Entretien - Jean-Luc Marcellin décrypte les enjeux et perspectives de la formation professionnelle au Niger
Dans cet entretien exclusif de Jean-Luc Marcellin, expert et membre de l’IVETA (International Vocational Education and Training Association)IVETA , il apporte un éclairage précieux sur le dispositif de la formation professionnelle et technique. De l’ingénierie de formation aux référentiels métiers, en passant par les défis de gouvernance et l’adaptation aux mutations du marché de l’emploi, il décrypte les enjeux et les perspectives d’un secteur stratégique pour l’avenir du Niger.
M. Jean-Luc, pour ceux et celles qui ne seraient pas familiers avec le dispositif de la formation professionnelle et technique, pourriez-vous nous expliquer de quoi il s'agit ?Merci de me recevoir. Je vous propose ici une approche pour amener les gens à comprendre le dispositif. On parle du dispositif de l'EFP du ministère de la Formation professionnelle et technique.
Si on part des entreprises, elles produisent des biens et services. Pour cela, elles ont besoin de main-d'œuvre qui participe à ce processus de production. Cette main-d'œuvre doit disposer de compétences, savoir-faire et connaissances nécessaires pour satisfaire les besoins des entreprises.
C’est là qu’intervient le dispositif. C’est un ensemble de mesures, programmes et initiatives destinées à favoriser l’acquisition de compétences professionnelles et techniques pour les individus afin de faciliter leur employabilité et leur insertion professionnelle.
Ce dispositif est en général mis en place par les gouvernements, les entreprises, les organisations professionnelles, les établissements et organismes de formation. Il a pour objectif de répondre aux besoins du marché de l’emploi en formant des travailleurs qualifiés et compétents, tout en aidant les individus à se développer et à atteindre leurs objectifs de carrière.
Je vais préciser un point sur l’économie et la classification des secteurs pour que vous mesuriez mieux l’étendue du champ d’application du dispositif de la formation professionnelle et technique.
Il existe plusieurs sortes de classifications de secteurs économiques.
On parle des secteurs primaire, secondaire et tertiaire.
Dans le secteur primaire, on va considérer les industries extractives, tandis que dans le secteur secondaire, on va considérer la transformation, la production de biens industriels, etc. Enfin, dans le secteur tertiaire, on va parler de services et des produits associés : en général, le commerce, l’administration ou les services financiers.
Dans le secteur secondaire, on va parler des usines de production de produits transformés, comme les usines d'automobiles ou des usines de production d’équipements.
Dans le secteur primaire, on s'intéresse aux industries extractives comme les mines. Donc vous voyez que les besoins sont bien différents et qu’il faut faire intervenir toutes les parties prenantes, des entreprises au ministère en passant par les centres de formation, etc.
Dans le cas spécifique d’un pays particulier, quelle approche adopter sur ce marché ?
Il convient d’identifier les secteurs économiques que nous avons, selon les classifications du ministère du Commerce ou de l’Économie du pays.
Les entreprises créent des emplois en constante évolution du fait de la transformation digitale, des bouleversements liés à Internet, à l'intelligence artificielle, à l'industrie 4.0.
Avec des emplois en grande mutation, il est important pour le ministère de porter une grande attention, sous la forme de veille et de prospective, sur les emplois émergents et sur les emplois désuets afin d'ajuster l’offre de formation.
Le ministère de la Formation professionnelle doit analyser le marché du travail pour déterminer quel programme de formation il va produire, pour combien d’emplois, pour quel niveau de formation et pour combien d’années.
Sur le marché de l'emploi, la demande est représentée par les demandes d’emploi et les demandes de formation.
Le ministère de la Formation professionnelle ou les dispositifs nationaux de formation professionnelle répondent à la demande de formation : c'est ce qu'on appelle l’offre.
Il y a adéquation entre l'offre et la demande quand le ministère offre des formations qui répondent aux demandes du marché de l’emploi.
En se basant sur les référentiels métiers/emploi et les référentiels métiers/compétences qui, normalement, sont produits par les branches professionnelles, l'industrie et les entreprises, et en se basant sur les données extraites de l'analyse du marché du travail, on peut déterminer quels sont les emplois qui sont en demande et ceux qui ne le sont plus.
