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Tribune/France : L’impossible reconquête du Niger…. Chroniques d’une bataille perdue à jamais !



La page historique de l’année 2023 tournée

2023 aura été l’année historique qui marquera le déclin définitif, et (irrémédiablement) irréversible de la domination néo-coloniale française en terre sahélienne d’Afrique. Cette descente aux enfers de l’impérialisme français a démarré au Mali, qui a connu un double coup d’État souverainiste en 2020 et 2021 ; puis en Guinée-Conakry en septembre 2021 ; au Burkina Faso, théâtre également d’un double coup d’État souverainiste en janvier et septembre 2022 et enfin au Niger, où le coup fatal a été assené à la France le 26 juillet 2023. Ce dernier épisode (pour l’année 2023) de la chute des régimes eurafricains et usafricains et de surcroît impopulaires et totalement inféodés à l’impérialisme français a été très mal digéré par la junte néo-coloniale française ; le Niger constituant le dernier bastion d’une région qui a toujours été considérée comme le pivot de la ‘’Françafrique‘’ et le pays où l’Elysée s’attend le moins à prendre une si assourdissante gifle. Le Niger est par excellence, le pays où en si peu de temps, l’impérialisme français a connu tous les déboires inimaginables. En effet, du 26 Juillet 2023 à ce jour, le contingent militaire français au Niger a été prié de plier bagage (le dernier soldat ayant embarqué le 22 Décembre dernier), l’ambassadeur de France déclaré persona non grata a honteusement quitté le Niger,  la fermeture du Centre culturel franco-nigérien, les signaux des média RFI et France 24 suspendus, la compagnie aérienne Air France et tout autre aéronef français interdits de survol de l’espace aérien nigérien, le retrait du Niger du G5 Sahel (organisation au service exclusif de la France), la suspension des relations avec l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), le retrait de l’accord autorisant le déploiement de la Mission militaire de partenariat de l’Union Européenne au Niger (EUMPM), l’abrogation de la loi n° 2015-36 du 26 mai 2015 criminalisant toutes les activités liées à la migration irrégulière, les gouvernements malien et nigérien de publier un communiqué commun dans lequel ils dénoncent les conventions signées avec la France sur la non double imposition, etc… ; bref, il ne reste plus que la coopération monétaire à rompre avec la France néo-coloniale et la création d’une monnaie déliée commune sous-régionale. Cela aussi ne saurait tarder avec la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) qui va dans les mois à venir faire tache d’huile dans l’espace ouest-africain (au grand dam de certains larbins chefs d’Etat de la CEDEAO et de l’UEMOA dont les cas ne méritent pas qu’on s’y attarde). Ne pouvant plus continuer à supporter cette humiliation, la France décide unilatéralement de fermer son ambassade au Niger, qui selon Paris, ne peut «plus assurer ses missions» ; une décision extrêmement grave pour le Quai d’Orsay. Jamais dans l’histoire de la 5ème République, la France n’a vu ses relations se dégrader aussi rapidement. Autant la honteuse et historique débâcle de Dien Bien Phu en 1954 au Viet-Nam subie par le Général De Gaulle, autant la France de Macron ne se remettra jamais de l’humiliation vécue en terre africaine du Niger. Pourtant, les signes avant-coureurs de cette débâcle de l’impérialisme français étaient perceptibles dans plusieurs pays d’Afrique dite ‘’francophone ‘’, depuis quelques années.

