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Issoufou Mahamadou : Face aux enjeux du moment, l’urgence est de choisir la voie de la justice

En persistant dans ces mutismes, l’ancien président ne peut que rajouter aux accusations des différents procureurs de la rue qui pensent qu’il serait l’instigateur de tout le mal que le pays a connu sous sa gouvernance, pendant dix ans. Peut-il être certain de n’avoir rien à voir dans les différentes affaires où il a été cité ? Peut-il justifier qu’il ne serait pas ce T3 que la justice américaine accable ? Peut-il apporter la preuve qu’il n’a pas acquis le terrain de la SNTN à Tahoua pendant qu’il dirigeait le pays alors que les textes l’en défendent ? Peut-il nier qu’il n’a pas d’appartement au 10èmeArrondissement de Paris, Avenue Foche, ainsi que le rapporte un journal français ? Peut-il n’avoir rien su de cette affaire du riz pakistanais dans laquelle sa seconde épouse serait confondue ? Peutil ne rien à avoir avec ces châteaux rutilants en bordure du fleuve sur la route du quartier Goudel ? Peut-il rassurer qu’il n’a rien à voir dans le dossier de l’avion présidentiel ?

ujourd’hui, dans les moments que vit le Niger, il ne se passe pas une seule journée sans que l’ancien président Issoufou ne soit cité ou tenu pour responsable de la situation dans laquelle se retrouve le pays. Peut-il savoir combien les Nigériens parlent en mal de lui ? Aucun autre président, dans le pays, n’a été l’objet de telles fixations. Mais l’homme, il est vrai, n’a jamais réagi aux accusations qui sont faites à son encontre, laissant, d’autres réagir à sa place pour tenter de l’innocenter. Comment ne pas plaindre cet homme qui, sortant du pouvoir, se condamne dans une prison ouverte, quand, s’effrayant du peuple, il devrait vivre dans l’isolement ? Encore, caché derrière les armes quand d’autres anciens présidents, ne s’en encombrent pas, marchant dans le peuple, humbles et fiers. Le moment est venu pour lui de se rendre compte du fait que l’heure est grave pour ne plus se complaire dans ces silences où il est allé s’exiler et qui n’arrangent rien à sa situation et à son image déjà gravement écornée. Les choses se sont d’autant compliquées pour lui que ceux qui le dépeignaient comme le meilleur démocrate du continent, la France en l’occurrence, ont fini par découvrir, à leur corps défendant, un autre visage du modèle qu’ils avaient eu tort de célébrer un peu trop rapidement, l’auréolant, pour l’inciter à partir, de titres pompeux et de médailles de pacotille-dignes du personnage Meka-conçues pour la promotion de son rang fabriqué de démocratemodèle qu’on découvre finalement invendable. Pour couper court à tant de supputations et afin de laisser à la postérité une image plus reluisante de lui que celle que l’on a aujourd’hui, il doit se résoudre à sortir de son hibernation pour se mettre courageusement à la disposition de la justice pour se laver de tout soupçon. Un tel courage, s’il pouvait l’avoir et si tant est qu’il peut ne rien se reprocher dans la gouvernance qui a été la sienne, aura le mérite de faire tomber une certaine tension, d’apaiser des rancoeurs. Au même moment, il aura facilité la tâche au CNSP qui pourra apprécier son courage politique à se laver de tout ce que, à tort ou à raison, l’on accable dans le pays et ailleurs. En quittant le pouvoir, il doit laisser une certaine image de lui qui ne soit pas celle que les Nigériens se font de lui et que certains de ses amis à l’International et, notamment notamment, du continent, gardent de lui depuis les événements du 26 juillet 2023. Plus que des châteaux, plus que des comptes garnis, plus que de vastes domaines et autres objets de luxe, ce qu’on laisse de plus important à des héritiers, c’est un nom.

En persistant dans ces mutismes, l’ancien président ne peut que rajouter aux accusations des différents procureurs de la rue qui pensent qu’il serait l’instigateur de tout le mal que le pays a connu sous sa gouvernance, pendant dix ans. Peut-il être certain de n’avoir rien à voir dans les différentes affaires où il a été cité ? Peut-il justifier qu’il ne serait pas ce T3 que la justice américaine accable ? Peut-il apporter la preuve qu’il n’a pas acquis le terrain de la SNTN à Tahoua pendant qu’il dirigeait le pays alors que les textes l’en défendent ? Peut-il nier qu’il n’a pas d’appartement au 10èmeArrondissement de Paris, Avenue Foche, ainsi que le rapporte un journal français ? Peut-il n’avoir rien su de cette affaire du riz pakistanais dans laquelle sa seconde épouse serait confondue ? Peut-il ne rien à avoir avec ces châteaux rutilants en bordure du fleuve sur la route du quartier Goudel ? Peut-il rassurer qu’il n’a rien à voir dans le dossier de l’avion présidentiel ? La liste est malheureusement longue. Quelles assurances, peut-il donner aux Nigériens par rapport à l’avion présidentiel, par rapport à la rénovation de l’aéroport de Niamey, par rapport aux nouveaux hôtels, par rapport à la gestion du pétrole ? Où faut-il s’arrêter ?

