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De sa nationalité d’origine, Bazoum doit dire ce qu’il en est au peuple nigérien : Par Issa Kanga

 
Tout est parti de l’article 47 alinéa 3 de la Constitution du 25 novembre 2010 qui dispose que : « Sont éligibles à la Présidence de la République, les Nigériens des deux (2) sexes, de nationalité d’origine, âgés de trente-cinq (35) ans au moins au jour du dépôt du dossier, jouissant de leurs droits civils et politiques.»
Pourtant, de l’initiative à la promulgation, en passant par l’adoption de la Constitution, ce terme nationalité d’origine n'avait attiré l’attention d’aucun nigérien, y compris celle des membres du Conseil Consultatif National (dont Bazoum lui-même) qui ont même travaillé en commissions. Certainement chacun trouvait qu’il y va de soi jusqu’au jour où Bazoum Mohamed fut désigné, par Mahamadou Issoufou, candidat du PNDS Tarayya au titre des élections présidentielles 2020/2021.

A partir de là, le ton est donné pour toutes sortes de supputations. Pour beaucoup de nigériens, Bazoum Mohamed qu’ils ont connu (scolaire, syndicaliste, opposant, député, ministre) pourrait ne pas répondre à cette exigence constitutionnelle de nationalité d’origine, précisée par le code de nationalité nigérienne en ces termes : « Est ainsi nigérien d’origine l’enfant né au Niger d’un ascendant direct au premier degré (père ou mère) qui y est lui-même né ».
D’aucuns diraient que Bazoum, lui-même, n’est pas né au Niger et qu’il a été transporté à dos de chameau en provenance du Tchad. Pour certains, il est bel et bien né au Niger mais qu’aucun de ses deux ascendants directs n’y est né. Par contre, d’autres battent en brèche ces deux thèses en clamant haut et fort que Bazoum et tous ses deux ascendants directs sont nés au Niger.

Pour les tenants de la première thèse, Bazoum est né à Nokou, actuellement chef-lieu du département du Nord Kanem au Tchad. Selon eux, il a été amené au Niger à l’âge de onze (11) ans par son grand-frère Mohamed Saloum Kallam, garde républicain de son état, décédé le 6 décembre 2013 à Niamey. Ceux-là vont jusqu’à dire que Bazoum porte le nom de son frère Mohamed pour les besoins de sa scolarisation à Tesker où servait son tuteur.
Pour les tenants de la deuxième thèse, Bazoum est né à Bilabrine au Niger où ses parents, éleveurs de chameaux, en provenance du Tchad, se sont installés avant de venir camper à Tesker où il fit sa scolarité primaire.

Pour les tenants de la dernière thèse, Bazoum est né à Bilabrine. Les défenseurs de cette thèse ajoutent que mêmes ses deux parents (père et mère) sont tous nés au Niger sans qu’ils ne situent, nulle part, leur lieu de naissance. Ils signalent que son père est décédé en octobre 1998 à Blakawoua à 70 km de Tesker et sa mère, quant à elle, est décédée en 2004, on ne sait où. Mais chose curieuse, on ne rencontre encore personne qui prétend avoir connu les parents de Bazoum bien que leurs rappels à Dieu soient récents.

Toutefois, certains militants du PNDS vont jusqu’à s'improviser historien généalogiste pour faire un rapprochement entre la famille de Bazoum à sa belle-famille aux fins de soutenir cette position. Dans leur démarche, il a fallu explorer tous les livres écrits par les éminents historiens sur la pénétration coloniale au Niger. Pour eux, le jeu en vaut la chandelle.

Voilà alors la vraie situation : trois thèses s’affrontent. De quel côté se trouve la vérité ? Franchement, nul n’est, pour le moment, intelligent pour le savoir ; chacun prend la position qui correspond à sa conviction personnelle. Bref, aujourd’hui la nationalité d’origine de Mohamed Bazoum est devenue une controverse politique que lui seul pourra vite arrêter pour poursuivre sereinement sa pré-campagne. Il doit s’inspirer de l’histoire de certains grands hommes politiques ayant connu une situation quasi-identique à la sienne. Pour mémoire, nous rappellerons d’abord un cas dans un pays en voie de développement ensuite un autre cas, dans un pays développé.

En effet, en 1994, l’Assemblée Nationale ivoirienne avait voté une modification du Code électoral qui prévoit que nul ne peut être élu Président de la République s’il « n’est ivoirien de naissance, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens de naissance». Cette disposition visait à empêcher la candidature d’Alassane Dramane Ouattara (ADO) dont les opposants affirment que son père est d’origine Burkinabé. Au vu de la persistance du doute, le samedi 4 septembre 1999, ADO a tenu une conférence de presse afin de démentir la nationalité douteuse qu’on lui attribuait. Dans sa démonstration, il s’était appuyé sur les pièces authentiques d’état civil de ses parents et de lui-même. A chaque étape, il brandissait devant les caméras la pièce visée. A partir de là, mêmes les plus incrédules ont été convaincus. Alors, quand Bédié avait persisté dans sa volonté de son élimination, les ivoiriens ont trouvé cela injuste et inacceptable. Chacun connaît la suite : des violences politico-éthiques ayant entrainé plusieurs centaines de morts et Ouattara, en dépit de tout, est arrivé au pouvoir.

Allons aux Etats-Unis d’Amérique (USA) très loin de la Côte d’Ivoire. La Constitution prévoit qu’il faut être né aux USA pour être éligible à la Maison Blanche. Saisissant cette brèche, certains républicains, aidés par les médias, avaient entretenu une controverse autour de l’éligibilité de Barack Obama (en mettant en doute le fait qu’il soit né aux USA) pour chercher à empêcher sa réélection aux élections présidentielles de 2012. Cependant, pour faire dissiper la pression médiatico-politique, Barack Obama, pourtant Président en exercice, avait mis en ligne la version longue de son acte de naissance, le mercredi 27 avril 2011 à 19 h 47 mn. Il est allé jusqu’à permettre aux journalistes sceptiques de vérifier l’authenticité dudit document.

Aujourd’hui, le peuple nigérien attend impatiemment que Bazoum Mohamed emprunte la voie de ces deux exemples pour faire arrêter le doute persistant et inquiétant sur sa nationalité d’origine. Ce faisant, en homme d’Etat, il allégera la mission de la Cour Constitutionnelle qui voudrait bien que ses décisions ne souffrent ni de doute ni de suspicion. Il est grand temps que Bazoum arrête d’esquiver ou de déplacer le problème. Cette posture dans laquelle il se place est périlleuse pour lui. Surtout, il faut qu’il cesse de tribalisme une affaire personnelle. Dans les débats, personne ne parle de tribu ou de race comme Bazoum veut le faire croire. Il veut être candidat à des élections présidentielles encadrées par la Constitution au Niger, eh bien! qu’il s’assume par responsabilité.
Chose surprenante ! Où sont passés tous les grands gueulards proches de Bazoum qui conseillaient à Hama Amadou de publier juste le test ADN de ses enfants pour mettre fin à la fausse affaire dite des bébés importés ? Comment pouvaient-ils conseiller Hama Amadou et laisser tomber Bazoum ? S’il vous plait, reprenez service et demandez à Bazoum la même chose. Pourquoi de plus en plus vous laissez Bazoum mouiller tout seul le maillot ? En tout cas, l’on constate que mêmes les caciques du PNDS sont en hibernation depuis l’investiture au forceps de Monsieur Bazoum.
Par Issa Kanga