Relations Niger-France Après le départ de la France, pourquoi la production d’uranium continue avec Orano ?
Si les relations entre le Niger et la France sont au poids mort, il reste que celles qui lient l’Etat nigérien à Orano, une société d’État française, sont loin d’être atteintes par le syndrome de la rupture. Les Nigériens s’attendaient au minimum à une remise en cause de la nouvelle méthode d’exploitation introduite par Orano dans les nouveaux accords signés avec l’administration précédente en mai 2023. Une nouvelle méthode suicidaire pour le Niger dont la nappe phréatique sera complètement détruite pour l’éternité. Si elle est suicidaire pour le Niger qui compromet ainsi la nappe phréatique d’une des zones les plus riches en eaux souterraines du monde, la nouvelle méthode envisagée par Orano pour l’exploitation d’Imouraren par lixiviation in situ, c’est à dire, exécuter un forage et injecter de l’acide dans le sol pour faire fondre le minerai et le pomper, constitue pour la France davantage d’uranium à moindre coût. Une pratique que le gouvernement nigérien a acceptée, les yeux fermés, au mépris des vies humaines que cela anéantirait pour l’éternité. Pourquoi, s’interrogent les Nigériens, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (Cnsp) n’a pas encore songé à remettre en cause cet accord pourtant dangereux et préjudiciable pour le Niger ? Qu’est-ce qui se passe avec Orano pour que le statuquo soit maintenu alors que tout commande de revisiter et de réviser cet accord signé en mai 2023, soit deux mois à peine avant les évènements du 26 juillet 2023 ?
Les dessous du contrat État du Niger- ORANO
Le jeudi 4 mai 2023, Bazoum Mohamed prend l’avion pour Londres afin d’assister au couronnement de Charles 2 d’Angleterre. Le patron d’Orano est finalement reçu par le Premier ministre, Ouhoumoudou Mahamadou, avec qui il a signé l’accord Imouraren. Le succès est total pour la société française qui obtenait ainsi, contre toute logique de la partie nigérienne, qu’Orano exploite Imouraren par lixiviation in situ, c’est à dire, exécuter un forage et injecter de l’acide dans le sol pour faire fondre le minerai et le pomper. Une pratique assassine que le gouvernement nigérien de l’époque a acceptée, les yeux fermés, au mépris des vies humaines que cela anéantirait pour l’éternité. Les réticences des Cadres du ministère des Mines sont à la fois légitimes et justifiées. Elles sont liées à la certitude que cette méthode va inévitablement polluer la nappe phréatique si vitale pour aujourd’hui mais surtout pour les décennies à venir. La pollution redoutée à juste titre ne sera pas une pollution ordinaire car elle rendra radioactive les eaux fossiles et la nappe phréatique. Et on connaît la nocivité de la pollution par l’uranium.
Comment peut-on, se demande une de nos sources du ministère des Mines, accepter d’empoisonner littéralement les Nigériens d’aujourd’hui et les générations futures en cédant à Orano l’inacceptable ? Quel a été le rôle de l’ancien Président Issoufou Mahamadou ? auraitil aidé Orano à faire plier Bazoum Mohamed qui y serait réticent ?Ancien employé d’Areva, Issoufou Mahamadou fut celui qui a permis à Orano, mutant sémantique d’Areva, de garder en «jachère» la mine d’Imouraren alors que le Niger aurait pu retirer le permis octroyé et l’attribuer à une entreprise. On sait aussi qu’Issoufou Mahamadou est l’artisan de la modification de la loi minière adoptée sous Mamadou Tanja et dont se plaignait Areva/ Orano qui la trouvait contraignante et attentatoire à ses intérêts.
Déjà, après la fermeture de la mine Cominak, Orano a légué au Niger une montagne de 20 000 tonnes de déchets radioactifs, à l’air libre, seulement couvertes d’une mince couche de latérite (matériau pulvérulent par excellence) que le vent saharien disperse aux quatre coins sans compter la contamination des eaux souterraines.