Et en comparant l'offre de formation actuelle ou l’offre de formation en adéquation avec les emplois en demande, les dispositifs nationaux de formation professionnelle planifient le développement de programmes à la carte, en prenant en compte toutes ces données-là.
Et sur la base de ces données, qui sont identifiées sur le marché du travail, sur la base des données qui sont identifiées dans l'analyse du marché de l’emploi, et des données extraites aussi des référentiels métiers/compétences ou emploi/compétences, le dispositif national de formation peut planifier la carte de formation par régions, zones rurales, industrielles, agricoles, etc., par secteur et selon qu’il s’agit de formations qualifiantes ou diplômantes.
Une fois les études de planification réalisées, le processus d'ingénierie de formation ou de certification commence.
Merci pour ces précisions ! Vous venez de nous parler d’ingénierie de formation. Pouvez-vous nous expliquer ce dont il s’agit ?
L'ingénierie de formation consiste à analyser les données recueillies lors des études menées sur le terrain pour le marché du travail, les référentiels de compétences, les référentiels de métiers, pour les traiter et produire les programmes de formation pour une main-d'œuvre qualifiée, en adéquation avec les offres d’emplois en demande et les besoins exprimés par les entreprises.
Qu’entend-on par référentiel métier ?
Un référentiel métier est un ensemble de références et de normes qui décrivent de manière détaillée les compétences, les activités et les connaissances nécessaires pour exercer un métier spécifique. Cet outil permet de clarifier les attentes en matière de compétences et de performances pour les employeurs, les employés et les autres parties prenantes. Il est donc essentiel pour décrire et formaliser les compétences et les connaissances nécessaires pour exercer un métier ou une profession particulière.
Revenons maintenant à l’adéquation entre offre et demande sur le marché de l’emploi.
Cette adéquation entre l'offre et la demande nécessite une analyse récurrente du marché du travail tous les 3 à 5 ans, afin de se tenir à jour et d’offrir toujours une offre de formation correspondant aux besoins du marché du travail, et pour élaborer des cartes de formation utiles au pays.
Alors c'est là que la conception des programmes de formation, des documents d'accompagnement de ces programmes de certification doit respecter les normes et standards.
Pour chacun de ces éléments-là, nous avons les normes de formation, les normes de certification et de diplôme, les standards pédagogiques à respecter, les critères de sélection des candidats à la formation, les critères d'orientation de ces candidats, la gestion des flux de données, la gestion administrative de la formation, la planification et les services de support.
Tout cela va découler du processus d’ingénierie.
L’ingénierie de la formation est donc un processus continu. Pourriez-vous élaborer ce point ?
Oui, car le processus ne s’arrête pas à la conception de programmes de formation. Il faut aussi un suivi.
Quand les apprenants sortent du cycle de formation, c'est-à-dire les lauréats, ils sont accompagnés dans l'insertion sur le marché de l’emploi.
Des enquêtes de satisfaction sont menées. Des enquêtes sur le taux d'insertion sur le marché de l'emploi des diplômés sont aussi menées afin de rassembler des données statistiques. Elles permettront d'alimenter les indicateurs de performance du dispositif et les indicateurs d’impact. C’est aussi un moyen de permettre aux gestionnaires de prendre de bonnes décisions basées sur des données fiables.
Pour chaque partie du processus d'ingénierie de formation, et donc pour chaque structure qui gère ce processus, des tableaux de bord de pilotage doivent être élaborés et contenir des indicateurs clés qui permettent aux décideurs de superviser le dispositif, de prendre toutes les décisions qui s'imposent et d'améliorer ou corriger la stratégie, afin d'améliorer les activités entreprises pour chacune des structures des composantes du dispositif.
Dans chaque structure, il y a des normes, des standards, des bonnes pratiques sur lesquelles s’appuyer.
Il y a des outils et, bien sûr, de la documentation qui guide les gestionnaires de ces structures dans la conduite de leur travail, dans la gestion des processus de travail, dans le suivi et dans l'évaluation de la qualité des prestations offertes ou reçues des autres composantes.
Il y a une très forte interdépendance entre les actions de chaque structure.
Il faut bien être conscient de cela, car si une structure ne fait pas correctement son travail, c'est tout le système qui est perturbé et pénalisé.
