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MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE DE WANEP-NIGER : Projet « Suivi, Analyse et Atténuation de la Violence Électorale (EMAM) »

 

Projet « Suivi, Analyse et Atténuation de la Violence Électorale (EMAM) »
MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE DE WANEP-NIGER

Election présidentielle deuxième tour du 21 Février 2021 au Niger
Cellule de Veille Électorale (CVE) 

DECLARATION PRELIMINAIRE

{xtypo_quote}“Un scrutin qui s’est déroulé de manière satisfaisante”!{/xtypo_quote}

Introduction

Le 21 février 2021, les électeurs nigériens sont appelés aux urnes pour le deuxième tour de l’élection du Président de la République. Selon les résultats validés et rendus publics par la Cour Constitutionnelle, le 30 janvier 2021 par arrêt n°06/CC/ME, Monsieur Mohamed Bazoum, candidat du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS TARAYYA) est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle du 27 décembre 2020 avec 1.879.543 voix, soit 39,33 % des suffrages, suivi de Monsieur Mahamane Ousmane, candidat du Renouveau Démocratique et Républicain (RDR Tchandji) avec 811.838 soit 16,99 % des voix.

Pour le second tour de la présidentielle, le candidat Mohamed Bazoum a reçu le soutien entres autres de Messieurs Seini Oumarou (8,95% des suffrages) et Albadé Abouba (7,07% des suffrages), arrivés respectivement 3ème et 4ème.

Monsieur Mahamane Ousmane ayant bénéficié déjà du soutien de Monsieur Hama Amadou dont la candidature avait été invalidée par l’arrêt n°005/CC/ME du 13 novembre 2020 de la Cour constitutionnelle, a reçu le soutien de Messieurs Ibrahim Yacoubou (5,38% des suffrages) et Salou Djibo (2,99 %) entre autres…

1- Objectifs et Méthodologie de la Mission d’observation du WANEP-Niger

A travers ses quatre chambres, la Cellule de Veille Electorale (CVE) a pour objectifs de collecter les informations, analyser la régularité et la transparence du scrutin du dimanche 21 Février 2021. A cette occasion, le WANEP-Niger a organisé, pour ses 350 observateurs, plusieurs séances de formation en vue de mettre à leur disposition des informations sur la méthodologie d’observation y compris sur l’utilisation de la grille d’observation le jour du scrutin.

Ces observateurs ont été déployés selon une cartographie des zones à risque et tendances du système d’alerte précoce de WANEP-Niger en collaboration avec des organisations de la société civile. 

2- Constatations préliminaires

  1. Observations pré-électorales

L’élection présidentielle du 21 Février 2021 est la troisième organisée par le Niger depuis 2011. Cette élection intervient après l’organisation des élections locales et régionales du 13 décembre 2020 et celle du premier tour couplée aux législatives du 27 décembre 2020.

2- Au titre de la liste électorale

L’élaboration du fichier électoral biométrique a produit une liste définitive de 7.446.556 électeurs, soit un taux de réalisation de 76,36 %, dont 4.093.291 femmes (55%) et 3.353.265 hommes (45%). 

  1. Administration électorale
    L’article 6 de la Constitution consacre la CENI au rang d’Institution de la République du Niger chargée d’organisée les élections et les référendums.
    La CENI est juridiquement responsable de la gestion du processus électoral depuis l’inscription des électeurs sur la liste électorale biométrique, jusqu’à la proclamation des résultats globaux provisoires ; elle est dotée de la personnalité juridique et de l’autonomie financière.

  2. Au titre d’actions d’accompagnement
    Des activités d’éducation et de sensibilisation ont été organisées à l’intention des électeurs pour des élections apaisées et pour favoriser leur mobilisation. Dans ce cadre, le Comité des sages de la CNDH, le Médiateur de la République, le Conseil Supérieur de la Communication, la CENI et les organisations de la Société Civile ont adressé des messages de paix et de cohésion sociale.

  3. Participation de la femme
    Le WANEP-Niger note l’implication et la mobilisation effective des femmes dans les opérations électorales. Cependant, en dépit de ces efforts louables, le WANEP-Niger note que la participation politique de la femme est à renforcer pour une meilleure représentativité.

  4. Campagne électorale
    La campagne pour le deuxième tour de l'élection présidentielle a démarré le 31 Janvier 2021 à 00 heure et elle a clos le 19 Février 2021 à minuit.

    Dans l’ensemble, la campagne électorale s’est bien déroulée et a permis aux différents candidats de présenter librement leurs programmes de gouvernement et projet de société aux électeurs.
    Toutefois, par endroit, il a été noté des cas de violences verbales et physiques, des propos déplacés signalés ça et là en violation flagrante des lois et règlements de la République.

