Skip to main content

Benin/ Niger : L’impossible dialogue entre Cotonou et Niamey ?

 Il y a quelques jours, le Benin, par un discours de son président au parlement où il dressait l’état de la nation béninoise, avait fait savoir qu’il souhaite maintenant, ressouder et raffermir ses relations avec les pays où il y avait eu des coups d’Etat et, notamment, avec le Niger, l’un de ses grands voisins et partenaires économiques. L’intention, si tant est qu’elle peut être sincère, est tout à fait louable. Mais, comment croire à la repentance de votre bourreau, celui- là qui dit être capable de planter un couteau dans votre ventre ? Le Président béninois, sans qu’il ne s’en rende compte, était allé trop loin. Peut-on sensément aller dans une organisation où les acteurs peuvent se liguer pour aller en guerre contre vous ? Quelles raisons peuvent justifier de tels extrémismes pour une organisation dont le rôle est, originellement, l’intégration ? Peut-on donc faire l’intégration par la guerre ? Patrice y a cru et il était des adeptes les plus zélés de cette position irrationnelle que prenaient la France et la CEDEAO contre le Niger. Face à une telle attitude, n’est-il pas juste pour le Niger de s’éloigner d’une telle CEDEAO et de se méfier de ce Benin, du moins de son Président qui venait parler aux Béninois, non aux Nigériens et aux autorités nigériennes ?

L’on a écouté le discours du président béninois qui n’a, du reste, pas surpris. Tout le monde savait que, plus que le Niger, c’est d’abord le Benin qui souffrait des sanctions que Patrice Talon faisait appliquer dans son pays avec une fermeté déconcertante. Mais, son discours, du côté du Niger, n’avait pas eu l’écho escompté, les Nigériens donnant l’impression de s’y être détournés définitivement, pour faire le choix de nouveaux corridors. Dès lors, la question que tout le monde se pose est de savoir s’il est, dans ces conditions, possible de renouer le dialogue entre les deux pays dont les relations devraient souffrir des humeurs des hommes.

Par l’interaction indirecte et à distance, il est impossible d’avoir des résultats diplomatiques pouvant permettre de soigner ces relations qui ont perdu de leur ferveur depuis que Patrice Talon, au regard de l’importance de sa frontière avec le Niger, avait été poussé à étouffer le Niger en refusant tout passage de tout produit par cette voie en direction du Niger. On peut même croire que Bazoum Mohamed, avec lequel il avait eu les derniers mois avant sa chute des proximités compromettantes pour tisser de nouvelles amitiés personnelles, pourrait l’avoir conseillé à fermer sa frontière comme il conseilla à Tinubu d’interrompre la fourniture d’électricité avec le Niger, espérant que de telles mesures et méchancetés puissent lui permettre de revenir au pouvoir. Qui donc, Patrice Talon peut-il trouver pour nouer le dialogue avec les autorités du Niger quand, par lui-même, il ne peut plus avoir le courage de venir et ce malgré le fait que la CEDEAO ait fait de lui un des membres de l’équipe de présidents de la CEDEAO devant parler avec les autorités nigériennes en vue de parvenir à des accords pour une levée ou un assouplissement des sanctions et, à terme, à un retour à l’ordre constitutionnel. Quel gage peut-il donner au Niger et au Burkina Faso que la France ne peut pas se servir de son territoire pour déstabiliser les pays du Sahel quand on apprend que des militaires français sont en train de s’installer dans son pays ?