Il y a un impact direct sur la performance du dispositif au complet et cela est un obstacle à la réalisation de sa mission.
Comment élabore-t-on un programme de formation ?
Pour élaborer des programmes de formation, on part des données du marché du travail transmises par les entreprises et leurs associations professionnelles. On part aussi de référentiels métiers/compétences, de référentiels emploi/compétences et on développe les programmes de formation ou les programmes de certification.
Ces programmes sont accompagnés de documents qui permettent de soutenir leur implantation dans les centres de formation.
En ce qui concerne la formation, elle a pour finalité de former les jeunes à un emploi et c'est la condition sine qua non à prendre en compte lorsqu'on veut former, développer des programmes qui seront bien performants.
À l'entrée du système de formation, nous avons aussi les demandeurs de formation : les apprenants.
Ils se destinent à se préparer pour une carrière, donc il faut bien les orienter et il faut bien les accompagner et les guider tout au long de la formation.
Nous devons prendre en compte que nous avons à orienter correctement les apprenants pour minimiser le taux d'échec et augmenter le taux de rétention et de succès du programme.
C'est fondamental !
Il faut aussi penser à la validation des acquis pour permettre à ceux qui veulent entrer dans le système par des voies alternatives de pouvoir le faire sans problème.
Il faut penser aussi à des passerelles pour permettre à ceux qui ont réussi une carrière dans le domaine professionnel et technique, et qui veulent la poursuivre dans le domaine supérieur, de pouvoir le faire.
D'autres aspects aussi, qu'on mène après le départ des personnes formées et des jeunes diplômés, consistent à conduire des enquêtes pour évaluer la satisfaction des personnes formées, pour évaluer aussi la satisfaction des employeurs et pour vérifier objectivement la performance du programme, à l'aide d'indicateurs bien choisis, qui seront alimentés à partir de ces enquêtes de satisfaction.
Et c'est là que nous pourrons dire que la mission est accomplie et que nous pourrons mesurer les impacts économiques et sociaux de ces formations.
Et c'est là aussi que nous verrons un engagement de plus en plus important des entrepreneurs et des entreprises.
In fine, l’objectif du dispositif est de contribuer à l’équilibre sur le marché du travail. Dans ce cas, quel est le rôle de l’État ?
Les entreprises et leurs branches professionnelles, les employeurs et entités qui déterminent les standards, compétences, qualifications et habiletés, sont celles qui fournissent les données primaires au ministère pour réaliser sa planification.
Donc l'État joue le rôle de régulateur et son rôle régalien pour assurer que le dispositif de formation puisse offrir aux entreprises des apprenants qualifiés.
Les apprenants candidats à la formation qui entrent dans le système avec une bonne orientation, qui sont guidés et accompagnés tout au long de leur formation et dont les parents sont bien informés et les appuient, ont le plus de chances de sortir avec un diplôme et d'avoir un bon emploi.
Nous avons aussi le personnel d’accompagnement, de soutien, des formateurs et formatrices, les encadreurs, les structures d'appui et les structures d’inspection, de gestion, de régulation, d'accréditation qui jouent leur rôle dans tout ce processus d'ingénierie de formation, de suivi, d’évaluation, de l'offre de formation, de la mise en œuvre de ces formations et du suivi de l'insertion professionnelle.
Bien entendu, la coopération internationale, les partenaires techniques et financiers ont aussi un rôle important d'appui à jouer, de même que la société civile, les ONG, les syndicats et toute autre organisation et collectivités territoriales, notamment dans le cas des systèmes décentralisés.
Idéalement, il faudrait avoir une bonne interaction, harmonieuse et cohérente de toutes les parties prenantes, un excellent canal de communication, d’information, de concertation et pourquoi pas, de participation aux prises de décisions dans le cas de certaines parties prenantes.
Pour constituer un corps solide, interdépendant et des structures adéquatement fonctionnelles, il faut fonctionner comme un corps, comme un organisme vivant.
C'est pourquoi il est important de ne pas fonctionner en silo et de comprendre ce que les autres font, ce qu'ils offrent comme service et ce que moi aussi j'offre comme service, afin qu'il y ait une interaction de qualité.