  5. Société civile
    La société civile nigérienne tient sa légitimité des valeurs universelles et de sa connaissance de la réalité du terrain. Elle a joué un rôle essentiel dans l’accompagnement et le suivi du processus électoral et constitue l’ossature de l’observation électorale nationale et internationale afin d’assurer le suivi citoyen à tous les niveaux du déroulement du processus électoral.
    Elle a un rôle crucial à jouer en cette période électorale. Son intervention prend en compte trois axes :
    - l’éducation civique et électorale des citoyens ;
    - l’observation du processus électoral ;
    - la formulation des demandes de la population.

  6. Médias
    Les médias ont joué un rôle important de conscientisation de la société nigérienne. Sous la supervision du Conseil Supérieur de la Communication (CSC), ils ont octroyé des temps d’antenne aux candidats en lice.
    En plus des médias classiques, les réseaux sociaux ont été abusivement mobilisés. Des discours et des messages inappropriés, teintés de mépris, de haine, de régionalisme, d’ethnocentrisme et de racisme ont été enregistrés.

  7. Au titre des dispositions sécuritaires

Un important dispositif sécuritaire a été déployé sur le terrain, matérialisé par la présence de plusieurs éléments des Forces de Défense et de Sécurité (FDS). Sur 1629 rapports soumis par nos observateurs, 1544 ont fait cas de la présence des Forces de Défense et de Sécurité, soit 94,78%. Ce dispositif est plus renforcé dans les zones fragiles.

3- Du déroulement des opérations de vote

  1. Ouverture des bureaux de vote

Les 350 observateurs déployés par WANEP-Niger étaient présents à l’heure officielle d’ouverture à 08 heures. Sur les 320 bureaux de vote ouverts, 191 ont ouvert à l’heure, soit 59,32% contre 129 qui ont ouvert en retard, soit 40,06%.

A Niamey, Arrondissement communal III, au quartier Banifandou, bureau de vote n o122, et dans la région d’Agadez, département de Tchirozerine dans l’école Abalam 1 bureau de n°74, ont ouvert à  8h55.

Selon les données recueillies par nos observateurs terrain, le plus grand retard a été enregistré dans le village de Garin Issa, Région de Tahoua, Commune 1 au BV72 où ledit bureau a ouvert à 10 heures.

Dans l’ensemble les électeurs ont exécuté leur devoir civique dans le calme.

  1. Déroulement du scrutin

Dans la plupart des bureaux de vote couverts par les observateurs de WANEP-Niger, l’aménagement des bureaux permettait la fluidité du vote des électeurs. Les scellés étaient correctement mis aux urnes et les électeurs ont accompli leur devoir civique suivant les procédures légales de vote.

Sur les 323 rapports transmis par les observateurs de Wanep sur le terrain, 314 soit 97,21% ont rapporté que le scrutin s’est déroulé sans interruption. Les bureaux de vote ont respecté les 11 heures prévues par le Code électoral (304/323), soit 94,12%.

  1. Matériel électoral

Contrairement au premier tour, le matériel était disponible en quantité suffisante dans la plupart des bureaux de vote visités.

Des isoloirs bien aménagés ont été installés de manière à garantir le secret de vote dans la plupart des bureaux de vote visités.

  1. Membres des bureaux de vote

Dans la quasi-totalité des bureaux de vote visités par les observateurs du WANEP-Niger, le personnel électoral était au complet, facilitant ainsi un déroulement fluide du vote.

  1. Représentants des candidats

Les observateurs ont noté la mobilisation et la présence effective des délégués représentants les deux candidats tout au long de la journée du scrutin, avec en moyenne un représentant par bureau de vote visité.

  1. Fermeture et dépouillement

A l’instar de l’ouverture du scrutin, les opérations de fermeture et de dépouillement se sont déroulées dans un climat de sérénité. La grande majorité des bureaux de vote visités lors du dépouillement ont respecté la durée légale de onze heures.

Malgré les dysfonctionnements constatés dans le remplissage des procès-verbaux, la clôture et le dépouillement du scrutin se sont déroulés de manière satisfaisante. 

Dans la plupart des bureaux de vote observés 312/323 soit 96,59%, le dépouillement est intervenu dès la clôture des opérations de vote et a connu la présence effective des membres des bureaux de vote (302 BV soit 93,5%), des représentants des candidats, des observateurs, des  FDS et quelques électeurs. 

