Dans le traquenard de l’Histoire : Les ténors du régime déchu s’alarment déjà de la prison
Jamais, même en régime d’exception, les Nigériens n’ont connu de traque comme sous la Renaissance où, forts du pouvoir, les princes, pour un rien, envoient des hommes, et même des artistes et journalistes en prison, pour leur opinion et ce, pendant que les gros voleurs, notoirement connus, en sont absouts, brillants de rondeurs au milieu des misères du peuple. Ils avaient cru qu’ils étaient forts pour l’éternité comme Dieu, ou en tout cas qu’ils en étaient devenus le substitut pour s’arroger un droit de vie et de mort sur tous les Nigériens. Pour un rien, on partait en prison. Nouhou Mahamadou Arzika peut s’en souvenir, lui qui, avec Ali Idrissa, Maikoul Zodi , Gamatié Mahamadou et Bana Ibrahim de la société civile, sans savoir pourquoi, partait en prison pour en sortir plusieurs longs mois après, à la suite d’un non-lieu incompréhensible alors que des précautions judiciaires auraient pu éviter une privation de liberté en accordant, parce que cela est aussi dans la loi, une liberté provisoire qu’on ne pouvait donner, sous Issoufou Mahamadou, qu’à ceux qui lui font allégeance ou qui sont de son clan. Kassoum Moctar est un bon exemple de ces injustices qui ont marqué les Nigériens. Et Certains, comme Ali Soumana et Baba Alpha, gardent des mois de prison avec l’ancien régime. N’est-ce pas Bazoum, vous qui étiez si fier de régler de comptes à ceux que Hassoumi Massaoudou appellent vos « ennemis » ? Mais, voilà que depuis le renversement du régime le 26 juillet 2023 avec un certain nombre de ténors du système qui se sont retrouvés en prison, l’on apprend, de sources crédibles, qu’enfin certains apprécient les douceurs – pardonnez l’ironie cher lecteur – de la pison, au point de s’en alarmer, vivant mal leur isolement alors qu’ils ne savent pas quand tout cela devrait finir et, ce, sachant bien que la Coldeff travaille à rajouter à leur situation qui ne peut que se compliquer davantage quand, on apprenait du Président Tiani, il y a quelques semaines, qu’il ne protégera personne, coupant court à certaines rumeurs de complicité avec certains milieux de l’ancien régime.
« Un jour on est le chasseur, un autre on est la biche….
Ce ne sont pas les propos d’un grand philosophe mais d’un homme qui a trop appris de la vie et qui, venant, avec audace, à la conférence nationale alors animée par les acteurs politiques du système déchu, il réussit par la distraire pour en devenir la vedette dont la parole enregistrée se vendait comme des petits pains à travers le pays. C’était Bonkano qui réussissait ce tour de magie avec les Forces Vives de la nation qu’il peut ainsi dribbler jusqu’à leur faire oublier l’essentiel, eux qui, avides d’argent frais, rêvent de lui soutirer des milliards, car, pour eux, pour comprendre leur rapport des années plus tard avec le pouvoir et l’argent, on ne peut gouverner sans être milliardaire. Ils peuvent aller voir les maisons – si elles peuvent être au pluriel – de Seyni Kountché, de Diori Hamani, d’Ali Saibou, de Mamane Ousmane, d’Ibrahim Baré Maïnassara, de Wanké, de Salou Djibo, de Tandja Mamadou, pour comprendre avec la vie qui est celle de leurs familles qu’ils laissaient, si le pouvoir peut enrichir dans ce pays pauvre tant qu’on peut avoir ce sens noble du pouvoir. Et de servir son peuple. On savait pourtant qu’ils finiraient par être rattrapés par l’Histoire et qu’un jour viendra où, devenant enfin la biche, un nouveau chasseur les poursuivra jusqu’à leur dernier retranchement. D’ailleurs, Ayouba Hassane, alors Secrétaire Général du SAMAN, ne les avait-il pas avertis, quand son syndicat demandait justement au magistrat suprême de l’époque – Issoufou Mahamadou – de mettre à la disposition de la Justice un certain nombre de personnalités de son régime aujourd’hui déchu ? Le temps est venu sans doute de comprendre qu’il fallait être humble dans le pouvoir car l’on ne peut jamais être le plus fort tout le temps. On comprend de ce point de vue que des gens comme Issoufou Sidibé s’agitent pour prétendre soutenir, sans doute pour monnayer, à l’heure des angoisses, leur soutien contre l’impunité qu’ils voudraient pour le patronat politique qu’ils servaient.
