Un rappel de quelques affaires scabreuses de la 7ème République
Des scandales ! Encore des scandales ! Et toujours des scandales ! Et à présent, les morts. L’enfer, diton, est pavé de bonnes intentions. Parvenu au pouvoir à l’issue d’une élection consécutive à la Transition militaire dirigée par Salou Djibo, Mahamadou Issoufou n’a pas fait longtemps illusion. Très vite, les affaires ont commencé et le premier couac intervient avec Kalla Ankouraou, le parrain idéologique, alors ministre de l’Equipement, et Ouhoumoudou Mahamadou, le plus-que-frère, régent des finances publiques. Ils seront pris en flagrant délit d’affaires scabreuses liées à un marché public. Mis au pied du mur, Mahamadou Issoufou traînera néanmoins les pieds avant de se débarrasser, la mort dans l’âme, des deux ministres. Entre le constat de la violation de la Constitution par ces deux ministres et le remaniement qui a consacré leur départ du gouvernement, il s’est passé des mois. Et puis, c’est tout. Les indélicats ministres ne seront jamais mis en accusation, à plus forte raison poursuivis pour violation de la loi fondamentale.
Au contraire, Mahamadou Issoufou, qui n’a jamais digéré leur éviction du gouvernement, choisit de les mettre en hibernation quelques mois avant de les nommer, le premier en qualité de ministre-conseiller à la présidence, le second comme directeur général de la Banque internationale de l’Afrique (Bia). Un premier pied de nez au peuple nigérien auquel Mahamadou Issoufou a pourtant juré, la main droite sur le Saint Coran, de « respecter et de faire respecter la Constitution ». Puis, les affaires vont s’accumuler, dépouillant graduellement le Niger de ses ressources, de ses deniers et de ses biens. Sans que cela éveille toutefois les soupçons.
Wallgates ou le tonneau des Danaïdes du Trésor public
Jamais une société au Niger n’a fait autant l’objet de si grandes malversations. Après les deux ponctions de 10 milliards, soi disant empruntés pour équiper et armer le contingent nigérien au Mali, l’ARTP a fait l’objet de scandales continus. La société Wallgates a été en vérité, pendant des années, la formule magique par laquelle des hommes investis d’une mission d’Etat ont utilisé leur station du moment pour soutirer des milliards à l’Etat. Le Courrier s’interrogeait sur ce qui a bien pu se passer pour que Daniel Mukuri, cet homme recherché par Interpole Bruxelles pour des faits d’escroquerie sur des ressortissants belges, qui pompait tranquillement les milliards de l’Etat avec la complicité bien connue de personnalités de l’Etat, puisse connaître des déboires judiciaires ? Eh bien, en mars 2016, dans l’entredeux tours de la présidentielle, un chèque d’un milliard de francs CFA a été libellé au nom de Wallgates. Un milliard de francs CFA à toucher à la Bsic, déjà citée dans d’autres dossiers scabreux, comme si elle est devenue la banque de tous les coups fourrés du régime. C’était le cas dans l’affaire des fonds destinés à l’armement des Forces armées nigérianes et dont une bonne partie, détournée grâce à Sambo Dasuki, s’était retrouvée dans les comptes bancaires de ses complices nigériens à la Bsic et à la Sonibank. C’était aussi le cas l’affaire des 5000 tonnes de riz de l’aide alimentaire pakistanaise détournées et vendues à Cotonou. Ce milliard de francs CFA a été versé à Wallgates le 1er mars 2016. Et pourtant, il ne transparaît nulle part dans la conciliation judiciaire faite, le 8 août 2016, devant Maï Moussa El Hadj Bachir, Président du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey, assisté de maître Idrissa Rabo, Greffier en Chef près ledit Tribunal. Il n’y figure pas parce que ce milliard semble avoir été payé frauduleusement, à partir d’un compte public de l’État et non de l’ARTP. L’examen du chèque émis porte nettement la mention « Payeur général du Trésor », atteste que ce milliard a été payé à Wallgates par le Trésor public. Pourquoi et sur instruction de qui a-t-il versé à Wallgates un milliard du contribuable nigérien ?