On pourrait comprendre le ministère, en décrivant le processus du dispositif de l’EFTP, et quels sont les organismes qui y sont rattachés pour chaque structure, quel est son rôle dans le système, quels sont ses indicateurs de gestion, de performance et de résultats, quels sont les projets, les réformes auxquelles il a été appuyé, pour lesquelles il a été appuyé, quel est son niveau, et aussi est-ce que c'est le niveau de la gouvernance, est-ce que c'est le niveau du pilotage, du niveau de la structure d'exécution ou de la structure opérationnelle (en donnant un exemple : le ministère, le ministre et son cabinet sont au niveau de la structure de pilotage de gouvernance et politique ; au niveau du secrétariat général et au niveau des directions centrales, nous sommes au niveau exécutif ; au niveau des structures opérationnelles comme les centres de formation, c'est là que la réalisation réelle des activités se fait au bénéfice des bénéficiaires).
Il est donc important de comprendre où on se positionne pour chacune des structures, d'avoir de bons outils de gestion, d'avoir un bon référentiel métier pour chacun des employés de notre structure, d'avoir des indicateurs de suivi et des indicateurs d'évaluation, des normes et des standards sur lesquels se reposer pour pouvoir évaluer notre travail.
Quel autre aspect entre en jeu dans le cadre du dispositif de l’EFTP ?
Il est bon aussi de connaître parfaitement le cadre législatif, qui gère notre structure et quelles sont les lois, les règlements, les décrets et les circulaires pour pouvoir bien opérationnaliser ces éléments législatifs et réglementaires dans notre travail.
Il est important aussi de connaître le soutien que nous pouvons obtenir des partenaires techniques et financiers : quel est notre budget de fonctionnement, quelles sont les finances auxquelles nous pouvons avoir accès, quel est le service d'appoint sur lequel nous pouvons nous appuyer et dans quelle branche aussi nous nous situons au niveau des parties prenantes.
Et au niveau des relations de partenariat : est-ce qu'on a des partenariats nationaux, des partenariats internationaux, quelles sont nos relations avec les instances.
Donc tous ces points sont à prendre en compte lorsque nous structurons un dispositif de formation.
Bien sûr, rien ne peut se faire sans l’humain, sans les individus, sans les personnes.
C'est pourquoi c'est le cœur du succès : il est important de mettre l'accent sur le personnel, sa qualité, sa formation, son développement de compétences.
Et cela ne peut se faire que si de bons référentiels métiers sont établis.
Vous avez mentionné le référentiel métiers précédemment. Quelle est leur importance dans le dispositif ?
Des référentiels métiers/compétences sont établis et c’est sur cette base que l’on définit les responsabilités qui sont confiées au personnel. On peut identifier et facilement faire le bilan de compétences de ces personnels et élaborer des plans de formation, individuels ou collectifs, pour améliorer les compétences et le rendement des structures.
À quels défis/obstacles doit-on faire face lorsque l’on met en place un dispositif de formation professionnelle et comment les identifier ?
C’est une évidence, tout dispositif fait face à des défis et des obstacles.
Et nous pouvons identifier ces défis et obstacles en nous basant sur plusieurs approches.
Je donne en exemple les approches SDC, Île Maurice et les approches Tibet, Mongolie ou l’approche traditionnelle française ou l’approche australienne, qui sont des philosophies de fonctionnement du cadre de gouvernance.
Nous pouvons établir un système de formation professionnelle dans un cadre de gouvernance qui est basé sur le mode dual, c'est-à-dire comme l'Australie ou l'Allemagne où ce sont les entreprises et le secteur privé qui gouvernent le système de formation professionnelle.
L’État n'est qu'un simple régulateur et aussi il aide au financement du système de formation.
On peut parler du mode centralisé de l’État, comme en Europe, principalement en France et dans de nombreux pays africains, où c'est l'État qui joue le rôle de régulateur, de pilote, de gestionnaire et qui met en place les structures opérationnelles, les structures de contrôle et de régulation.
Il est juge et partie et il fait tout.
Mais nous pouvons aussi avoir un mode mixte dans lequel il y a un partenariat public-privé qui permet de piloter le dispositif en mode public-privé, soit par exemple en mode gestion déléguée, soit en mode GIP, par exemple GIPC (groupement d'intérêts privés) en mode délégation de gestion.