C’est donc sur bien de dossiers qu’on voudrait que l’ancien président Issoufou aille volontairement devant la justice pour s’innocenter et recouvrer l’estime qu’il avait auprès des Nigériens à un certain moment de son parcours politique. Il doit comprendre que son image, pour l’Histoire, est en jeu et qu’il doit, pour que son honneur soit sauf, décider d’un comportement qui le sorte de son retranchement pour se livrer à la justice, seule capable de le blanchir et de lui rendre son honneur. Mais tant que devront durer ses silences sur d’aussi graves accusations, alors l’on continuera à croire, qu’effectivement, il était impliqué dans la mafia, qu’il en serait même au centre. C’est du moins l’impression qu’il donne aujourd’hui aux Nigériens, or cela ne l’arrange pas. Une certaine fierté doit l’obliger à sortir de cette stratégie peu payante pour affronter son destin. Avec audace.

Les livres d’Histoire parleront de l’homme. Quand on entend ces derniers jours certaines révélations, l’on ne peut croire que jamais un régime n’aura été aussi mauvais comme le sien. Ses proches veulent qu’on garde de lui, l’image du Zaki valeureux, du grand opposant qu’il fut, toute chose impossible avec le recul quand, à l’oeuvre et au pouvoir, on le découvre aussi piètre, manquant de rigueur et de fermeté pour affronter la pègre qui a infesté de bout en bout sa gouvernance. Peut-il avoir compris à quel point Emmanuel Macon avait été déçu de le retrouver dans le complot au point où, l’évoquant, il parlait, décontenancé, de « trahison politique » ? Or, l’image qu’il avait voulu donner de lui en politique n’était pas celle-là. On l’avait entendu, dès les deux premières années de son premier mandat, dire qu’il aurait réussi ce que tous les régimes réunis, en quarante années, n’avaient pas réussi, tellement il manquait de modestie. Mais, voilà que ce qu’il a fait à la tête du pays produit tout le contraire de ce qu’il se voulait : oui, en mal ce qu’il fait en deux mandats, personne n’a pu le faire dans le pays depuis 1960. Terrible vérité.

Mais, pour se racheter, il n’avait besoin que d’aller devant la justice pour se blanchir. Il doit montrer que les biens de l’Etat ne l’intéressent pas. Pour sa réputation, il doit aussi montrer que, dès lors qu’il n’est plus en fonction, il ne peut profiter de manière illégale des biens de l’Etat. On avait appris les premiers jours de son déménagement du palais qu’il serait parti dans ses bagages avec jusqu’à la fourchette, et qu’il aurait recommandé chaque semaine des méchouis pour le confort de sa cour installée à quelques encablures de la présidence. Issoufou Mahamadou, encore pour son image, doit redevenir ce « président normal » qui, ʺdescenduʺ de ses fonctions, repart à la vie, pour vivre parmi les siens dans sa propre maison. Comment peut-on comprendre que tout ancien président qu’il est, qu’il continue à squatter les maisons de l’Etat comme s’il serait un SDF alors qu’il est sorti milliardaire de ses deux mandats et qu’il se serait bâti de grandes maisons, y compris en France, et peut-être aux Etats-Unis aussi. Peut-il avoir peur d’habiter, aujourd’hui, une de ces maisons splendides que la rumeur prétend être sa propriété, de peur que les Nigériens ne demandent justice quand ils savent que la fonction de président ne saurait justifier tant de richesses ?

Issoufou doit donc retourner chez lui tout en payant à l’Etat les années où, ancien président, il est resté à occuper des maisons qui ne lui appartiennent pas. Pourquoi, alors qu’il n’est pas le seul ancien président encore en vie, peut-il seul, occuper de telles maisons, quand les autres, vivent humblement dans leurs maisons, dans les mêmes quartiers où on les avait toujours connus ? Issoufou, a-t-il peur de retourner dans le peuple ? Rien ne peut le distinguer des autres pour avoir ce qu’ils n’ont pas avec l’Etat. Pour avoir dirigé le pays, il ne peut continuer à profiter indéfiniment du pays. N’a-t-il pas vu son ancien Premier ministre, Brigi Rafini, être sidéré, qu’il veuille s’accrocher à ce qui ne lui appartient plus, le pouvoir et ses atours ?

Mahamane Ousmane n’a jamais eu de complexe à retourner vivre dans son quartier et dans son ancienne maison. Ali Saibou aussi. Pourquoi Issoufou devrait-il mériter mieux que sa propre maison ?

Il doit donc avoir l’humilité pour ne plus exiger davantage du peuple qu’il aura d’ailleurs mal servi. En attendant d’en apprendre davantage avec la Coldeff.

Par Mairiga