ÉDITORIAL : Consolider l'héritage de Hama Amadou - Par Ali Soumana
Le Président Hama Amadou n'est plus. Il a fait le grand voyage sans retour, libérant le champ politique à ses adversaires et à ceux qui l'ont aimé et accompagné dans ses luttes. Il laisse derrière lui un grand parti, de grands hommes, de grands rêves avortés, un immense héritage politique difficile à porter, quand sa carrure pouvait manquer à tous pour poursuivre ses combats. On savait que son parti était malade depuis quelques temps quand, forcé à l'exil, d'autres voulurent le remplacer vivant à la tête de sa formation politique dont on peut croire qu'il ne pouvait pas survivre à sa disparition, quand tous, pour justifier leur adhésion au parti, ne convergeaient que vers sa personnalité, et la hargne qu'il avait à croire à ses idées et à se battre pour elles et à se mettre résolument au service de son pays. Son charisme avait fasciné pour lui bâtir une aura qui n'a jamais été démentie, malgré les épreuves endurées.
Aujourd'hui, le contexte politique qui mit en mode off les activités des partis politiques ne peut permettre, après le deuil, de remettre de l'ordre dans le parti, de restructurer le parti, de lui trouver un nouveau chef et de nouvelles orientations. Avant d'y arriver, il urge que les sages du parti dont bon nombre n'ont plus aucune ambition politique coachent le parti pour l'aider à se relever de l'affliction, pour reprendre confiance, notamment en repensant son discours pour rassembler, sans aliéner les convictions premières, originelles du parti et de son regretté leader.
Ce parti avait fondé beaucoup d'espoir, il avait amené beaucoup de Nigériennes et de Nigériens des quatre coins du pays à communier, à marcher ensemble, à croire au même idéal et au même combat politique, pour refonder un Niger nouveau fait de progrès et de justice, d'humanisme et de fraternité. C'est cet engagement qu'il faut maintenir, ce combat qu'il faut poursuivre et qu'il faut absolument gagner pour mériter la relève. Les Nigériens regardent et voudraient croire que le parti ne manque pas de grands hommes pour maintenir le cap, pour rassembler, comme Hama Amadou a su le faire, pour le seul intérêt du parti et surtout du Niger qui, après que tous les partis se soient discrédités, voudraient trouver un cadre fédérateur, pouvant reconstruire ce pays autour de valeurs nouvelles qui ont fondé les convictions du grand homme que les Nigériens pleurent depuis des jours.
C'est l'ultime pari que le parti doit gagner pour honorer la mémoire de son défunt Président dont le patriotisme déborde, mais aujourd'hui au milieu des anges qui l'accueillent pour se reposer en paix.
Abreuvé aux sources du patriotisme du général Kountché, puis nourri aux flancs d'un Djermakoye qui a été, pour lui, le sauveur et l'inspirateur d'une politique de l'humanisme et du pardon, inspiré du consensus du grand constructeur de la Société de développement de Zaman Lahiya, Hama Amadou avait énormément à apprendre à notre époque où le champ politique grouille de haines inouïes, et de croc-en-jambe, d'inhumanités féroces qui ont dégoûté tant de Nigériens de la politique. Il est donc possible de faire de la politique autrement et c'est cette élégance politique qu'il faut partager, legs de l'homme qui partait et que son parti doit perpétuer. Il avait montré qu'il est possible de pardonner, de marcher sans rancune, le coeur ouvert, avec même ceux qui vous ont souvent combattu et voulu votre destruction. Il est possible de civiliser la pratique politique. C'est le prochain combat de ses héritiers. Ils ne peuvent pas - ils ne doivent pas - le trahir. En attendant, en hommage à l'homme d'Etat exceptionnel et grand serviteur du peuple que fut Hama Amadou, il faut que le CNSP, dans sa logique de rebaptisation des grandes places et avenues du pays, songe a nommer une grande rue, ou une Ecole prestigieuse du nom de Hama Amadou.
Ali Soumana