Dans presque tous les bureaux de vote observés (316 soit 97,83%), les décisions d’annulation et de validation de bulletins ont été prises de façon consensuelle. En général, les procédures prévues par les textes en vigueur pour la clôture des bureaux de vote et le dépouillement ont été respectées 95,67% (309/323).

Le tri, le dépouillement, le décompte des bulletins de vote, ainsi que la publication des résultats dans les bureaux de vote ont été effectués de manière professionnelle, transparente et crédible, sous la surveillance des représentants des partis politiques, des observateurs et des électeurs.

Dans l’ensemble, le dépouillement s’est déroulé de manière ordonnée.

4- Des incidents, dysfonctionnements et insuffisances

Tout au long du processus, nos observateurs ont transmis 344 rapports portant sur l’ouverture, le déroulement et la fermeture des bureaux de vote. A l’analyse de ces rapports, des dysfonctionnements, des insuffisances de matériel et d’incidents ont été rapportés :

-          dans la région de Tillabéry (Commune de Dargol - département de Gotheye), un véhicule réquisitionné par la CENI transportant des membres de bureaux de vote a sauté sur un Engin Explosif Improvisé, où on déplore 7 morts dont 2 femmes et 5 hommes et 3 blessés ;

-          à Bankilaré, les bureaux de vote N°33 et 34 du village de Takoujat ont été saccagés par des bandits armés venus à motos. Ils ont emporté un véhicule ayant transporté des délégués de parti. Les bureaux de vote 36 et 37 qui se trouvent non loin dudit village ont suspendu les opérations de vote pour se mettre en sécurité ;

-          dans la Commune de Fillingué, les Djihadistes ont privé 6 bureaux de vote totalisant plus de 2000 électeurs leur droit fondamental dans la zone de Touloun Damissa. La reprise du vote prévue ce 22 février n’est pas effective. Les 6 bureaux qui n’ont pas fonctionné sont : Tigogi, Ganda Gorou, Akorine, Touloun Damissa I, Touloun Damissa II et Garin Madi ;

-          à Garin-Dogo, situé à 18 km de Diffa, chef-lieu de la région, après leur retour des opérations de vote, le véhicule transportant des agents de la CENI a été attaqué par des éléments présumés de Boko Haram. Le bilan fait état de la mort de Abba Mallam Wally, Président du bureau de vote et de 6 autres blessés.

5- De la contribution du WANEP et de ses partenaires

Pendant la période pré-électorale, le WANEP-Niger et ses partenaires ont, à travers deux projets complémentaires, contribué au suivi, analyse et atténuation des risques de violence électorale grâce au financement de l’Union Européenne et à l’amélioration de l’inclusivité des femmes dans le processus électoral.

Dans ce cadre, un Groupe National de Réponses Électorales (GNRE) est opérationnalisé pour analyser les rapports de suivi et identifier les défis urgents à relever afin d’y proposer ou d’apporter des réponses. Entre autres actions en réponses aux défis identifiés, trois différents mini-projets de réponses ont été subventionnés et mis en œuvre par trois ONG pour un total de 45 millions de francs CFA. 

6- Des enseignements tirés :

-          l’usage particulièrement abusif des réseaux sociaux (désinformation, fausses rumeurs, violences verbales ou physiques) maintenant une atmosphère de tension permanente entre les acteurs politiques ;

-          l’étendue du territoire national ajoutée aux défis sécuritaires du Niger ont contraint les missions d’observateurs à se déployer uniquement dans des zones sécurisées, loin d’un certain nombre de constats relativement à  cette élection ;

-          les enjeux du second tour de l’élection présidentielle ont poussé l’opposition à transmettre aux autorités compétentes les noms des 5 représentants à la CENI sans grande exigence. 

7- Points de satisfaction :

-          la présence dans la majorité des Bureaux de vote visités des forces de défense et de sécurité (1172 contre 46) ;

-          la sérénité des électeurs dans le déroulement des opérations de vote ;

-          une amélioration par rapport au scrutin du 27 décembre ;

-          le matériel électoral disponible en quantité suffisante.

8- Des motifs de craintes :

-          la recrudescence des violences verbales consécutives aux appels de certains acteurs politiques ;

-          la multiplication des zones à risque ;

-          la cristallisation et le durcissement des positions des leaders politiques ;

-          le déficit de confiance envers la Cour Constitutionnelle ;

-          la propagation des rumeurs, la désinformation et la prolifération des discours haineux et violents, à travers les réseaux sociaux et au cours des activités de campagne des partis politiques ;

-          la non application des mesures et pratiques de lutte/prévention du Covid-19 au niveau de tous les bureaux de vote.

