Issoufou et la France Après les belles noces, le désamour
Comme beaucoup d’autres avant lui, après avoir lâchement servi l’impérialisme contre les intérêts de son peuple, Issoufou Mahamadou est en passe de vivre les heures sombres de sa collaboration avec la France qu’il a servi plus que quiconque cette dernière décennie avec un volontarisme qui avait séduit Hollande, Jean Yves le Drian et Emmanuel Macron. Depuis les déboires de Bazoum Mohamed, l’homme qui lui a succédé à la tête de l’Etat du Niger, plus par sa seule volonté que par celle du peuple et de son parti, nombreux sont les analystes qui s’accordent à dire, à tort ou à raison, qu’il aurait été, par ses impatiences et ses propres calculs, celui qui aurait fomenté le coup d’Etat contre son successeur devenu un allié gênant, depuis que, prenant goût au pouvoir, il nourrit cette ambition de se passer de lui et de mettre en oeuvre sonpropre plan de survie politique, travaillant à se passer des cercles autour de l’ancien président devenu trop encombrant. En vérité, la version selon laquelle Issoufou Mahamadou serait le principal instigateur du coup d’Etat, ne vient que de Bazoum et de ses proches et sans doute qu’ils en savent plus que quiconque pour l’en accabler. Il y a déjà longtemps que des Nigériens, et la presse libre surtout, font entendre que les relations entre les deux hommes, malgré leurs démentis politiciens, ne seraient plus au beau fixe depuis que les deux têtes font embouteillage à la tête de l’Etat. Depuis que les intérêts des deux camps se télescopaient, le PNDS, n’ayant pas prévu de gérer une crise de ce genre en son sein se vantant d’une solidité finalement éprouvée, ne pouvait que regarder, impuissant, l’effondrement de son édifice qu’il a cru être la plus solide des citadelles politiques.
Si les convictions de la France, de Bazoum et de son entourage se fondent sur les proximités d’Issoufou et celui qui fut le Chef de corps de sa garde, l’on peut y voir quelques fragilités à une telle opinion lorsque l’on oublie qu’avant d’être le chef de la sécurité du président de la République, Abdourhamane Tiani est quand même ce soldat au service de la nation, embrassant le métier des armes plus pour la République que pour des individus qui, depuis qu’ils découvraient les intérieurs féériques du pouvoir, oubliaient les engagements qu’ils prenaient pour un peuple, ne pouvant se rendre compte que ceux qui les gardaient, assuraient leur sécurité, les regardent et jugent en silence leur gouvernance jusqu’à ce que, enfin, dans leurs guéguerres, ils découvrent que ces dirigeants n’ont que faire de la nation et de l’intérêt général, se chamaillant pour leurs intérêts L’effervescence suscitée par le renversement du régime témoigne de la profondeur des malaises et de ce que l’armée, toujours aux côtés des peuples, venait les libérer d’une gouvernance désastreuse. Issoufou sait ce qu’il a fait comme mal dans ce pays et ne pourrait pas, alors qu’il est à portée de mains des nouveaux maîtres du pays, condamner le coup d’Etat ainsi que le veulent Paris, Bruxelles et Abuja, conscient qu’il est tout aussi condamnable dans le pays, sinon plus, que celui qu’on renversait et qui ne symbolisait que la maturité du fruit qui tombait sous l’ombre d’un président qui tenait à plaire en même temps à son prédécesseur et au peuple, toutes choses non conciliables dans un pays de malaise. Au contraire, pour desserrer la corde autour de son cou, Issoufou Mahamadou, voudrait faire croire à une certaine opinion qu’il aurait de l’influence pour lever les sanctions contre le Niger alors qu’il n’en a aucun moyen, ses relations s’étant détériorées avec la France qui l’avait soutenu jusqu’à sa fameuse alternance, et même avec les chefs d’Etats recrutés par l’Elysée pour étouffer le Niger. Il voudrait faire croire qu’il serait sensible, lui qui a tant fait souffrir son peuple pendant dix ans, envoyant qui il veut en prison, privant certains Nigériens de travailler pour leur pays, victimes d’une exclusion inique, aux souffrances des Nigériens depuis des mois que les sanctions de la CEDEAO étaient appliquées contre le peuple, sans discernement. Au Niger, en dehors de ses militants fanatisés, personne ne peut le croire capable d’une telle mission, tant l’homme n’a jamais eu le coeur qu’on lui prête, trouvant du plaisir à faire souffrir un autre, tant qu’il peut politiquement ne pas partager ses choix et ses idées. C’est d’ailleurs ce que les Nigériens ont tous compris du sens du sobriquet qui le désigne : Zaki, c’est-à-dire toute la cruauté bestiale attachée au félin. Cette autre face de l’homme, ceux qui l’ont célébré à travers le monde, viennent de la voir, déçu de découvrir les ambiguïtés du personnage sur lequel beaucoup d’hommes se sont trompés pour que, le dernier dont il se serait bien servi – le Général AbdourhamaneTiani – ne tombe dans son filet pour allonger la liste de ses victimes qui, dans bien de cas, sont ceux qui lui ont fait le bien. Inutile de citer des noms quand les Nigériens savent tout de la réputation du Lion.