II – La France n’a qu’à s’en prendre à elle-même

En réalité, la ‘’débâcle‘’ française en Afrique a commencé depuis plus de deux (2) décennies. Le rôle de ‘’gendarme de l’Afrique‘’ dont se targuait la France dans le cadre de la guerre froide est devenu caduc et certaines puissances (États-Unis, Russie, Chine,…) se sont engouffrés dans ce qui était supposé être le pré carré français. Outre ces puissances, se sont invité sur le terrain africain de confrontation des puissances étrangères, les pays émergeants (Turquie, Inde, …et dans une moindre mesure, certains pays du Golfe). La France ‘’somnolant sur ses lauriers‘’ pensait naïvement que ses parts de marché, le FCFA, les accords d’exploitation des ressources extractives stratégiques, la coopération militaire (21 accords de coopération militaire et 11 accords de défense ou accords de partenariat de défense avec certains pays africains),… sont des acquis irréversibles. En effet, la période exceptionnelle de quasi-monopole de la France dans ses anciennes colonies d’Afrique commençait sérieusement à s’éroder ; pour preuve, la part relative de commerce de la France sur le continent de chuter de 15 à 7,5% entre 2000 et 2020 contre 27% pour la Chine. Les autres pays émergents, tels l’Inde et la Turquie, taillent des croupières à la France dans son ancienne chasse-gardée. Parmi ses propres partenaires et ‘’frères‘’ européens, l’Allemagne a détrôné la France en 2018 comme premier fournisseur européen de l’Afrique, sans parler de l’Espagne et de l’Italie. En très bon stratège, l’ex-Union Soviétique a formé (depuis les années 60) de milliers d’étudiants africains dans les universités et instituts soviétiques, dans des domaines stratégiques (pétrole, nucléaire, défense,…), ce que la France n’a pas daigné faire (après plus de 55 ans d’exploitation d’uranium et d’exploration pétrolière entamée par des sociétés pétrolières françaises avant l’indépendance, la France n’a, par égoïsme et jalousie formé aucun technicien, encore moins un ingénieur nigérien dans les secteurs du nucléaire et du pétrole ; ce qui n’était pourtant pas le cas de l’ex-Union Soviétique ou de la Chine Populaire). N’en déplaise à la France, ces milliers de cadres africains formés en ex-Union Soviétique et en Chine sont aujourd’hui les ‘’ambassadeurs‘’ de la Russie et la Chine en Afrique, et c’est ce qui provoque la haine viscérale de l’Elysée vis-à-vis des régimes militaires souverainistes accusés d’être à la solde de Moscou. Les partenaires non occidentaux des pays africains, ont en l’espace de deux (2) décennies fait beaucoup mieux en termes d’investissement que les français après plus d’un siècle de présence. Ici au Niger, en matière d’infrastructures, il a fallu le 15 février 2022 pour que la France érige un minable et ridicule édifice à Niamey, dénommé ‘’Maison de l’Uranium’’ (pour un coût de près de 10 milliards FCFA), laissant la route dite de l’uranium dans un piteux état de dégradation. Ce qui intéresse la France, c’est le transport jusqu’au port de Cotonou de l’uranate avec les camions nigériens (à leur risque). Avec la fermeture de son ambassade à Niamey, la France a de son propre gré rompu les relations officielles et diplomatiques avec le Niger nouveau et souverain. Mais Paris doit savoir qu’elle ne peut pas revenir au Niger de la même manière qu’elle l’a unilatéralement quitté. Selon une parution du journal ‘’MondAfrique‘’ du 03 Janvier dernier, le Quai d’Orsay a décidé de ‘’réouvrir‘’ l’ambassade de France au Niger, non pas à Niamey, mais à Paris ! Bien qu’il ait été contraint de déguerpir du Niger honteusement, Sylvain Itté demeure, selon le ministère français des affaires étrangères, ambassadeur de France au Niger avec ‘’résidence à Paris’’ …. quelque chose qui ressemble fort à une tragi-comédie. Dans tous les cas, la France a décidé seule de partir du territoire souverain du Niger ; elle ne peut pas à contrario décider seule de revenir (tout bonnement) et occuper la même place avec la même attitude paternaliste. Ça, c’est terminé ! …. et même s’il lui arrivait de demander à revenir un jour, elle ne sera plus logée dans une enseigne meilleure que les autres pays qui ont une accréditation diplomatique chez nous. L’inévitable et irréversible perte d’influence de la France en Afrique dite francophone, la volonté hégémonique de l’OTAN liée à la nouvelle carte géopolitique et géostratégique qui se dessine avec leur inévitable défaite dans la guerre russo-ukrainienne (ou plutôt la guerre russo-occidentale), la crainte de la perte d’énormes ressources énergétiques et minérales (métaux rares, stratégiques,…) dans la zone sahélienne dite ‘’des trois frontières‘’, les pays occidentaux qui sont aussi dans une tendance de déchéance morale qui frise bien une insulte à nos valeurs cultuelles et culturelles sont autant d’éléments qui ont poussé certains pays africains à mettre la France ‘’à la porte‘’.  Et c’est justement ce qui trouble le sommeil des français et hante Emmanuel Macron comme un fantôme. La France et tous les autres pays occidentaux n’ont qu’à s’en prendre à eux-mêmes !

 (A suivre)

Par Mahaman Laouan Gaya