Le 27 mars 2017, lorsque Hassoumi Massoudou a instruit le directeur général de l’Artp de mettre un terme au contrat, il a indiqué que le rapport du Cabinet Clarity a relevé (1) l’usage du faux et des données erronées ayant servi de base à la signature du contrat ; (2) le non-respect de l’ensemble des dispositions du cahier des charges ; (3) un impact non avéré du système sur les rendements des recettes. Ainsi exposés, les arguments avancés par Hassoumi Massoudou ne rendent pas compte de la gravité de la situation. En réalité, l’évocation du faux n’est pas uniquement liée aux arguments avancés par Hassoumi. Et le rapport d’audit du cabinet Clarity fait bien état d’autres monstruosités liées à des menaces judiciaires de « MACH », une société française experte dans le domaine de contrôle des flux de communication et dont le nom a été utilisé par Daniel Mukuri et ses amis nigériens pour se faire des milliards sur le dos de l’État nigérien. Assoumane Ada, tout comme l’escroc recherché par Interpole Belgique, était l’agneau du sacrifice pour couvrir les arrières de ceux qui ont tiré les ficelles de cette scabreuse affaire ?
Où sont passés les 200 milliards de la Sopamin ?
Pour beaucoup d’observateurs, il n’y a plus de doute : les 200 milliards existent bel et bien et tout porte à croire que c’est l’argent issu de l’uranium du Niger. Dans un article publié en ligne le 7 avril 2017, Christophe Chaâtelot du journal français « Le Monde » soulignait que le groupe français, Areva, ne conteste la réalité de cette opération, y compris en ce qui concerne le transfert des 319 millions de dollars du compte de la Sopamin logé à BNP Paribas, à Paris, au compte d’Optima, à Dubaï. Christophe Neugnot, porte-parole d’Areva, confie ainsi que « Dans ce genre de projet, l’opérateur veut de la visibilité et nous demande de sécuriser son approvisionnement futur en uranium ». Et voici la meilleure : « Quand nous cherchons de l’uranium, nous nous tournons vers ceux qui peuvent nous en fournir ». Et au Niger où les Français extraient de l’uranium depuis les années 60, Areva avance en terrain connu. La Sopamin y est actionnaire des deux filiales d’Areva (Somaïr et Cominak). […] Dans cette affaire, Areva aurait donc « demandé » au Niger de piocher dans le stock d’uranium, conformément au pacte d’actionnaires qui les lie ». Et tandis que Hassoumi Massoudou parle d’une commission de 800 millions dont ils auraient profité, toutes les sources parlent plutôt de 800 000 dollars, soit quelques 400 millions de francs CFA. Un indice grave de fausseté et de mensonges.
5000 tonnes de riz détournées alors que des millions de Nigériens étaient dans l’attente d’une assistance alimentaire et nutritionnelle
Alors que des millions de Nigériens étaient, en mars 2016, dans l’attente d’une assistance alimentaire et nutritionnelle, des individus, abusant des fonctions qu’ils assumaient, ont détourné et vendu à leurs profits personnels 5000 tonnes de riz d’une aide alimentaire de 15 000 tonnes de riz offertes par le Pakistan. Depuis la révélation de ce scandale, c’est l’omerta. Personne ne dit mot alors que les principaux responsables de cette affaire sont connus. Au Courrier, le silence des autorités n’intrigue point. Car, il sait qui a vendu et sur instruction de qui ces 5000 tonnes ont été bazardées à Cotonou. Même le directeur général de l’OPVN de l’époque, qui devait paraître inquiet puisque les 15 000 tonnes sont arrivées au port de Cotonou en son nom, affiche jusqu’à ce jour une sérénité détonante. Serait-ce l’assurance politique de ne pas être inquiété tant que Mahamadou Issoufou serait au pouvoir ? On pourrait le croire, même si des sources dignes de foi avancent d’autres informations qui n’ont rien à voir avec la carte politique. Ce qui est certain, il avait été interpellé par la Police judiciaire récemment avant d’être remis en liberté.
Le contentieux Niger-Africard
Le contentieux Etat du Niger- Africard est un scandale des plus scandaleux et personne ne peut le contester. Alors que les fautes sont incontestables, prouvées par des documents irréfutables, les responsables de ce grave péril qui pesait sur les biens immobiliers du Niger, en France et aux Etats Unis, continuent toujours de bénéficier d’une totale impunité. L’arrêt de la Cour d’État, la plus haute juridiction du Niger, est-il une invention ? Brigi Rafini avait-il, oui ou non, refusé de se soumettre à cet arrêt ? L’accord amiable partiel du 30 juillet 2016 estil vrai ou faux ? Est-il vrai ou faux que ceux qui l’avaient signé avaient accepté que le Niger renonce à toute immunité devant Africard ? Bref, le scandale Africard était une catastrophe. Une grave affaire que Tamboura Issoufou n’avait hésité pas à assimiler à une cession d’une part du territoire national. Ces immeubles qui avaient été saisis font partie intégrante, depuis de longues décennies, du patrimoine national. Les perdre, c’est perdre une partie du territoire national. Et le Niger avait frôlé le risque de les perdre par la faute de certains de ses fils.
Laboukoye