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Niger / Elections présidentielles : Pour une confrontation loyale et équitable, gage d'une certaine intelligence politique au service du pays.

L’investiture, comme candidats aux prochaines élections présidentielles, de deux autres poids lourds de la politique nigérienne, constitue à n’en point douter un évènement qui constitue un tournant majeur dans la campagne électorale 2020-2021. Par leur expérience politique et l'idée que les Nigériens se font de leurs personnalités, Hama Amadou et Albadé Abouba cristallisent les attentions comme épouvantes politiques pour certains et espoirs pour d'autres. Leurs envergures et l’importance de leurs réseaux à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, en font des adversaires redoutables, pour les autres candidats aux élections présidentielles.

Reste à voir leur capacité à proposer des alternatives suffisamment crédibles pour espérer emporter l'adhésion du peuple et d'autres formations politiques dès le premier tour puis préparer de solides alliances pour le second. Alliances susceptibles de libérer les talents politiques et valoriser des leaderships porteurs d'espoir pour permettre au pays d'affronter les défis qui l'attendent.

Il faut dire que la pratique politique de ces dernières années a fini par avoir raison des velléités « fragiles » et a désorganisé le paysage politique dans son ensemble.

Les multiples affaires de corruption et certaines pratiques impertinentes employées comme moyen politique de soumettre toute autre expression ont largement contribué à dégrader la qualité du débat politique. Les difficultés que rencontre la justice à poursuivre les auteurs d'actes graves s’explique à l’évidence par la crainte de certains cercles du Pouvoir de devoir rendre compte de leurs agissements et restituer au peuple ce qui a été usurpé. Cette instrumentalisation excessive de la justice risque de conduire au désordre et à la déstabilisation d’un processus démocratique encore embryonnaire et hésitant.

En effet, un bref regard sur certains aspects du fonctionnement de la justice au Niger démontre le caractère par trop sélectif des affaires mises au-devant de la scène et qui font l'objet de traitements particulièrement zélés. Les obstacles juridiques, à cause du doute qui entoure la motivation de ceux qui ont contribué à les poser, ne sauraient abuser ni l’intelligence collective des citoyens, ni leur volonté de s'affranchir de l'instrumentalisation outrancière de leur conscience politique.

L’intérêt du pays réside dans le respect des règles garantissant un fonctionnement non partisan des institutions de l'État. La puissance publique ne saurait être utilisée pour brider l’avènement d’un Etat de droit et d’une culture républicaine idéalement intégrée par l’ensemble des citoyens.  

Le Niger n’a pas les moyens politiques de se permettre une crise électorale qui pourrait le précipiter dans une confusion supplémentaire. La classe politique, notamment le Président de la République, devrait s’attacher à créer les conditions d’une compétition inclusive, loyale et équitable, garantissant à tous les candidats, sans autre forme de préjugés, la possibilité de se présenter devant les électeurs en toute transparence et impartialité. Le réalisme commande de ne pas s’enfermer dans un juridisme suspect qui n’aura pour conséquence que de déstabiliser le pays et diviser davantage les citoyens. Les institutions sont encore trop fragiles et pas assez crédibles aux yeux de l’opinion pour que leurs décisions ne fassent l’objet de suspicions. Parfois, l’intérêt supérieur doit primer sur toute autre considération afin de préserver l’essentiel, c’est-à-dire le respect des fondamentaux sur lesquels repose l’existence même du pays.

Le pays a plus que jamais besoin de stabilité et de retrouver un climat apaisé. Pour cela, les échéances électorales à venir auraient besoin d’une attention particulière afin d’éviter que la fraude et l'achat de consciences n'atteignent un niveau qui risquerait de dénaturer la volonté du peuple et donner lieu à des tensions inutiles.

Le marasme politique actuel maintient le pays dans un doute existentiel dans lequel les valeurs qui fondent la société sont mises à rude épreuve par des intérêts particuliers dont les agendas exposent le pays à des lendemains incertains. Ainsi, le pays tarde à concevoir la politique comme moyen de viser le bien-être des populations car le concept d'intérêt général s’efface au point de n'être qu'un rêve ressassé par quelques illuminés en marge de la société.

Le contexte géopolitique invite à un leadership national non clivant, à même de porter les intérêts du pays de manière convaincante sur le plan international.

Lyon le 21 septembre 2020

Abdoulahi ATTAYOUB

Consultant

@attayoub