Pourtant, dans le bateau ivre de la Renaissance, il semble qu’il y a de grands philosophes qui auraient pu alerter qu’il fallait faire attention car l’homme, être mortel, n’a pas toujours la maîtrise des commandes de l’Histoire pour décider de comment les choses devraient finir. L’homme, dit la philosophie de l’Histoire, n’est qu’une minable victime de l’Histoire ; il aura beau croire qu’il est puissant et intelligent à la diriger, il comprendra par des pondérables non maitrisables, qu’elle finit par lui échapper pour se voir broyé par l’impitoyable et terrible machine du destin. Qui a cru que les choses au Niger allaient se passer ainsi et surtout à une date si proche, alors que Bazoum rêvait de projets et de voyages infinis à travers le monde, humant les délices inespérés du pouvoir ayant fini par détruire ses lucidités politiques et philosophiques ?
Temps des remords ?
Aujourd’hui, bien de gens qui avaient tant d’arrogances pour avoir à gérer le pouvoir et surtout pour avoir amassé tant d’argent, en ramenant en replay leur vie de prince qu’ils vivaient naguère dans un Niger qu’ils avaient cru avoir conquis et dompté, pourraient vivre le remords de leurs insouciances, de leur refus à écouter les critiques qui se faisaient autour d’eux et dont l’un des premières venaient d’un homme qui avait accepté de soutenir, Hama Amadou, mais qui avait fini par rentrer dans le collimateur du système qui lui rendait ainsi le prix de ses libertés de ton et sa liberté de pensée dans un système qu’il voulait aider à réussir afin de montrer aux Nigériens qu’ils peuvent faire confiance à leur classe politique et surtout à recréer le lien de confiance des Nigériens avec la politique et avec la démocratie. Il n’y a pas un seul des caciques de l’ancien régime, en prison, ou libre encore dans le pays ou en exil, qui ne regrette pas sa façon de faire en politique depuis que le pouvoir leur donnait des arrogances sans bornes, n’ayant de respect pour personne jusqu’à donner à certains autres Nigériens qui n’étaient pas politiquement avec eux l’impression de n’être pas des citoyens reconnus, qu’ils n’avaient aucune place dans le pays, ni dans sa démocratie, condamnés à vivre en marge des affaires du pays, victimes d’exclusion sauvage dans l’administration pourtant tenue dans bien de cas par des minables qui y ont développé la corruption et la concussion, le passedroit et l’affairisme. Aujourd’hui, tout le monde peut avoir compris que le CNSP sait que dans ce qui est arrivé à ce pays, Issoufou Mahamadou serait l’épicentre pour ne pas l’en exonérer de répondre de certains actes. Pour beaucoup de Nigériens, si le régime avait tant besoin de le protéger sans doute qu’il l’aurait laissé sortir du pays parce que, quand même, ce n’était pas contre lui, personnellement, que le coup d’Etat du 26 juillet 2023 se faisait.
Mais surtout, peuvent-ils avoir l’humilité, quand c’est sur du faux qu’ils envoyaient bien de Nigériens en prison, qu’ils causaient des torts à des innocents et qu’on ne peut ainsi gouverner une cité ? Il fallait gouverner doucement et, aujourd’hui, avec le recul, ils pourront comprendre que s’ils étaient arrivés au pouvoir, ce n’était pas par la force. Le 26 juillet leur aura montré qu’ils n’avaient pas la force et qu’une humilité pour servir avec noblesse la nation les aura mieux protégés car, ainsi, ils auraient eu, ce que Machiavel, le dieu des socialistes nigériens, a enseigné, lui qui enseigne dans Le Prince que même gouvernant avec les armes, sans les coeurs du peuple, un prince ne peut gouverner. C’est dire qu’ils oubliaient que les deux choses essentielles n’étaient pas avec eux : la force et l’amour du peuple qui les a d’autant détestés que jamais des régimes n’auront été aussi impopulaires. Peuvent-ils croire, quand ils gardaient les milliards pour eux, leurs enfants et pour leurs épouses, laissant quelques subsides dérisoires à la hiérarchie de l’armée qu’ils pouvaient la corrompre au point de lui faire oublier les idéaux pour lesquels ils se mettaient sous le drapeau pour servir la République ? Pour ceux qui le savent, le discours du général Tiani à la prise du pouvoir ne peut surprendre. C’est du soldat, pur et vrai. Tout autre sacrifice n’a de sens que celui dû au drapeau. A la République ! Comme quoi, le mal fait au peuple se paie toujours car le dernier mot lui revient toujours.
Par Mairiga (Le Courrier)