, on aurait déjà commencé à coudre presque  24h/24. Mais tel n’est pas le cas cette année», explique-t-il.

A côté de N’Diaye, Abdoulaye Sall, son collaborateur, renchérit : «Les commandes se font à pas d’escargot». Il a en outre noté que certains clients attendent la dernière minute pour apporter leur couture. Selon lui cette situation de dernière minute est due au fait que les chefs de familles n’ont pas d’argent à temps. «Tout le monde sait que le mois de ramadan est un mois de dépenses qui va ensuite déboucher sur  un jour de fortes dépenses. Mais nous savons aussi que la meilleure solution pour se mettre à l’abri de surprise désagréable des tailleurs, c’est de leur apporter à temps ses habits à coudre», a-t-il prévenu.

M. Abdoulaye Sall a, par ailleurs, déploré le fait que certains tailleurs s’engagent au-delà de leur capacité. «Pour nous, ça n’a aucun sens. C’est pourquoi nous faisons doucement pour éviter de nous mettre dans ce genre de situation. La clientèle est variée, enfants comme adultes. Je fais de mon mieux pour terminer les commandes des enfants d’abord, et  pour ensuite me concentrer sur le reste», a-t-il déclaré.

Ces braves couturiers se donnent à fond pour satisfaire leurs clientèles même s’ils sont parfois confrontés aux problèmes liés aux mauvais comportements et aux choix de certains clients. Même si les commandes varient selon les bourses, les clients veulent rester sereins et éviter le stress  des salons de couture, optent pour le prêt-à-porter.

 Aminatou Seydou Harouna(onep)

Source : http://lesahel.org/