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Le Niger chouchou de l’Union Européenne : Le Bazoum en ballotage d’intérêts

Au moment où certains pays de l’Union Européenne durcissent le ton contre les putschistes notamment au Mali et au Burkina Faso, le Niger semble être devenue la coqueluche des temps modernes pour cette Union. En effet, presque la totalité des pays de l’Union ont maintenu leurs sanctions contre le Mali malgré l’avis contraire du Conseil de Sécurité, motivé par le véto, notamment de la Russie et de la Chine. Des échos évoquent, entre autres, le désengagement déjà matérialisé au Mali de la coopération danoise à travers la suspension des financements pour plusieurs projets de développement. D’autres pays de l’Union Européenne auraient déjà fermé le robinet. Pour le Burkina Faso, on est encore en négociation ; cependant, ça risque d’être la même situation ; à moins que la France ne lève un tout petit peu le pied. Dans tous les cas, il faut comprendre que certains pays qui ne sont pas très en odeur de sainteté avec la France sont un peu mal vus par l’union Européenne ; ou même menacés de sécheresse par les tentacules de la pieuvre. Au même moment, notre pays le Niger devient subitement le centre d’intérêt de la politique de cette Union, bénéficiant d’appuis insoupçonnés. Pour beaucoup d’observateurs, ce regain d’intérêt subit pour notre pays est en lien direct avec certaines conséquences de la situation née de la crise malienne. Dans un premier temps, il faut signaler la décision avouée et affichée de la France non seulement de faire regretter au Mali sa décision de chasser ses troupes et celle de l’Union de son territoire mais aussi de faire du Niger le point de chute de sa nouvelle stratégie, notamment de faire réinstaller ses troupes dans notre pays. En effet, après la volte-face du Mali, les soldats français et ceux de l’Union Européenne de l’opération TAKOUBA auraient pour terre d’accueil le Niger. Nonobstant le refus présumé du Président Bazoum d’accueillir les troupes de TAKOUBA après avoir accepté celles de la France, le Niger reste toujours dans la ligne de mire de la stratégie de l’Union. Comme on dit chez nous « Chaque homme a son prix », à plus forte raison un pauvre, un pays démuni comme le Niger classé régulièrement dernier de la planète.

Ceci dit, dans la nouvelle stratégie géopolitique de la France, le Niger reste une cible privilégiée. De plus, avec les yeux doux que les bases américaines et allemandes sont en train de faire à nos militaires, le Niger devient pour la France le pays qu’il ne faudrait pas perdre, même si tous les autres pays de la CEDEAO y passaient. N’oublions quand même pas que la position géographique du Niger en fait un pays de choix pour les puissances étrangères qui en ont fait un appui stratégique pour leurs forces aériennes en transit sur les pays Arabes et même européens ; n’oublions pas aussi que l’essentiel de notre uranium va à la France ; enfin n’oublions pas que notre pétrole, l’un des plus propres est très prisé par la communauté internationale. En tout cas, des investissements fleuves sont enregistrés au Niger ces derniers temps. On peut citer à titre d’exemples 34 milliards de francs CFA dans le cadre d’un accord avec la Banque Mondiale pour le renforcement de la résilience du système alimentaire, ; dans cet ordre d’idées, le Premier Ministre Ouhoumoudou a reçu la Directrice des opérations pour le Sahel de la même Institution prestigieuse qui a annoncé que qu’en trois ans, le programme de la Banque Mondiale au Niger est passé d’un (01) milliard à quatre (04). Les enjeux se multiplient donc autour du Niger. Tous ces enjeux font que la France s’accrochera toujours à ces intérêts gigantesques qu’elle défend au Niger. C’est dans cette optique et en voie très forte de l’Union Européenne, qu’elle est en train de mobiliser les pays les plus influents de l’Union en faveur du Niger. Certes, le Danemark, le royaume de Suisse, la Belgique, le Royaume uni et celui ce Luxembourg sont conséquemment présents au Niger dans des projets très salutaires. En témoigne leurs contributions décisives au sein du Fonds Commun sectoriel de l’Education (FCSE) qui fait quasiment vire le secteur éducatif nigérien. Cependant, ces dernières semaines, on a observé un ballet diplomatique inédit de certains de ces pays au Niger, accompagné de déblocage de plusieurs milliards de francs en faveur de plusieurs secteurs de développement. L’acte le plus significatif a été la visite du 07 au 09 Février 2022 au Niger du Président de la Confédération Suisse Ignazio Cassis, accompagné de la Présidente du Conseil National, Irène Kälin et du Président de la Croix Rouge Internationale. Fait inédit au Niger, cette importante délégation a même séjourné à Agadez où elle a visité un centre de rééducation des personnes handicapées qui reçoit déjà des appuis de la Croix Rouge en matériel roulant. La délégation s’est aussi rendue à Maradi où elle a visité un projet de la DDC qui lutte contre l’analphabétisme et la déscolarisation des enfants. A la suite de cette visite, ce sont des milliards qui vont tomber au Niger à travers plusieurs accords de coopération. Dans la même période, le royaume du Danemark s’est aussi signalé à travers la signature du plusieurs accords de partenariat qui ont fait bénéficié au Niger de milliards de francs. Comme on le voit, sous l’instigation de la France, l’Union Européenne effectue une opération de charme qui en dit long sur les intentions de la France et de ses amis. En tout cas, celui qui en bénéficie pour le moment, c’est bien le Niger. Néanmoins, il faut signaler que tous ces avantages pleuvent dans un contexte où la principale instigatrice, la France ; n’est nullement en odeur de sainteté avec ses anciennes colonies qui sont des amies du Niger avec lequel elles entretiennent des liens séculaires de fraternité. C’est le cas avec le Mali qui partagent avec le Niger une importante communauté ethnolinguistique, à savoir les Zarma-sonraï et les Touaregs. Dans un tel contexte, l’on se demande comment vont désormais se dérouler les relations logiques de : l’ami de mon ami c’est mon ami et l’ennemi de mon ennemi c’est mon ami ? En effet, à bien connaitre la France, elle voudra très certainement passer par le Niger pour châtier le Mali sur certains aspects précis. Si cela ne se produit pas déjà à travers les sanctions imposées par la CEDEAO au Mali. Aux yeux de nos amis comme le Mali, notre pays sera en très mauvaise posture. C’est un très mauvais rôle que la France a toujours fait jouer à un pays précis dans la sous-région pour déployer à bon escient ses plans stratégiques. Nous deviendrons, si nous ne sommes pas déjà, les ennemis de nos voisins mais les enfants chouchous de la France et de ses amis.

Voilà malheureusement la nouvelle posture dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui. Attention ; nous ne sommes pas convoités uniquement par la France. Il y a aussi, heureusement les grands Américains. Il appartient donc à Bazoum de jouer juste ; de savoir où se trouvent nos intérêts et avec qui ils seront au mieux garantis. Tous ces impérialistes sont donc en position fragile par rapport à nous ; il suffit juste de déployer une intelligence utile et profitable.

Article publié le 14 février 2022

Kaillo