Et quand l’enfant chouchou de la France se brouille avec ses amis…
L’on apprend, depuis quelques jours, que l’ancien président Nigérien, par la voix de ses conseils, envisage de porter plainte contre la diplomatie française, notamment contre l’ancien ambassadeur, Sylvain Itté, qui a pourtant été celui-là que la France envoyait dans le pays alors qu’il était président pour l’aider à assoir l’alternance commandée par Paris qui voudrait que Bazoum lui succède, lui qui, apprend-on de certaines sources, travaillerait, depuis des années, pour les renseignements français. Ces militaires qui les côtoient tous les jours, peuvent-ils ne pas s’agacer de ces comportements égoïstes de dirigeants qui ne voient pas au-delà de leurs personnes pour ne vouloir tout que pour eux seuls ? Ce n’est d’ailleurs pas pour la première fois, chaque fois qu’il traverse des zones de turbulence dans sa carrière politique qui s’assombrit depuis des mois qu’il perdit le volant d’un Niger, qu’il se sert de tels scoops pour divertir l’opinion nationale et internationale, faisant croire en sa volonté de « porter » plainte, sans jamais le pouvoir. On se rappelle qu’il y a quelques mois, quand, après le coup d’Etat du 26 juillet l’on apprit que les justices américaine, belge et française enquêtaient sur l’Uraniumgate et que les Américains découvrirent un mystérieux T3 qui aurait les profils d’Issoufou, l’ancien président nigérien avait menacé de porter plainte sans qu’on ait eu écho des suites de cette initiative assez audacieuse quand on sait qu’il pourrait bien, en osant, se mettre la corde au cou, sachant bien qu’il ne pouvait pas être clean dans une telle affaire où, les tractations, de bout en tout, s’étaient passées à partir de son cabinet qui n’en était pas obligé, car une telle transaction ne peut relever de ses compétences. Les Nigériens avaient voulu qu’il fasse ce pas vers la justice américaine pour lever tout soupçon autour d’un possible rôle qu’il pourrait avoir joué dans cette scabreuse affaire. Mais, les choses semblent se tasser. Et, on comprend que pour l’homme il y ait de quoi se méfier d’une telle démarche risquée. Son affaire de plainte n’est donc qu’une menace.
Après l’audition de l’ancien ambassadeur français au parlement français, accablant l’ancien président Issoufou qu’il accuse d’être la source des malheurs de Bazoum Mohamed, l’on apprend qu’il revenait encore à la charge, avec la même menace, celle de porter plainte et, maintenant, contre un de ses amis, Sylvain Itté, qu’il accuse d’avoir porté contre lui un « tissu de calomnie » qui vise à le discréditer en jetant l’opprobre contre lui.
Ainsi, alors qu’Issoufou devrait se chercher au Niger où il n’a plus bonne presse, et où il a désormais contre lui, au-delà d’une opinion large des Nigériens, certaines parties de son parti, il sait qu’à l’extérieur du pays où il était souvent loué, par ses manipulations, aujourd’hui il n’est regardé que comme un contre-modèle de gestion, et ce depuis que l’on a fini par voir la face hideuse du personnage au point où ses amis, de par le monde, ne veulent plus lui serrer la main, beaucoup ne prenant plus ses appels indiquent certaines sources. On a entendu, comment, ulcéré par les comportements d’un homme qu’il a eu tort d’adouber, Emmanuel Macron, parlant de son ancien ami, évoque, non sans être gêné, de « trahisons politiques » qui auraient coûté à Bazoum son fauteuil et la situation et l’inconfort qu’il vit depuis une demi-année.
Tous les plans sont tombés Issoufou Mahamadou est aujourd’hui un homme perdu. Le mal qu’il a fait au Niger et à sa démocratie, gérant le pays comme un jardin dont il aurait hérité, il doit bien aujourd’hui rendre compte, ayant certainement eu tort de tout vouloir pour lui seul, avide de luxe et de bonne vie, se construisant sur les misères stratifiées une fortune déraisonnée que la Coldeff pourrait rapidement cartographier pour en révéler l’étendue insoupçonnée. Alors que même ceux qui l’ont servi ne peuvent plus le comprendre et le défendre au regard de l’ampleur du saccage qu’il a laissé faire autour de lui, voilà que le monde lui en veut d’avoir « trahi » même si après, le contrôle des manettes peut lui avoir échappé pour être la victime du « monstre » qu’il voulait être pour mordre un autre.
A creuser un trou, enseigne et avertit un adage du terroir, il faut se garder de le faire trop profond et large pour ne pas tomber dedans. Issoufou a refusé les grandeurs qu’on lui voulait, mais avide d’argent et de brillance, de luxe et de vanité, il est tombé bas, perdant à jamais ses grandes amitiés à travers le monde.
Par Mairiga (Le Courrier)