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Rentrée scolaire 2017-2018 à Agadez : Les enfants nomades dans l’attente

L’inquiétude de la société civile

La société civile partage cette inquiétude des parents d’élèves. Ainsi, Attaher Mohamed, un acteur qui s’intéresse à l’éducation explique : ‘’ De tous les temps, on rencontre des problèmes à la rentrée scolaire surtout dans les villages reculés de la région. Les pistes sont mauvaises, et les véhicules sont rares. Mais cette année, c’est pire dit-il avant d’ajouter : ‘’ Nous demandons aux autorités régionales et aux responsables de l’éducation de tout mettre en œuvre pour permettre à ces enfants de bénéficier de leur droit à l’éducation. Trois semaines de retard c’est beaucoup’’.

Les pécules ne sont pas encore payés

Selon nos informations, l’absence des enseignants sur leurs lieux de travail s’explique par le non payement des pécules. En effet, ils sont nombreux les enseignants pour la plupart des contractuels qui attendent encore en ville de toucher leurs pécules pour prendre la route. Mahamane OUSMAN, un enseignant à l’IEP d’Aderbissanet explique : ‘’ Les raisons de ce retard au niveau des écoles de tous les villages dans les communes rurales ne dépassent pas le non payement des pécules’’ dit-il avant de poursuivre : ‘’ Comment voulez-vous que nous quittions Agadez pour aller dans la brousse mains vides. Nous avons des charges familiales. On doit régler certaines choses avant de quitter nos familles et aussi préparer notre rentrée. Le temps et les moments sont durs. Qui va prêter de l’argent à un enseignant contractuel. Ça nous fait mal de voir ces enfants qui attendent l’ouverture de leurs classes’’.

Alhassan IBRAHIM, enseignant à l’IEP d’Ingall se confie : ‘’ J’enseigne au village d’Injitan. Vous me voyez, je suis encore en ville bloqué par manque de moyens pour prendre la route. On attend encore nos pécules et rien n’a été signalé. Même nos collègues qui sont en ville, partent à l’école. Mais ils n’ont pas l’esprit tranquille, car les poches sont vides.’’. Son voisin qui est à l’IEP de Tchirozerine renchérit : ‘’ Les parents doivent nous comprendre. J’étais parti faire la prise de service et je suis revenu pensant retourner dans une semaine. Très malheureusement, les pécules sont bloqués et on ne sait pas pourquoi et par qui. J’espère que les autorités vont débloquer cette situation pour permettre aux enseignants de tous les villages de regagner leurs postes’’.

Une erreur des inspecteurs dans les états de payement

A la Direction régionale de l’enseignement primaire, de l’alphabétisation, de la Promotion des langues nationales et de l’éducation civique d’Agadez, on reconnait cette situation. M. Sani KANE, Directeur de l’enseignement primaire dit : ‘’ C’est vrai les pécules ont tardé jusqu'à la date d’aujourd’hui et c’est vraiment des erreurs indépendamment de notre volonté. Nous, on a fait de notre mieux et que chaque fois on essaie de se débattre pour qu’ils rentrent dans leurs droits comme tout fonctionnaire. Mais on dit que l’homme propose, Dieu dispose ‘’. Il a également donné des explications par rapport à la situation en ces termes : ‘’ on a fait les états de mandatement, et on a envoyé tout au niveau de Niamey. Il s’est trouvé qu’au niveau de nos collègues inspecteurs, il y a certains qui ont commis des erreurs par rapport aux canevas à suivre. Et, au niveau du ministère, on a rejeté tous les états de mandatement qu’on a renvoyé. Il faut que les inspecteurs corrigent. Voilà ce qui a un peu expliqué ce retard-là ’’.

Le DREP Agadez a cependant donné des assurances concernant le déblocage de la situation. ‘’ C’est qui est sûr, on avait appelé les inspecteurs, et ils ont tous repris en fonction des remarques faites. Ils ont déposé au niveau de la direction régionale et à l’heure où je vous parle, c’est déjà dans les mains du ministère et ils sont à pied d’œuvre pour renvoyer cela, afin qu’on puisse payer les enseignants contractuels. C’est une situation que nous déplorons vraiment, on ne l’a pas voulue. Vraiment qu’ils nous comprennent. Nous leur demandons de patienter, nous sommes là-dessus et très bientôt, ils auront leurs pécules si Dieu le veut’’.

Le Directeur régional de l’Enseignement primaire, de l’Alphabétisation, de la Promotion des langues nationales et de l’Education civique d’Agadez nous confie : ‘’ D’ailleurs, on a même demandé d’envoyer les états de mandatement du mois d’Octobre pour qu’ils puissent peut être même avoir les deux à la fois. Donc c’est cela notre souhait mais ce qui est sûr pour le mois de septembre c’est parti’’. Par rapport à l’inquiétude des parents et de la société civile sur l’impact de ce retard M. Sani KANE se veut moins alarmant : ‘’ C’est vrai dès qu’on parle de temps scolaire, même si c’est une minute qu’on soustrait de l’emploi de temps, vraiment cela joue sur l’enfant. Bon qu’est-ce que vous voulez comme je l’ai dit tantôt l’homme propose Dieu dispose. Ce désagrément est indépendant de notre volonté. Je dirais aux parents que nos collègues enseignants sont conscients de cette situation et ils vont consentir le sacrifice dont ils ont toujours fait montre pour rattraper le retard.

En attendant les «  Mouchen daji », ou disons les enseignants des brousses comme on aime à les appeler continuent de croiser les bras en ville attendant ce qui leur revient de droit tandis que les pauvres enfants nomades aux regards innocents et tristes sans aucun recours observent des classes fermées. Pourtant ils ont droit à l’éducation comme tous les autres.

Issouf Hadan (Agadez)

23 octobre 2017
Source : La Nation