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Niger - Benin : Patrice Talon, le Kagamé de l’Afrique de l’ouest

En subordonnant le chargement du brut nigérien à l’ouverture de la frontière, le président béninois fait du chantage. Et en diplomatie, c’est une faute grave. Les deux pays ont, sous la gouvernance du régime déchu, signé un accord en vue de l’exportation du brut nigérien par le port béninois de Sémè.

Un oléoduc de plus deux kilomètres a été réalisé par une entreprise chinoise. Le coup d’Etat du 26 juillet au Niger n’a pas interrompu les travaux en dépit du fait que, sous l’impulsion de la CEDEAO et certainement la France, le Benin ferme unilatéralement sa frontière. Cette fermeture sra vécu stoïquement par les populations riveraines. Les Béninois dans leur grande majorité ont condamné. Même les rois. Le président Talon bouchera les oreilles. Il sera d’ailleurs l’un des plus fervents partisans d’une intervention militaire pour rétablir le régime déchu. Devant l’impossibilité de cette aventure, la CEDEAO décidera de la levée des sanctions. Et c’est tout naturellement que Talon ordonnera l’ouverture de la frontière. Craignant une déstabilisation à partir de territoire béninois, les autorités nigériennes décident maintenir sa frontière fermée. Plus cette situation durait, plus l’économie béninoise en ressentait. Le Niger est l’un des plus grands utilisateurs du port de Cotonou dont les activités prennent une part importante dans le budget. Devant le manque à gagner et surtout la pression de ses compatriotes, le président Talon tentera de justifier ses prises de position. Les militaires nigériens resteront sur la décision de maintenir la frontière fermée. Car ces derniers suspectent le Benin d’abriter des bases françaises qui envisagent de déstabiliser le pays. Devant un tel dilemme qui a raison ? Autant on ne peut pas reprocher aux autorités nigériennes de vouloir se protéger, autant le président béninois souhaite améliorer le quotidien de ses compatriotes. Dans les deux cas, cette situation ne doit pas être gérée avec l’émotion. On ne gouverne pas avec l’émotion. La situation aurait pu être gérée autrement. Il suffisait de se parler. Le président Talon aurait pu ravaler sa suffisance et demander l’aide de ses prédécesseurs. Les présidents Soglo et Yayi Boni auraient pu être des négociateurs efficaces. Ce n’est pas sorcier. D’autant que, dans sa suffisance, le président Talon s’est mis à dos le seul président de la CEDEAO susceptible d’être entendu par les autorités de Niamey. Dans l’affaire de l’opposante Madougou les autorités béninoises ont pris à parti le président togolais Faure. En empêchant l’enlèvement du brut nigérien, le président Talon descend vraiment dans les égouts. A moins qu’il déroule un agenda. Si l’on se rappelle que le Liptako-Gourma a été présenté pour ses ressources comme le Katanga de l’Afrique de l’ouest, il est tout à fait logique de faire un parallèle avec la situation que vit la République Démocratique du Congo. On sait que Paul Kagamé fait la guerre au RDC pour exploiter ses ressources. Et comme Talon est son ami et que le Benin et le Niger présentent les mêmes similitudes que le Rwanda et la RDC, on pourrait penser que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Et en créant un conflit entre les deux pays, Talon est sûr d’aller au-delà de son mandat.
Modibo  (Le Nouveau Républicain)