La COVID-19 / Quel impact sur les droits humains ? : Par Me AMANI Yahouza, Avocat à la Cour
Il est important de rappeler que les premiers cas de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) ont été constatés à Wuhan en Chine, le 31 décembre 2019. Depuis lors, cette maladie avec son incroyable développement est devenue universelle car touchant toute notre planète avec ses lots de malheurs sans cesse grandissants. L’Homme et la science découvrent ainsi leurs limites au grand jour.
Un virus sans vie tue des vies de tous horizons et restaure l’égalité entre les puissants et les faibles. La question centrale est de protéger la vie humaine donc de se protéger contre la mort.
La mort, hantise éternelle de tout être humain dont personne n’y échappera, quel que soit le statut, la richesse, la misère, le pouvoir, la connaissance, la croyance, l’environnement, la religion et de toute autre considération. Au centre de cette problématique mondiale de santé, l’on comprendra que le tout puissant, le miséricordieux, Dieu a lancé un message à l’humanité pour qu’elle fasse son autocritique et reprendre le droit chemin qu’il lui a tracé.
La Covid-19 a remis en cause tout le Droit International des Droits de l’Homme dans toutes ses composantes (La Charte des Nations Unies, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, le Pacte International relatif aux droits civils et politiques, le Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Cette nouvelle donne a créé un autre pouvoir très puissant à savoir le Pouvoir sanitaire bousculant les Pouvoirs politique, législatif, judiciaire et de la presse pour être à jour de la science politique.
L’Organisation mondiale de la santé a mis en place un dispositif pour l’accès équitable aux outils de lutte contre la Covid-19 nécessitant un fond de 35 milliard de dollars. Ce fond servira à l’achat et à la distribution de 2 milliards de doses de vaccins, 245 millions de traitements et 500 millions de tests au cours de l’année prochaine. [i]
Ce premier message de l’OMS adressé aux décideurs politiques internationaux à l’occasion de la 75e session de l’Assemblée générale des Nations Unies est à rendre plus significatif.
En effet, la pandémie se répand et se renouvelle un peu partout au monde suscitant davantage des inquiétudes relativement à la nécessité d’un deuxième confinement.
Les premières décisions politiques planétaires ont été le confinement des peuples, la fermeture des frontières aériennes et terrestres, la fermeture des centres de commerce, des lieux de culte, des services publics, des établissements scolaires et universitaires, des lieux de loisir, l’instauration des gestes barrière bref un état d’urgence sur les droits humains. Cette situation est sui generis car de par l’histoire ni la peste, la rougeole , le sida, l’Ebola, la grippe aviaire et même les deux guerres mondiales n’ont pas entrainé un chapelet des mesures drastiques remettant en cause les acquis en matière des droits humains.
La présente analyse va consister à passer en revue les droits humains les plus remis en cause dans une démarche scientifique et pédagogique. D’où il convient d’étudier d’une part la naissance d’un Pouvoir Sanitaire planétaire et d’autre part la dépendance des autres Pouvoirs (Politique, Législatif, Judiciaire et la Presse) entrainant une remise en cause des droits humains.
- La naissance d’un Pouvoir Sanitaire planétaire :
Il est de connaissance de tous que dans un Etat existent quatre pouvoirs à savoir le politique, le législatif, le judiciaire et avec la force de la transformation des réalités politiques, la presse. Sur le statut de pouvoir de cette dernière, beaucoup de divergences doctrinales ont été exposées. Pour notre part, la Presse constitue en un point douté un Pouvoir fort qui peut non seulement « construire une élite politique, sociale, culturelle etc… mais aussi en détruire).
La Covid-19 a ramené sur la scène internationale l’Organisation mondiale de la santé (A) et le Conseil mondial de suivi de la préparation aux pandémies (B).
- L’Organisation mondiale de la santé (OMS)
Elle est devenue opérationnelle légalement depuis son acte constitutif du 07 avril 1948 et a pour missions entre autres la protection et l’amélioration de la santé des peuples et leur bien-être, condition indispensable à la paix et au développement.[ii]
L’OMS a eu plusieurs réunions avant de reconnaître la pandémie de la Covid-19 et de susciter des mesures importantes à prendre par des dirigeants politiques mondiaux en fonction des réalités de chaque Etat et de l’évolution de la maladie. Elle a été pessimiste pour le Continent africain sous estimant l’environnement social et culturel de l’Afrique, continent le moins touché en termes de morts et de nombre des contaminés. La situation en Afrique a créé des incertitudes scientifiques relativement au dynamisme diagnostique de la maladie et de son expansion. Elle a relevé une dichotomie entre les zones de plein soleil et celles des rives côtières. Les statistiques ont démontré que les premières sont moins touchées par rapport aux secondes. Les enjeux climatiques et leurs variétés peuvent être retenus comme des postulats d’explication ou de justification des écarts des données.
