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Tillaberi : Des forts espoirs pour la relance de l’économie locale

L’économie nigérienne est essentiellement rurale basée sur l’agriculture, l’élevage, la pêche, le commerce et l’exploitation des ressources naturelles. Le pays dispose d’énormes potentialités économiques diversifiées sur l’ensemble du territoire national avec beaucoup de spécificités selon les régions. La région de Tillabéri est une zone aux potentialités aussi immenses que variées. Outre l’agriculture et l’élevage, la région est traversée par le fleuve Niger sur plusieurs centaines de Km, faisant d’elle une région aux ressources halieutiques importantes. Mais cette région est hélas l’une des localités confrontées au problème d’insécurité depuis une dizaine d’années. Tous les secteurs clés de l’économie ont été frappés de plein fouet par cette insécurité grandissante qui sévit au Niger depuis plusieurs années affectant ainsi les conditions de vie de la population.

Le déplacement forcé des populations les obligeant à abandonner leurs terres de culture et d’élevage, le vol répétitif de bétail, la fermeture des marchés, des centres de santé et des écoles sont les principaux facteurs qui ont négativement impactés l’économie locale et par ricochet la vie des populations de la région. Aujourd’hui, tous les acteurs recommandent et insistent sur l’éradication totale de l’insécurité afin de redynamiser et relancer les secteurs clés de l’économie locale.

Située dans l’extrême ouest du Niger, la région de Tillabéri est limitée au nord par le Mali et la région de Tahoua, à l’est par la région de Dosso, à l’ouest par le Burkina Faso et au sud par le Bénin. D’une superficie de 97.251Km2, Tillabéri compte 13 départements avec une population estimé à 3.903.596 habitants en 2022. Les principales activités des populations restent l’agriculture, l’élevage, le Commerce et la pêche.

Suite aux élections de 2004 qui ont vu l’installation de la première génération des communes issues du processus de la décentralisation puis les élections de Février 2011 qui ont abouti à l’installation des conseils municipaux et régionaux, la région de Tillabéri compte un conseil régional et 45 communes. Chaque collectivité territoriale (commune, région) a élaboré son document de planification sous l’égide du Conseil régional et du Conseil communal.

Selon le rapport régional de suivi de la performance de l’action publique depuis les communes de l’année 2022, le Plan de Développement Régional (PDR) et le Plan de Développement Communal, un document cadre de politique régionale ou communale de développement à travers lequel le conseil régional ou communal apporte des réponses aux préoccupations des populations, fait ressortir les difficultés intenables qui pèsent sur l’économie locale. «Les communes représentent la porte d’entrée pour l’État et ses partenaires dans le cadre des investissements à réaliser au profit des populations. La variabilité et les changements climatiques conjugués aux actions anthropiques ont eu pour conséquences les déplacements massifs des populations, l’insécurité généralisée, la limitation des déplacements des acteurs de développement auxquels s’ajoute l’impossibilité de mener librement et en toute sécurité des activités économiques et de la mise en œuvre des actions de développement au niveau de certaines localités et ce malgré l’appui de l’État et ses partenaires. Le contexte météorologique a été quant à lui caractérisé par une situation favorable ayant occasionné une saison des pluies acceptable au niveau de la région » note le rapport  régional de suivi de la performance de l’action publique depuis les communes de l’année 2022.

L’impact de l’insécurité sur l’économie locale

Dans les zones rurales, c’est le secteur informel qui tire l’économie. A Tillabéri le petit commerce occupe une place importante dans la vie des populations. Le secteur de l’économie a pris un coup dur depuis que la situation a commencé à se dégrader. Pour M. Mounkaila Alzouma, acteur de la société civile, les communes qui constituent le poumon de l’économie locale ne sont plus en mesure de mobiliser des ressources à cause des mesures de restriction prises dans le cadre de la lutte contre les groupes armés terroristes. La menace sécuritaire a favorisé l’aggravation du chômage pour toutes les couches sociales et freine l’économie de la région. « Le ralentissement des projets de développement et les autres aspects de l’insécurité empêchent à la région de Tillabéri d’obéir à ses plans économiques et au développement. Il y a des marchés importants de la région qui sont fermés depuis des années. Dans plusieurs zones, les institutions de micro-finance et de transfert d’argent n’accompagnent plus les communautés. Ces institutions ne peuvent plus soutenir les initiatives et les commerces locaux. Tout cela a un impact négatif sur l’économie locale, mais aussi sur l’économie nationale car, l’économie d’un pays commence à la base », rappelle l’acteur de la société civile.Selon M. Ibrahim Mamoudou, membre d’une association des commerçants de la région de Tillabéri, l’économie de la région est en déliquescence, dans une situation de handicap depuis plusieurs années du fait de la menace sécuritaire née des exactions des groupes terroristes qui écument les zones reculées, principaux points d’approvisionnement des centres urbains. Il estime que les marchés ruraux dont la plupart sont fermés et certaines pratiques et agissements terroristes sapent la vocation des populations de contribuer à l’édification de l’économie nationale. « L’essentiel des piliers de l’économie de la région tournent au ralenti. Un paysan à qui on a pris tous ses animaux, qui n’a pas cultivé des années durant pour avoir été forcé de quitter ses champs est réduit à l’exode. Bien évidemment, son économie est déstructurée voire complètement anéantie. On ne peut pas parler de l’économie dans ce contexte » se désole M. Ibrahim Mamoudou.

M. Soumaila Moumouni est un commerçant grossiste au grand marché bihebdomadaire de Tillabéri dont les rencontres du marché ont lieu les mercredis et les dimanches. Il mène ses activités dans ce marché depuis une vingtaine d’années. Il est spécialisé dans la vente des produits vivriers notamment. Ses principaux clients sont des commerçants détaillants. Aujourd’hui, confie-t-il, ses affaires ne marchent plus comme avant à cause de l’insécurité. Naguère, son lieu de vente est envahi par des clients étrangers venus de Mali et des populations venues des communes frontalières du Burkina. Cette affluence dans son magasin n’existe plus, il en garde le souvenir de cette belle époque. « Avant, quand il n’y avait pas cette insécurité, les commerçants détaillants se bousculent devant ma boutique et s’arrachent les produits, contrairement à ce qui se passe maintenant. Aujourd’hui, notre marché a perdu ses caractéristiques et de sa splendeur d’un marché régional voire international. Par le passé, les commerçants venaient des deux pays voisins (NDLR : Mali et Burkina Faso). La plupart de nos clients vivant dans les zones d’insécurité sont au chômage qu’il s’agisse des commerçants; d’éleveurs et autres ravitailleurs en produits. Les ressortissants de ces pays voisins ne peuvent plus venir comme ils le souhaitent. Mais j’espère que maintenant avec le changement intervenu dans notre pays il y aura de l’accalmie et que toutes les activités économiques vont reprendre », a souhaité le commerçant.

Abdoul-Aziz Ibrahim, ONEP Tillabéri
Source : https://www.lesahel.org