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Les états d’âme politiques de Hama Amadou : Conscience militante, où es-tu ?

En exil sanitaire en France depuis plus de deux années, Hama Amadou, l’Autorité morale du Lumana/ FA, partage désormais sa vie entre l’Hexagone et quelques pays de l’Afrique de l’Ouest. Vingt-sept mois plus tôt, il avait mis tout le paquet, déployé énormément d’énergie et de courage pour hisser le candidat du RDR Tchanji, Mahamane Ousmane, au second tour de l’élection présidentielle du 21 février 2021, après que la Cour Constitutionnelle eut invalidé sa candidature. Jamais, dans l’Histoire démocratique récente du Niger, un scrutin présidentiel n’avait été aussi serré, indécis. N’eussent été, sans doute, les résultats controversés de la région de Tahoua (Un million de voix pour le PNDS/ Tarayya), Mahamane Ousmane l’aurait remporté. En amont, l’Autorité morale du Lumana, en grand briscard de la politique nigérienne, avait mené une campagne électorale d’enfer sur l’ensemble des huit régions du Niger, animant des meetings populaires monumentaux, relayés par les réseaux sociaux de la place au cours desquels il avait déployé un tel talent oratoire en djerma, haoussa et français, nous rappelant sans doute aux grandes heures du Secrétaire Général du MNSD/ Nassara qui ferrailla avec les animateurs de l’Alliance des Forces du Changement (AFC). Au cours de la dernière campagne électorale pour les présidentielles, Hama Amadou ne s’était pas fixé des limites, en jouant vraiment le jeu, tout le jeu et le tout pour le tout, pour que l’alternance politique véritable tant désirée par l’écrasante majorité des citoyens nigériens devînt possible, réalité au Niger, afin de jeter aux oubliettes du passé le régime désastreux de la renaissance d’Issoufou Mahamadou. Il s’était même constitué prisonnier, en se rendant à la Police Judiciaire, suite à la sortie médiatique misérable du Ministre de l’Intérieur de l’époque, Alkache Alhada, qui se muait en procureur de la république pour lancer un mandat d’arrêt contre une personnalité politique de la dimension de Hama Amadou.

Mais, au finish, tout cela n’aura pas suffi et chacun connaît la suite des événements !

Après ce rappel liminaire pour situer les choses, revenons à présent à cette sortie médiatique de l’Autorité morale du Lumana/FA sur une télévision étrangère, en répondant à une question du journaliste qui lui demandait son appréciation de la présence militaire au Niger de certaines puissances occidentales. En effet, à travers cet entretien, l’on découvrait les états d’âme actuels de Hama Amadou qui pointait du doigt l’inertie des peuples face aux dictatures. Pour lui, les peuples ont certainement les dirigeants politiques qu’ils méritent. S’ils consentent au renoncement pour accepter leur destin tel quel, qui viendra alors lutter à leur place pour leur libération ? En revanche, s’ils estiment qu’il vaille se battre pour leur dignité, c’est leur choix libre, pour parler comme Jean-Paul Sartre. Le dirigeant politique n’est que le phare, la lanterne pour guider l’action populaire vers le succès. Il n’y aurait jamais eu de Révolution en France, en 1789, sans doute, si le peuple français de cette époque n’avait été animé de la volonté et de l’ambition de mettre fin au despotisme royal de Louis XVI. Ni Robespierre, ni Condorcet, ni Napoléon Bonaparte, ni Jean François Dugommier et autres grandes figures révolutionnaires françaises, n’auraient suffi à eux seuls pour mener cette aventure extraordinaire sans l’adhésion des couches populaires du pays. Hama Amadou, sans doute grand connaisseur des dynamiques politiques et sociales du monde, n’est pas un déçu de la politique, comme certains seraient tentés de le penser. Le personnage croit toujours à l’idéal politique, mais demeure dubitatif face au déclin progressif du militantisme politique véritable, c’est-à-dire la perte de la foi authentique dans les causes politiques. Malheureusement, lorsque l’achat des consciences, l’adhésion politique contre postes politiques supplantent le militantisme originel, celui qui est fondé sur la confiance que le militant témoigne à l’égard du dirigeant, alors, la politique passe à côté de son objet premier, à savoir servir l’intérêt général. Voilà, en fait, le dégoût actuel de Hama Amadou qui n’aurait jamais imaginé, un seul instant de sa vie, que son arrestation et son emprisonnement passeraient comme simple lettre à la poste. Tout près de chez nous, au Sénégal, regardez l’exemple de l’opposant politique, Ousmane Sonko, dont le procès a ébranlé le pays. Au Pakistan, l’arrestation récente de l’ancien Premier ministre, Imran Khan, avait déclenché des émeutes incontrôlables dans le pays, obligeant la Justice à déclarer cette arrestation irrégulière. Or, lorsque l’on regarde le cas de Sonko, l’on constate qu’il n’a même pas la dimension politique d’un Hama Amadou, et qu’il n’est, tout simplement, que le produit des maladresses politiques de Macky Sall.

Voilà d’où venait le spleen politique auquel l’Autorité morale du Lumana/ FA est en proie, ces derniers temps, ce fatalisme politique qui caractérise le militantisme d’aujourd’hui, et qui consisterait à tout attendre du leader politique pour faire du miracle ! On dit souvent que l’avenir appartient toujours aux gens qui se réveillent tôt le matin et qui s’interrogent sur quoi demain sera fait et se donnent les moyens d’apprivoiser ce lendemain avec assurance. La procrastination et les hésitations servent toujours les mentalités défaitistes. C’était ce cri du cœur que voulait exprimer, véritablement, Hama Amadou dans ce langage sibyllin, dans le but de fouetter l’ardeur militante des uns et des autres afin de briser les chaînes du fatalisme politique qui serait sur le point d’entamer l’esprit combatif des troupes lumanistes en particulier, des citoyens nigériens, en général.

Aliou Badara