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L’air du temps - Sénégal : un autre cas… pour la Cedeao !

Siradji Sanda Onep La situation politique au Sénégal a un air du déjà-vu. L’on se rappelle qu’à la fin de son mandat le 2 avril 2012, le président Abdoulaye Wade a tenté d’avoir un troisième mandat, mais le peuple sénégalais s’est fortement opposé. Et, ironie du sort, Macky Sall était parmi les leaders politiques qui se sont vigoureusement opposés à cette ‘’tentation’’ du président Wade.

Aujourd’hui, c’est le même Macky Sall, président démocratiquement élu qui, après deux mandats constitutionnels, est dans cette logique. Cependant, la décision du président sénégalais semble être un scénario savamment préparé, peut-être de longue date. En effet, devant l’impossibilité constitutionnelle de briguer un 3ème mandat Macky Sall a créé les conditions d’une prolongation de son dernier mandat. Ce processus long a commencé par le discrédit, puis l’emprisonnement de l’opposant le plus farouche Ousmane Sonko. Une tâche dans laquelle, la justice a été fortement instrumentalisée pour créer toutes les misères possibles à ce jeune leader très populaire et connu pour ses opinions plutôt souverainistes, en tout en cas pas très favorables à la métropole.

Une autre étape de ce processus a été la disqualification de plusieurs candidats dont Sonko, Karim Wade, etc., sur fond de manipulations suspicieuses des fichiers de parrainage mais aussi et surtout de suspicion de corruption sur le Conseil constitutionnel.

Sans compter qu’au sein de son parti (l’Alliance pour la République), le président Macky Sall a soutenu pour ne pas dire désigné le candidat le moins côté comme candidat à l’élection présidentielle. En effet, l’ancien Premier ministre Amadou Ba n’a pas fait l’unanimité au sein de la famille politique au pouvoir, poussant certains ténors du parti présidentiel à se porter candidats contre le dauphin du président. Le clou de ce processus a été l’adoption du projet de loi pour reporter les élections jusqu’au 15 décembre 2024. Un projet de loi qui fait suite à un décret du président prétextant des menaces au fonctionnement régulier des institutions. Ainsi, c’est après l’évacuation manu militari des députés de l’opposition, que l’Assemblée nationale a validé à travers un simulacre de vote, le projet de loi à travers lequel, le président Macky Sall prolonge son mandat de pratiquement un an. Cela en contradiction avec la constitution sénégalaise et en violation des dispositions du Protocole additionnel de la Cedeao sur la démocratie et la bonne gouvernance. En effet, l’article 2 dudit protocole stipule en son point 1 : ‘’Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques’’. Et le point 2 du même texte ajoute que ‘’les élections à tous les niveaux doivent avoir lieu aux dates ou périodes fixées par la Constitution ou les lois électorales’’. La décision de Macky Sall de se maintenir au pouvoir intervient pratiquement à la veille de l’ouverture de la campagne électorale. De toute évidence, Macky Sall n’a jamais eu l’intention de quitter le pouvoir le 02 avril prochain. Mais que dit la Cedeao sur cette situation ? Dans un communiqué laconique publié le 3 février, elle dit ‘’prendre note’’ de la décision prise par Macky Sall de s’octroyer une année de plus. Elle le félicite même, pour dit-elle, avoir maintenu ‘’la décision de briguer un 3ème mandat’’. Puis fidèle à ces contradictions, la Cedeao sort un second communiqué le 6 février pour jouer à l’équilibrisme, en tentant insidieusement même de dédouaner le président Sall et insinuant que c’est à la classe politique de maintenir la paix, la quiétude et la stabilité. Normal, elle défend un membre du syndicat ! Quid des parrains de cette fameuse organisation ? Pas de conseil de défense à Paris, encore moins de déclaration de ferme condamnation. Pourtant, la démocratie est en danger au Sénégal avec de graves menaces sur les libertés individuelles et collectives. Le tout pour un seul homme. Son secret pour bénéficier d’un tel mutisme : il est, comme le soupçonnaient déjà de nombreux panafricains, un ‘’bon élève et allié de l’impérialisme français’’. Quoiqu’il en soit, Macky Sall a descendu le Sénégal, au plus bas du piédestal de la démocratie où il trônait pourtant comme un modèle. Le Sénégal est aujourd’hui, un cas pratique pour la Cedeao de prouver si réellement, elle est du côté des peuples. Sera-t-elle à la hauteur ? Rien n’est moins sûr. Comme elle l’a fait avec le terrorisme dans les pays du Sahel, la Cedeao observe et attend…. les directives de ces parrains.

Siradji Sanda (ONEP)
Source : https://www.lesahel.org