L’OMS exposée, affaiblie par le discours trompien avec ses mesures inopportunes affectant son fonctionnement se trouve toujours confrontée aux besoins de financement de la recherche scientifique et des moyens conséquents de lutte contre la Covis-19. En effet, face à ce dilemme, seule la Chine a répondu promptement à l’appel des fonds de l’OMS. L’Europe, l’Afrique et les autres nations mettent en exergue des politiques régionales sanitaires avec divers organismes, oubliant la nécessité de la mutualisation des efforts pour des rendements clairs et substantiels.
La Covid-19 est une maladie universelle, par conséquent les moyens de lutte doivent être aussi universels. L’échange des expériences de tous horizons est primordial tout en évitant les querelles de gains sur le dos des victimes ou des probables malades. L’OMS se doit de diversifier ses lieux de rencontre ou de réunion en s’intéressant à la région du golf où il y a des richissimes bien que connus radins sur des questions de contribution financière pour des causes nobles. Une bonne et pertinente campagne de levée des fonds pourra mieux faire bouger les lignes. Certes, des experts plus autorisés que nous ne cessent de s’y pencher mais un rappel est toujours opportun et utile. La mondialisation doit être la tasse de thé de tout le monde en bien tout comme en mal. Les faibles de la planète ont des attentes légitimes à l’égard de l’OMS sur les paramètres d’acquisition des vaccins contre la Covis-19 pour un partage équitable. Les plus puissants espèrent avoir la part du lion, oubliant que la réouverture des frontières entre certains pays du Sud, du Nord va toujours être un véhicule de propagation du virus. Docteur David Narbarro envoyé spécial de l’OMS a laissé entendre que « ce virus ne va pas disparaitre. Il est là pour rester, comme une nouvelle menace pour l’humanité. Même si un vaccin arrive, cela ne signifiera pas la fin du virus. Cela signifiera que nous disposons d’un nouvel outil plus efficace pour combattre le virus. Mais désormais, nous devons gérer nos vies de manière à empêcher ce virus d’avoir une chance de nous infecter. »[iii]
L’OMS a enregistré un record de 4 millions d’infections avérées ces deux dernières semaines.
D’où l’intitulé du rapport 2020 du Conseil mondial de suivi de la préparation aux pandémies « Un monde en désordre »
- Le Conseil mondial de suivi de la préparation aux pandémies
Le Conseil mondial de suivi de la préparation aux pandémies (GPMB) (a) est un organe indépendant de surveillance et de transparence instauré conjointement par la Banque mondiale et l'Organisation mondiale de la santé. Il a été créé en réponse aux recommandations formulées en 2017 par l'équipe spéciale pour les crises sanitaires mondiales mise en place par le Secrétaire général des Nations Unies.[iv]
Il a été chargé de produire des réflexions sur la pandémie de la Covid-19 et dans ce cadre, il a produit un rapport 2020 en faisant le constat suivant : « La pandémie de COVID-19 a révélé l’incapacité collective à considérer la prévention, la préparation et la riposte à une pandémie avec le sérieux voulu et à établir des priorités en conséquence. Elle a démontré la fragilité des économies hautement interconnectées et des systèmes sociaux, et la fragilité de la confiance. Elle s’est immiscée dans les fissures des sociétés et des nations et les a aggravées. Elle s’est nourrie des inégalités, nous rappelant de façon brutale qu’il n’existe pas de sécurité sanitaire sans sécurité sociale. La COVID-19 a profité du désordre du monde. »[v]
L’OMS évolue avec ses panels de réflexions scientifiques pour prévenir les risques de maladie et de pandémie. Mais la Covid-19 a été une surprise du siècle créant un « monde en désordre » dans la lutte contre la pandémie.
La manifestation de cette organisation mondiale et de cette structure ad hoc ont donné naissance à un Pouvoir sanitaire planétaire à travers lequel les pouvoirs politiques, législatif, judiciaire et des médias doivent puiser pour prendre des décisions de direction et de changement des lignes éditorialistes.
En effet, le Pouvoir politique a été contraint d’attendre les directives du Pouvoir sanitaire planétaire pour prendre des mesures en empiétant sur le champ du Pouvoir législatif et laissant la charge de l’application de certaines mesures par le Pouvoir judiciaire avec le regard critique du Pouvoir de la presse.
Cette contextualisation crée une dépendance des dits Pouvoirs au nouveau Pouvoir avec une remise en cause des droits humains.
- La remise en cause des droits humains par la Covid-19
Pour ce faire, une sélection des droits humains mis en cause sera menée à travers les droits civils et politiques (A) et les droits économiques, sociaux et culturels (B).
- Les droits civils et politiques
A titre illustratif, il convient de citer le droit à la vie, à la liberté, le droit au respect de la vie privée, le droit à la libre circulation, le droit à la liberté de pensée, à la liberté d’opinion et d’expression et le droit à la liberté de réunion. Le premier droit humain est celui de la vie et la Covid-19 tue cette vie par conséquent rend à néant ce droit tant protégé par des instruments juridiques nationaux, régionaux qu’internationaux. La mobilisation des peuples et des dirigeants politiques a été de prendre des mesures drastiques pour protéger le droit à la vie.