Les Nigériens sont en face de cet autre scandale lié à l’exploitation de l’uranium par la France.Une exploitation qui a considérablement enrichi la France et appauvri le Niger, grugé sur toute la ligne. Mais ausein de l’opinion nationale nigérienne, les avis sont partagés quant au responsable de la réédition, en 2023, de cette arnaque. Faut-il encore continuer à indexer la France, détentrice d’Orano/Areva, sous une république dirigée par le Pnds Tarayya qui se targuait d’être l’incarnation du savoir ? Ou faut-il plutôt accuser les autorités de la «renaissance» du Niger qui sont parfaitement édifiées sur les conséquences désastreuses de la technique d’exploitation parlixiviation in situ ? Un ingénieur des mines a laissé tomber ce soupir: « avec l’uranium du Niger, la France a l’électricité, les business des centrales nucléaires et le Niger a la pollution à la radioactivité ». Déjà, après la fermeture de la mine Cominak, Orano a légué au Niger une montagne de 20 mille tonnes de déchets radioactifs, à l’air libre, seulement couvert d’une mince de latérite (matériau pulvérulent par excellence) que le vent saharien disperse aux quatre coins sans compter la contamination des eaux souterraines dont vivent les hommes, les animaux et l’agriculture de la région. Ce scandale écologique aux conséquences sanitaires à moyen et long termes incalculables n’a pas suffisamment soulevé l’indignation des Nigériens pour contraindre Orano à assumer ses responsabilités de pollueurpayeur. Orano fera donc au Niger ce qu’il a fait en Centrafrique et au Gabon: empoisonner impunément les Nigériens après avoir retiré tous les bénéfices économiques et politiques de l’exploitation de l’uranium. Les autorités déchues auraient dû s’en tenir au permis délivré à Orano qui était un permis d’exploitation à ciel ouvert plus pourvoyeuse d’emplois et présentant moins de risque de pollution des eaux de la nappe phréatique. Si pour la mine de Cominak, il suffit d’assurer «un service après-vente» pour la restauration écologique et contenir les risques sanitaires, pour Imouraren il n’y a guère d’alternative crédible avec la technique acceptée par le gouvernement. Il fallait s’imposer la prévention desdits risques. Cela aurait dû dissuader les autorités déchues d’accepter qu’Orano exploite la mine par lixiviation in situ.Elles auraient dû s’en tenir au permis délivré à Orano qui était un permis d’exploitation à ciel ouvert plus pourvoyeuse d’emplois et présentant moins de risque de pollution des eaux de la nappe phréatique. Sans doute que le permis d’Imouraren a finalement été modifié en catimini, dans les jours suivant la signature de l’accord afin que Orano s’adonne à la pollution des eaux du Niger. Il était clair que la société française était en pays conquis au Niger et que l’élite politico-administrative de la «renaissance»y était totalement acquise. Pour compenser (sic) le désastre écologique qu’elle envisage de provoquer au Niger, Orano promet d’investir d’une vingtaine de milliards sur les années d’exploitation d’Imouraren. Une broutille qui ne rétablira pas la nappe phréatique.
Laboukoye (Le Courrier)
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Le cas insolite d’Orano face à la réalité induite depuis le 26 juillet 2023
Pourtant, depuis le 26 juillet 2023, les relations entre le Niger et la France sont en dessous du rez-de-chaussée, pour ne pas dire en passe d’avoir existé. Les relations diplomatiques gelées, l’ambassade de France fermée depuis le départ arraché de haute lutte de l’ambassadeur Sylvain Itté déclaré persona non grata, les accords militaires dénoncés, le Niger et la France se regardent désormais en chiens de faïence. On peut dire que c’est la guerre froide entre le Niger et la France qui a usé de tous les artifices et manoeuvres possibles pour diaboliser les autorités militaires nigériennes. La guerre de communication perdue pour cause de deux poids, deux mesures — elle adoubait d’autres pouvoirs militaires comme au Gabon et au Tchad — les manoeuvres pour constituer une coalition occidentale tombées à l’eau, la France n’a pas pour autant abandonner son vil et funeste combat. Son Adn impérialiste et néocolonial l’en empêchait.Ultime recours, elle a envisagé, sous le couvert de la Cedeao instrumentalisée, une intervention militaire contre Niamey. Là également, échec et mate, l’entreprise a foiré. Que dire aussi de ces sanctions iniques, illégales et inhumaines qui ont été imposées au Niger sous l’impulsion et les manigances d’une France qui ne décolère manifestement pas de faire payer cher au Niger et à son peuple son esprit souverainiste et sa volonté fortement exprimée de remettre désormais en cause toute relation fondée par des accords léonins.
Les Nigériens s’attendaient au minimum à une remise en cause de la nouvelle méthode d’exploitation introduite par Orano dans les nouveaux accords signés avec l’administration précédente en mai 2023.Une nouvelle méthode suicidaire pour le Niger dont la nappe phréatique sera complètement détruite pour l’éternité.
La France, c’est d’abord l’uranium au Niger, exploité depuis 1960 dans des conditions très défavorables pour le Niger. À la faveur des évènements du 26 juillet 2023, les Nigériens avaient espéré, dans la foulée de la dénonciation des accords militaires, une remise à plat de ces accords signés dans le cadre de l’exploitation de l’uranium. C’était d’autant plus attendu que le président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (Cnsp) et chef de l’État, le général Abdourahamane Tiani, avait solennellement déclaré que la France payera cash ce qu’elle a pris au Niger. À ce jour, les Nigériens n’ont pas encore connaissance d’une remise en cause de quoi que ce soit touchant, à plus forte raison des perspectives nouvelles plus prometteuses. Pire, l’on apprend, il y a quelques semaines, la reprise de la production d’uranium. La Télévision Bonferey y a même consacré un reportage, avec en toile de fond le reportage du secrétaire général du Syndicat national des travailleurs des mines (Syntramin). Les Nigériens ne comprennent pas et s’interrogent. Mais en dehors de toute information officielle, ils se lancent dans des spéculations. Pour le moment, ces stocks d’uranium enlevé sont encore entassés, confrontés à des difficultés d’acheminement jusqu’au port. Lequel ? «Thatis the question», la frontière Niger-Bénin étant toujours fermée à ce jour. Selon des sources dignes de foi, Le corridor Niger-Burkina Faso-Togo qui s’offre aujourd’hui en alternative présente trop d’aléas. Des aléas liés aux mesures de sécurité qu’il faudra envisager pour faire sortir le précieux minerai qui alimente une ampoule au moins sur trois en France.
(Le courrier)