Bien sûr, il y a des avantages et des inconvénients dans chaque modèle.
Il y a des conditions de réussite à définir. Il y a aussi des défis qu'il faut définir.
Merci pour ces précisions. Concernant l'ingénierie de la formation, il y a beaucoup de défis auxquels on fait face. Pourriez-vous nous en dire plus ?
En effet, et surtout un des gros défis auxquels nous faisons face en Afrique, c'est la méfiance qui existe entre l'État et les entreprises.
La mentalité des entrepreneurs qui n'ont pas cette culture du développement de ressources humaines pour améliorer leur compétitivité est un facteur de plus.
Il y a aussi les coûts financiers, les modes de formation qui peuvent être mis en place, qui doivent être cohérents avec le mode piloté par le privé ou par l’État.
On parle de mode de formation initiale, continue, à la carte, par l’alternance, par l’apprentissage, etc.
On parle de formation formelle, non formelle, informelle.
Donc tout cela doit être pris en compte dans l'élaboration d'une stratégie nationale de développement de ressources humaines.
Quels sont les autres facteurs à prendre en compte pour réussir concernant les entités du dispositif de la formation professionnelle ?
Maintenant, chaque entité doit se positionner par rapport aux autres dans le système : quelle est sa mission d’abord, quels sont ses objectifs, quelles sont les stratégies qu'elle doit adopter pour accomplir la mission qui lui est confiée, quels sont ses plans d'action aussi.
On doit prendre en compte la transition numérique, l'intelligence artificielle, la réalité virtuelle et tous les nouveaux modes sociaux d'interaction et de communication ajoutés par les réseaux sociaux.
Le modèle de gouvernance de pilotage en sera grandement influencé. Donc il est important, après avoir défini sa mission, sa vision ou son positionnement et sa stratégie, d'avoir aussi en parallèle un cadre de référence de gouvernance du dispositif.
On peut le choisir centralisé, décentralisé ou territorial.
On peut aussi associer la gestion par des approches programme, de la gestion par objectifs et continue, renforcement des entreprises privées, création de champions nationaux, développement des branches professionnelles, des chambres de métiers, des organisations et associations professionnelles, un engagement des entreprises dans la formation, dans le processus d'ingénierie de formation et de certification, d’implication des entreprises dans la formation voire même dans la délivrance de la formation.
Il faut donc avoir un bon répertoire des entreprises par région, par secteur, les besoins en emploi.
Donc avoir des études de veille et de prospective sur l’emploi, avoir aussi des études de veille pour identifier quels sont les emplois émergents, quels sont les métiers porteurs, quels sont ceux qui sont en voie de disparition et tout cela pour ajuster l'offre de formation et la carte des formations.
Quels autres éléments concourent à la réussite du dispositif de la formation professionnelle et technique ?
Excellente question. Le cadre législatif et réglementaire doit suivre, ainsi que les indicateurs de gestion, les tableaux de bord : tout cela doit suivre.
Des relations de partenariat doivent être nouées de façon solide avec les autres ministères de tutelle qui œuvrent dans la formation et l'enseignement, tels que le ministère de la Santé, le ministère de l’Agriculture, le ministère des Transports et aussi les autres institutions et partenaires sociaux, de même que les partenaires techniques et financiers.
À partir de tout cela, nous pourrons identifier les priorités du ministère, les piliers stratégiques pour la stratégie de développement de la formation professionnelle au Niger.
Nous aurons une approche en cohérence avec notre stratégie et nous pourrons la mettre en œuvre avec l'appui de tous les partenaires.
Pour la gestion des centres de formation, il faut savoir aussi quel est le mode de gestion que l'on veut adopter.
En général, l'État crée des centres de formation et les gère.
Ils sont sous-financés, sous-équipés et très peu performants.
Une alternative serait de créer des groupements d'intérêt public ou privé. Cela permettrait d'associer le privé à la gestion des centres en ayant, dans les conseils d’administration des GIP, l’État, le public et le privé représentés.
Et le centre est géré par un conseil d'administration qui nommerait le personnel, avec bien sûr un système de reddition de comptes et de gestion.