A ces questions, sans doute que Patrice Talon n’a pas de réponses rassurantes à donner depuis qu’il s’est fait un valet de la France pour n’obéir qu’à ses injonctions, peut-être, pour avoir sa bénédiction pour un troisième mandat-totem qu’il pourrait mijoter et pour lequel les Béninois l’attendent de pied ferme. Le problème du Niger n’est donc pas avec les Béninois mais avec Patrice Talon qui est aujourd’hui un partenaire qui ne peut plus rassurer les Nigériens. C’est pourquoi les Nigériens tiennent à ne pas porter atteinte aux bonnes relations avec le peuple béninois avec lequel depuis de longues décennies, ils ont appris à faire beaucoup de choses. Personne ne pouvait comprendre pourquoi, allant audelà de la condamnation de principe, Talon pouvait être de l’option de la guerre contre un pays voisin qui ne peut pas comprendre que, parce qu’il choisissait de changer de président par une vois non constitutionnelle, il est vrai, un autre veuille lui faire la guerre pour, soi-disant, rétablir un président qui n’est pourtant pas le sien et qui plus est, tout le monde le sait, n’est pas bien élu. N’est-ce pas Général Toumba ? Tant que la France, qui a juré de déstabiliser la transition nigérienne, devra trouver les faveurs du régime de Talon pour installer ses bases sur le territoire dahoméen, alors jamais le Niger ne peut faire confiance à ce Benin où le président n’écoute personne. Les rois du Bénin, à travers une déclaration, s’étaient opposés à une intervention au Niger. D’autres acteurs politiques et de la société civile du même Benin aussi. Mais cela n’a rien changé à la position de Talon, décidé à n’écouter que la France qui, aujourd’hui, est incapable de l’aider à faire face aux dégâts que les sanctions, avant le Niger, ont provoqués au Bénin. Les cris de détresse des populations béninoises, eux-mêmes, ne peuvent amener le président à reconsidérer sa position vis-à-vis du Niger, décidé à faire le combat de son nouvel ami Bazoum qui lui proposait il y a quelques mois une certaine place dans le confort du pétrole nigérien. Et ça vaut la peine d’avoir ces folies, n’est-ce pas ?

Courage diplomatique….

Pour renouer les fils du dialogue avec le Niger, il faut au président béninois un certain courage qui l’oblige à faire de grands pas vers les autorités du Niger et, ce, tout en se débarrassant de son orgueil car lorsque les intérêts des peuples sont en jeu, on ne s’encombre pas de telles vanités, pour savoir jouer à humaniser les relations entre les peuples et pouvoir sauver l’essentiel. La belle histoire entre les deux pays ne doit donc pas s’arrêter par la faute d’un dirigeant qui doit comprendre et accepter ses erreurs. Une délégation de haut niveau, peutêtre même une délégation des rois du Benin, peuvent aider à rendre possible le rapprochement entre les autorités des deux pays qui ont intérêt à garder de bonnes relations quand leurs populations se sont mélangées, et même métissées. Mais il reste que la reprise des relations d’Etat à Etat ne peut se faire sans quelques conditions qui satisfassent les deux parties. Cependant, pour le Niger, il est hors de question, tout de suite, de quitter le port de Lomé pour celui de Cotonou qui, pour ses raisons que le Niger ne connait pas, avait décidé de « compliquer la vie aux opérateurs économiques du Niger et par ricochet, au peuple du Niger dont l’approvisionnement dépend en grande partie de ce port proche que l’on dit aussi être le port naturel du Niger qui n’a aucun débouché sur la mer. Comment, alors que les conventions internationales interdisent d’empêcher l’accès à des pays enclavés à des ports, le Benin, peut-il aujourd’hui, si facilement, après avoir fermé son port au Niger, par un discours à distance, amener le Niger à lui pardonner ses extrémismes assassins ?

L’affaire, pour parler terre à terre, n’est que compliquée aujourd’hui entre le Benin et le Niger. Heureusement que cela met à l’écart les peuples qui regardent au sommet le conflit entre les autorités qui se tasse, difficile à régler et à dissiper. D’ailleurs, comment ouvrir un port quand, par les décisions de la CEDEAO auxquelles Patrice Talon obéit, la mesure de fermeture des frontières reste de mise ? A quoi, dans ces conditions, l’ouverture de ce port, peut-elle intéresser les Nigériens ?

Et la guerre froide continue entre le Niger et le Benin.

Mairiga

Source : https://lecourrierniger.com/