Editorial : Sursaut pour la patrie
Cet article d’opinion, signé par le journaliste Ali Soumana et initialement publié dans Le Courrier, est reproduit ici avec son autorisation. Il propose une réflexion critique qui n’engage que son auteur, mais dont nous estimons qu’elle mérite d’être lue et méditée dans le cadre du débat public.
Dans le pays, les choses semblent piétiner. La machine se grippe et l’on a l’impression que ça patine, que le train s’embourbe et que la locomotive, haletant d’hésitation et de doute, avance laborieusement. La transition va à pas lents et l’on peut voir depuis quelques jours la télévision nationale manquer de quoi nourrir ses plages de journaux, trouvant peu à dire sur ce qui fait avancer le pays comme si tout, dans le pays, se bloquait. Le moment, après les temps de rêves et d’euphorie, laisse place au désenchantement et aux plus sceptiques, le désespoir : le pays va encore mal. Il retombe dans les mêmes douleurs, les mêmes déchirements. Pourtant évitables.
Il y a quelques jours, beaucoup de gens sortaient de leurs silences et de leurs réserves et alertaient : la transition risque de se perdre. D’autres ont-ils réussi à la détourner ? Que nous est-il arrivé pour que nous sombrions aussi facilement alors qu’hier, nous étions tous ensemble, fiers de mener le combat, d’affronter notre destin, pleins d’espoir ? La question est poignante et sans réponse. Les Nigériens se la posent, interrogateurs face à l’affadissement de la transition qui perd de sa vigueur, de son énergie et sans doute aussi, de ses convictions. C’est comme si quelques Al Qnut la rattrapaient pour lui faire payer ses dérives, son manque d’audace à affronter les grands défis du pays et à aller dans le sens de ce que veut le peuple.
Il n’est pas facile de construire un État et surtout de refonder une nation, de transformer et de changer les mentalités, de faire en sorte que naisse un nouveau citoyen. L’oeuvre n’est pas donnée à tous. C’est pourquoi il importe aujourd’hui d’agir à réajuster la gouvernance, à reposer l’action sur de nouvelles valeurs pour promouvoir une gouvernance vertueuse, celle par laquelle les peuples fiers, célèbrent leurs héros et leurs libérateurs.
Notre transition est à un point crucial de son évolution. Il faut la sauver des égarements en nous élevant tous à la magnificence de ce combat noble que nous menons pour bâtir un avenir radieux à notre pays. Le peuple est disponible. Il ne demande qu’à être fixé sur le même objectif avec lequel l’on avait réussi à le mobiliser, à l’engager autour de la révolution enclenchée. C’est bien tout ce qu’il demande. Rien d’autre. Aussi est-il important de savoir l’écouter pour entendre ses angoisses et aller dans le sens de l’Histoire qu’on ne saurait contrarier.
Le peuple a indiqué une orientation. Il ne faut pas l’ignorer car marcher avec le peuple reste la seule assurance pour un prince qui aspire à laisser à la postérité le beau souvenir de sa gestion, de ce qu’il fit pour les humbles à la tête d’un État.On peut entendre quelques gémissements dans le peuple. C’est le cri de leurs peurs ; les frayeurs de leurs coeurs qui battent la chamade : où allons-nous finalement, se demandent-ils, angoissés ? Il faut donner à ce peuple des raisons de sourire et d’apprendre à croire à la vie et à la politique qui est quand même un métier noble. Laissons nos nuits s’éclairer avec les étoiles de nos rêves.
Par Ali Soumana (Le Courrier)