Il y a l'option de la gestion déléguée. C'est-à-dire que l'État finance la construction et l'équipement des centres, assure leur construction et place le centre en gestion déléguée.
Généralement, il confie la gestion à une branche professionnelle, une chambre de commerce ou une organisation professionnelle, un groupement d'entreprises du même secteur.
Cela permet d'avoir un système performant dans lequel les entreprises se sentent véritablement parties prenantes de la formation et appuient le dispositif dans le bon sens.
Sans le recours au privé, il ne faut pas se faire d'illusions, il est impossible d'avoir des centres de formation performants.
Il est impossible de créer des centres de formation qui soient en mesure de répondre aux besoins du marché de l'emploi et qui soient en adéquation avec les besoins exprimés par les entreprises.
Dans le cas des entreprises soutenues pour devenir des leaders sur leur marché, il faut déterminer des critères de performance, des indicateurs de sélection de ces entreprises, et il faut les accompagner aussi dans l'exercice de leurs activités pour qu'elles puissent jouer pleinement leur rôle.
C'est un deal gagnant-gagnant qu’offre une coopération approfondie entre l'État et le privé.
Il faut mettre en place un système d'accréditation et d'habilitation des établissements.
Ainsi, les établissements accrédités, agréés ou labellisés pourraient être classés selon leurs performances en vertu des normes et des standards de la qualité de formation qui seront édictés, aux taux d’insertion professionnelle, aux indicateurs de performance et ainsi, les meilleurs pourront bénéficier de plus d’appui.
Les plus faibles pourront bénéficier d'un appui complémentaire pour être mis à niveau.
En revanche, ceux qui traînent la patte et qui ne font rien pour améliorer la qualité de l’enseignement pourront être éliminés.
Merci pour tous ces éclaircissements !
Je vous remercie pour votre très aimable attention.
Jean-Luc Marcellin.
Glossaire des termes clés
Pour faciliter la lecture de l’entretien, voici les définitions des principaux termes utilisés.
Adéquation offre/demande : Correspondance entre les formations proposées (offre) et les besoins réels du marché du travail (demande).
Alternance (formation en) : Mode de formation qui combine enseignement en centre et pratique en entreprise.
Apprentissage : Système de formation associant enseignement théorique et travail pratique en entreprise.
Branche professionnelle : Regroupement d’entreprises d’un même secteur qui définit référentiels métiers et besoins de formation.
Certification : Reconnaissance officielle des compétences acquises, validée par un diplôme ou un certificat.
Compétences : Ensemble de savoir-faire, savoir-être et connaissances nécessaires pour exercer un métier.
Dispositif de formation professionnelle et technique (EFP/EFTP) : Structures, lois, programmes et partenariats visant à développer des compétences techniques et professionnelles.
Formation initiale : Formation suivie avant l’entrée dans la vie active.
Formation continue : Formation destinée aux actifs pour actualiser, perfectionner ou reconvertir leurs compétences.
GIP (Groupement d’Intérêt Public) : Structure réunissant acteurs publics et/ou privés pour gérer un dispositif ou un centre.
GIPC (Groupement d’Intérêts Privés à caractère commercial) : Structure de gestion regroupant des entreprises privées autour d’un projet commun (ex. centres de formation).
Industrie 4.0 : Organisation de la production intégrant numérique, IA, IoT et automatisation.
Ingénierie de formation : Analyse, conception, mise en œuvre et évaluation des formations selon les besoins du marché.
Normes et standards pédagogiques : Règles et critères de qualité pour concevoir et dispenser formations et certifications.
Partenaires techniques et financiers (PTF) : Organismes/institutions apportant financements et expertises (coopération, ONG, bailleurs).
Prospective (veille et) : Analyse anticipative des métiers/compétences émergents ou en déclin pour adapter l’offre.
Référentiel métier : Description des activités, compétences et savoirs nécessaires pour un métier donné.
Référentiel compétences : Définition des compétences attendues pour un emploi/métier.
Validation des acquis de l’expérience (VAE) : Reconnaissance officielle des compétences acquises hors formation classique.
Veille sectorielle : Suivi régulier des évolutions d’un secteur pour anticiper besoins et adapter l’offre de formation.