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Amères vérités : Celui qui est en haut a toujours plus de pouvoirs que celui qui est en bas

Il est désormais clair pour tout le monde que le problème du Niger se résume à un nom : Issoufou Mahamadou. Non content d’avoir fait et laissé faire tout ce que l’on sait depuis une décennie, il se fait l’immense plaisir de montrer à la face du monde qu’il reste et demeure le véritable détenteur du pouvoir de Niamey. A-t-il fait ce qu’il a fait à Tahoua pour narguer ses compatriotes pour lesquels, on le sait, il n’a jamais eu de respect et de considération ? L’a-t-il fait en guise de message à Bazoum Mohamed qui, on le sait également, ne conduit pas la barque dans la direction voulue par l’ancien président ? Quelle que soit l’hypothèse, une chose est certaine : il a réussi à ébranler les minces assurances qui faisait de son successeur le chef de l’Etat, porteur d’une gouvernance à laquelle adhèrent ses compatriotes. Ce que Issoufou Mahamadou a fait en organisant cette mise en scène à Tahoua, durant les vacances présidentielles de Bazoum – une monnaie de change ? – n’est ni plus ni moins qu’une mise au point. Une mise au point à la fois aux Nigériens qui se faisaient des illusions et à Bazoum Mohamed qui commençait à trop rêver. Il faut mettre les points sur les i et Issoufou Mahamadou n’a pas lésiné sur les moyens. La garde présidentielle, avec les moyens habituels dont Issoufou sait faire usage pour ses déplacements, a été particulièrement mobilisée afin de ne laisser aucun doute dans aucun esprit sur la réalité du pouvoir. Vrai ou faux, l’ancien président est peut-être allé trop loin pour ne pas irriter son successeur.

Malgré les subtilités avec lesquelles Issoufou a tenu à entourer son affaire, plaçant cet évènement insolite sous le couvert de la fondation qu’il a créée, il n’a pu empêcher à ses compatriotes de comprendre. Même les doux mots prononcés à la faveur de Bazoum Mohamed ne peuvent suffire à dissimuler les motivations profondes de cette sortie fortement médiatisée. Le malaise créé est profond et cela s’est vérifié sur les pages facebook de certains communicants du Pnds Tarraya qui ont publié de nombreuses photos de la virée d’Issoufou Mahamadou avant de les supprimer. Il n’est pas sûr que Bazoum va particulièrement aimer ce one man show qui n’a pas d’autre but que de le mettre en garde. A-t-il compris le message ? Probablement. Mais va-t-il faire profil bas et s’avouer vaincu ? C’est une autre question. La certitude, c’est que Bazoum reste un otage d’un système politique qui a ruiné le Niger et face auquel il livre un combat honorable pour redonner à son pays la chance de réussir le pari économique. Or, ce pari, difficile et complexe ne peut être gagné en faisant l’économie d’une guerre sans merci contre la corruption.

Si feu Seyni Kountché est régulièrement évoqué avec regret, cité comme modèle de gouvernance, c’est certainement parce que les Nigériens accordent beaucoup d’importance à la chose publique, par conséquent à la sacralité des deniers et biens publics. Or, c’est exactement tout ce qui a été bafoué sous Issoufou. Jamais, dans l’histoire de la République du Niger, les Nigériens n’ont eu à faire à de si grands prédateurs. Rien ne les arrêtait. Ni la loi qu’ils triturent à volonté suivant leurs attentes personnelles, ni l’honneur et la dignité. Les deniers publics servaient à enrichir parents, amis et clientèle politique et les gens ne sont pas allés du dos de la cuillère. La palme des palmes, c’est bien entendu le détournement régulier des crédits budgétaires et aides bilatérales destinés à l’équipement des forces armées nationales. Sans se faire le moindre souci par rapport aux centaines de morts qu’engendre la guerre asymétrique imposée par des forces obscures qui sont manifestement rassurées sur le sous-équipement des ennemis à anéantir. Les milliards, ils les ont accumulés au prorata des Nigériens, militaires et civils, qui tombaient sous les balles ennemies. Plus cette guerre faisait des morts dans nos rangs, plus eux faisaient des affaires en milliards. Des croque-morts ne feraient pas pire.

C’est cette situation tragique, méprisable et condamnable que le Président Bazoum s’est solennellement engagé, lors de son investiture, à mettre un terme afin de redonner confiance et espoir à ses compatriotes. Et cette volonté de mettre un terme à tout ce qui a ruiné le Niger que l’on cherche, ailleurs, à briser à tout prix. Les Nigériens ne doivent pas s’y tromper, ils sont au début d’une guerre sans merci contre Bazoum Mohamed et l’épée vient de son propre camp, attaché à briser les reins de quiconque se hasarderait à rêver d’un autre Niger que celui qui a été inauguré par Issoufou Mahamadou en avril 2011.

Jamais, dans l’histoire de la République du Niger, on n’a vu un ancien président aussi téméraire, aussi provocateur qu’Issoufou Mahamadou. Mais, c’est parce qu’il a eu cadeau, comme diraient nos frères ivoiriens. Il doit toutefois faire attention, car on ne pousse pas un homme à bout de cette façon, soit-il après l’avoir aidé à se hisser au sommet. Celui qui est en haut a toujours plus de pouvoirs que celui qui est en bas.

BONKANO