Pour y arriver, les droits à la libre circulation et de réunion ont été les premiers à être atteints par des mesures de protection et de prévention contre la Covid-19. La fermeture des frontières et l’interdiction des réunions ou des manifestations publiques ont constitué le pivot des mesures gouvernementales sur l’échelle planétaire.
Le domaine de transport terrestre et aérien a été le plus touché entrainant l’isolement physique des peuples et des citoyens dans toutes les zones géographiques. Alors la mesure primordiale contre ces droits a été la décision politique de confinement, de couvre-feu, d’état d’urgence et de l’usage de la force publique.
L’Etat a décidé et il était présent dans la sphère privée de tout un chacun par des mesures de fermeture des lieux de distraction, de culte, de restaurations et le chapelet des règles de geste barrière (lavage des mains, restrictions des visites familiales, distanciation physique à la maison tout comme à l’extérieur etc…). La longue durée du confinement, près de six mois a été difficilement supportable entrainant des critiques de part et d’autre tant par des médias que par des citoyens. On assiste aujourd’hui à un vent de colère et de contestation en Europe contre certaines mesures de lutte conte la Covid-19.
Le droit de pensée, le droit à la liberté d’expression et d’opinion ont été également atteints par des poursuites pénales contre les citoyens voulant les exercer.
Le nouveau Pouvoir sanitaire planétaire s’est placé au premier plan face aux autres pouvoirs car tout dépendait de ses directives. Le Conseil de santé ou le Conseil scientifique, les organes centraux en charge des questions liées à la santé publique ont été les seuls repères des décisions politiques, législatives et judiciaires.
Cette situation a créé un « monde en désordre » remettant en cause les droits sociaux, économiques et culturels.
- Les droits économiques, sociaux et culturels
Le chômage, les faillites des entreprises, des sociétés, les ruptures, les difficultés d’approvisionnement alimentaire, la rareté et la cherté des produits dits de première nécessité, l’absence d’assistance sociale, le manque de soutien financier aux particuliers et à des sociétés dans certains pays ont été l’hécatombe des droits au travail, syndical, de grève, à la sécurité sociale, à l’éducation, à la santé, à un niveau suffisant de vie, bref le droit au bonheur. A titre illustratif, La pandémie continue de faire des ravages sur le marché du travail. Selon la dernière livraison de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) publiée mercredi 23 septembre, une projection de 245 millions d’emplois seront détruits d’ici quelques semaines.
Tous les systèmes d’organisation et de fonctionnement des Etats ont été perturbés dans toutes les directions. Le discours politique « divague, flotte et se durcit) sans clarté ni véritables solutions à la Covid-19 et l’avenir reste incertain. Le contexte est diffus et confus avec des registres des élections générales dans pas mal de pays notamment aux Etats Unis d’Amérique où le Président Donald Trump a de par sa politique nationale et étrangère remis en cause tous les codes traditionnels de coopération et de diplomatie. Il règne un état de guerre froide entre son pays et les autres puissances (la Russie, la Chine, la Turquie et l’Iran).
Les dirigeants européens cherchent une autre voie pour s’imposer sur le plan international tandis que l’Afrique est confrontée au terrorisme mouvant, aux questions liées à l’absence de confiance politique entre les classes, à la pauvreté sans cesse grandissante et à l’impunité généralisée. Tout cet environnement n’est point favorable à la renaissance des droits économiques, sociaux et culturels. Il nous est paru de comprendre que le monde n’a jamais aussi été incertain qu’à nos jours et ce depuis les mouvements liés au choc des civilisations. Les nations doivent se réorganiser pour d’une part rendre le monde ordonné et d’autre part faire en sorte que la mondialisation soit la tasse de thé de tout citoyen, de tout pays en bien tout comme en mal. La pandémie de la Covid-19 est universelle et les moyens de lutte contre cette dernière doivent aussi être universels et équitables.
Il y va de la survie de l’espèce humaine sur la terre et il faudrait le comprendre sans trop tarder car la maitrise de temps n’est pas du ressort de l’être humain au sens global du terme. Un virus sans vie tue des vies et à notre humble, il y a lieu de tenir un sommet international des Chefs d’Etat et des gouvernements spécialement autour de la pandémie de Covid-19. C’est une question centrale car concerne le premier droit humain à savoir le Droit à la vie.
Par Me AMANI Yahouza, Avocat à la Cour
[i] https://www.who.int/fr/news-room/detail/15-09-2020-who-s-three-messages-for-unga75
[ii] https://www.who.int/fr/about/who-we-are/constitution
[iii] Propos tenus à l’occasion de son interview à Euronews
[iv]https://www.banquemondiale.org/fr/topic/pandemics#:~:text=Le%20Conseil%20mondial%20de%20suivi,Organisation%20mondiale%20de%20la%20sant%C3%A9.
[v] https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/GPMB_AWID_ES_2020_FR.pdfsuivant