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Éditorial : Niger, vers une refondation historique et un nouveau départ - Par Ali Soumana

Ali Soumana - Le CourrierLe Niger revient. Depuis les événements du 26 juillet 2023, marchant pour de nouvelles épopées. Il est sur la voie de sa refondation, se reconstruisant sous la houlette d'une armée qui, depuis qu'elle avait pris l'habitude d'investir le champ politique en 1974, venait, contrariée par les contextes politiques délétères, pour mettre de l'ordre, et comme dirait un autre, pour " prendre ses responsabilités historiques ", face à un peuple dont on a si souvent oublié les attentes dans l'action politique. Ce pays doit donc changer. Mais pour qu'il change, il faut que ses hommes changent, que ses dirigeants changent, et notamment ses responsables, civils ou militaires, à qui incombe la responsabilité de l'action publique.

Notre rôle est de rappeler ce besoin immense de changement afin d'accompagner ces mutations profondes souhaitées dans les mentalités nigériennes. Nous défendrons toujours des valeurs que notre pays, par le pervertissement de la démocratie, a fini par abandonner, pour promouvoir des contrevaleurs qui ont tout détruit dans le pays, jusqu'à notre cohésion. Nous critiquons donc les actes des hommes, qui qu'ils soient, et qu'ils en souffrent, nous importe peu, l'essentiel étant pour nous, de ne les viser qu'au travers de leurs responsabilités publiques, tout en épargnant la part privée de leur personnalité. C'est ainsi que nous avons critiqué la gestion sous les Renaissances que le pays a connues, non parce que nous ne pouvions pas être capables d'aimer ceux qui dirigeaient à l'époque le pays, mais parce que les actes qu'ils posaient, menés au nom de tous, sont à l'antipode des valeurs de la République. Jamais, dans ce pays, l'on a su que ceux qui nous dirigeaient avaient aussi des enfants qu'ils pouvaient aussi, comme tout bon père, aimer et chérir, prenant - car imbus de leur personnalité - la précaution de ne pas mêler la famille dans la gestion publique, l'Etat ne pouvant pas être la famille. Qui, dans ce pays, connait les enfants d'Ousmane, de Salou Djibo, de Kountché, de Diori, au-delà de celui qui venait en politique ? Personne. Et pourtant ils en avaient tous !

Depuis la dernière décennie, ce sont les fils et les filles, les épouses et d'autres de la famille qui venaient, profitant de soutiens parentaux, pour venir s'agglutiner autour de l'appareil d'Etat afin d'en profiter. Les gens aiment faire profiter les leurs, non pour qu'ils soient des bâtisseurs de la nation. On comprend que nous combattions certaines pratiques qui reviennent et que nous avons toujours décriées, car n'étant pas de l'ordre de ce qui peut aider les nouvelles autorités à réussir la refondation du pays sur de nouvelles valeurs qu'il nous faut réincarner si tant est que nous voulons exister comme nation et comme République.

Nos critiques ont blessé, c'est tant mieux. Il n'y avait qu'à ne pas commettre de tels actes pour ne pas avoir à souffrir de la critique de la presse. C'est cela notre but : que les hommes et les femmes de ce pays, se conduisent en dignes fils et filles, capables de s'élever à la hauteur de leurs responsabilités publiques. Ce que nous disions sur un autre, était pourtant vérifiable, même quand quelques menus fretins, qui, souvent, en jouant à l'avocat des causes perdues pour défendre leur pain sucré en passe de se mouiller, peuvent se rappeler leur médiocrité, notamment quand, dans leur parcours syndical, ils ont tragiquement échoué avec les travailleurs de leur secteur qui refusent de leur renouveler un mandat syndical qui fut un fiasco, incapables en même temps de contredire nos allégations pour défendre leur cliente, pardon, leur patronne, sinon que de parler vaguement, de " contrevérités " qu'ils ne peuvent démonter. Mais c'est leur rôle, peut-être. Dans la noblesse de nos propos et dans la ligne d'une éducation qui reste dans la magnanimité, nous avons refusé de rabaisser notre travail pour ne jamais insulter un autre. Et peut-être que les chiens, s'il y en a, n'aboient que sur les voleurs et les malfaiteurs.

Mais passons…

Comme hier, aujourd'hui et toujours, nous restons un journal responsable qui, plus, reste un journal d'investigation que l'on ne saurait intimider, ni instrumentaliser. Cela, pour que ce pays change. Ces dernières décennies, l'on a trop galvaudé notre réputation de Nigériens, " gâté " avec tant de salissures notre nom que Diori, Ali Saibou, Kountché, Tandja, Baré, anoblissaient. On ne vient pas au pouvoir pour servir sa famille, mais pour servir un peuple. C'est le sens de l'action publique. C'est des tendances dangereuses vers lesquelles nous poussait l'ancien régime. Il faut faire attention à ce que cela ne nous perde ! Et nous alertions.

Il faut que l'on change dans ce pays. C'est, du reste, le défi de notre époque et nous répondons à cet appel de l'histoire. Nos critiques ne sont fondées sur aucun désir de faire le mal, de blesser des gens, mais d'alerter sur les avanies et les vanités des uns et des autres afin de les amener à être meilleurs. Ceux qui ne veulent pas changer pour être dans les dynamiques nouvelles en sont naturellement allergiques parce qu'ils ne peuvent aimer que ceux qui, aux choix mercantiles, leur servent des éloges intéressés, mais factices. Ce ne sera jamais notre job.

Le CNSP est venu, au grand bonheur des Nigériens normaux, pour la rectification, pour la refondation de ce pays traumatisé. Il faut l'aider à avancer dans ses choix par les bonnes manières. C'est la seule caravane qui vaille et qui passe. Et chacun finira par l'apprendre à ses dépens.

Le CNSP a la chance de rentrer par les grandes portes de l'Histoire. Il doit la saisir.

Ali Soumana ( Le Courrier)