9- Des défis et perspectives :

-          le respect des lois et règlements en matière électorale, notamment le contrôle du financement des partis politiques ;

-          la participation des membres de l’opposition et de la société civile dans le Cadre National Permanent de Dialogue Politique (CNDP) ;

-          la neutralité et le professionnalisme des Forces de Défense et de Sécurité (FDS).

-          la gestion de la période postélectorale selon les tendances et résultats qui sortiront des urnes ;

-          la confiance et l’acception des résultats par les candidats et leurs militants dans les différentes régions du pays.

10- Recommandations

Au regard des craintes et défis évoqués, le WANEP-Niger recommande : 

 

Au Gouvernement :

-          de tout mettre en œuvre pour créer un climat social apaisé ;

-          de privilégier la recherche de consensus avec les acteurs politiques dans le règlement des points de divergences ;

-          de créer les conditions favorables à une réconciliation nationale durable ;

-          de réviser le Code électoral pour tenir compte des manquements constatés sur le terrain en lien avec les modalités de réclamations pour des bureaux de vote qui n’ont pas fonctionné.

 

A la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) :

-          de veiller au respect des lois et règlement de la République ;

-          de s’assurer que chaque bureau de vote a bien fonctionné ;

-          de veiller à s’assurer de l’effectivité du fonctionnement du bureau de vote avant de prendre en compte les PV qui en sont issus ;

-          de centraliser et proclamer les résultats globaux provisoires tels que issus des urnes ;

-          d’agir dans le strict respect du cadre légal ;

-          de poursuivre le renforcement des capacités des agents électoraux au regard des défaillances constatées sur le terrain surtout en matière de remplissage des PV.

A la Cour Constitutionnelle :

-          De veiller au strict respect des textes dans le traitement du contentieux électoral.

Aux institutions de protection et de promotion des droits humains :

la CNDH et le Médiateur de la République:

-          d’exhorter les leaders à réitérer leurs appels à la cohésion sociale et au respect des institutions œuvrant pour des élections libres et apaisées ;

-          de continuer à appeler les différentes parties prenantes au strict respect de la dignité humaine.

Aux partis politiques et aux candidats :

-          D’appeler leurs militants à la non-violence ;

-          D’accepter les résultats des urnes validés par la Cour Constitutionnelle

-          de recourir au dialogue et à la concertation pour le règlement de tous les différends pouvant naître du processus electoral. 

Aux Forces de Défense et de Sécurité :

-          De maintenir l’ordre dans le cadre légal et le strict respect des droits de l’homme.

Aux Organisations de la Société Civile :

-          d’assumer les devoirs de leurs charges en cas de violation des droits humains ;

-          de s’organiser pour mieux assurer le contrôle de l’action publique d’ici la prochaine présidentielle pour un développement durable. 

Aux médias et presse en ligne :

-          de respecter l’éthique et la déontologie du métier du journaliste tout au long de la phase postélectorale qui s’ouvre dès ce 22 février 2021 ;

-          de s’abstenir de diffuser toute information qui pourrait exacerber la tension.

Aux utilisateurs des réseaux sociaux :

-          de vérifier les informations avant de les relayer sur les réseaux sociaux afin d’éviter la propagation des rumeurs et des fausses nouvelles.

Aux leaders religieux et traditionnels :

-          de continuer à prêcher la paix et la cohésion sociale.

Pour conclure, la Cellule de Veille Electorale lance un pressant appel à la population et aux acteurs politiques à garder leur calme et à sursoir à toute manifestation de victoire jusqu’à la proclamation des résultats par les instances habilitées.

Elle adresse ses félicitations à l’ensemble des électeurs pour leur mobilisation exemplaire et pacifique qui a permis le bon déroulement du scrutin.

Aussi, tient-elle à remercier les autorités nationales, régionales, locales et l’ensemble des acteurs pour la bonne tenue du scrutin et des dispositions prises ayant permis d’aboutir aux meilleures conditions de mise en œuvre de sa mission.

Le WANEP-Niger remercie également l’Union Européenne pour son appui technique et financier ayant permis l’accompagnement et le suivi du processus électoral au Niger.

Le WANEP-Niger rendra public un rapport exhaustif qui sanctionnera la fin de la mission d’observation de l’élection présidentielle au Niger.

 Ensemble, tissons des relations pour la paix.

 

Fait à Niamey, le lundi 22 Février 2021

Pour la Cellule de Veille Electorale

Le Président

Moustapha Kadi Oumani

 

 

 

 

           

Pour plus d’informations, +227 96 97 27 53, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.