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École nigérienne : Daouda Mamadou Marthe, entre le marteau et l’enclume

Les enseignants supplétifs ou se trouvant dans les bureaux sont scandaleusement nombreux sans rien faire

Des informations persistantes en provenance de milieux proches des centres de décision parleraient de redéploiement d’enseignants qui pullulent dans les écoles situées dans les grands centres urbains comme Niamey. Il y en aurait des milliers, selon un témoignage digne de foi. Ce sont généralement des personnels de deux types : le premier est composé d’enseignants affectés dans les centres urbains au nom de leur appartenance à un syndicat de l’éducation ; le second est peuplé de femmes, affectées dans les localités de résidence et de travail de leurs conjoints. Une vieille tradition qui s’est amplifiée avec l’accroissement de la population enseignante Les enseignants supplétifs dans les écoles sont scandaleusement nombreux. Des femmes pour la plupart, elles sont là, parfois à trois, voire quatre ou même plus à se tourner les pouces ou à faire de la manucure-pédicure dans les écoles en attendant la fin du mois pour percevoir un salaire ou un pécule…sans rien faire comme dirait Hassoumi Massoudou. Sans classe, elles sont en complément d’effectifs alors que des écoles restent désespérément fermées au Niger par faute d’enseignants. Quant aux enseignants affectés pour appartenance au bureau d’un syndicat, il en pleut tous les ans au rythme de création de syndicats.

Plus de huit milliards distribués à des enseignants qui n’ont plus d’autre attache avec l’école que le salaire que l’Etat leur verse

Selon des sources crédibles, il y aurait dans le cycle primaire une soixantaine de syndicats d’enseignants. Une pléthore inutile pour garantir la défense des intérêts des enseignants et qui grève considérablement les capacités de couverture scolaire de l’Etat. Avec 15 membres de bureau exécutif national qui doivent être affectés à Niamey, ce n’est pas moins de 900 enseignants qui se promènent à Niamey pour toucher, à la fin de chaque mois, un salaire non mérité. Si vous démultipliez ce nombre en huit (le nombre de chefs-lieux de régions), vous aurez le phénoménal chiffre de 7 200 enseignants à qui l’Etat verse généreusement des salaires à…ne rien faire. C’est principalement ce phénomène qui a saigné le système éducatif nigérien durant des années. Et ça continue encore ! Une situation désastreuse qui ne date pas d’aujourd’hui mais qui s’est considérablement aggravée ces dernières années avec le recrutement anarchique dans le secteur de l’enseignement. Rien que dans la ville de Niamey, les enseignants payés à ne rien faire se comptent par centaines. Ils atteindraient peut-être même le millier sur les sept inspections de Niamey. 1000 enseignants payés régulièrement sans contrepartie de travail effectué, ça fait, en raison de 100 000 FCFA de salaire en moyenne, la somme de 1 200 000 000 FCFA par an et pour la seule ville de Niamey. Appliqué aux huit régions du pays, le calcul donne un résultat effarant : plus de huit milliards distribués à des enseignants qui n’ont plus d’autre attache avec l’école que le salaire que l’Etat leur verse. Astronomique pour un pays comme le Niger. Inacceptable surtout !

Les inspections auraient choisi de garder les résultats secrets pour pouvoir les manipuler, à tout moment, et y placer des protégés et des « clients » éventuels

La problématique est claire. Mais il faut une dose de courage et de sincérité qui fait défaut dans la gouvernance actuelle. Le désir d’épargner des militants ou de faire du « A djara » par-ci, par-là, va né- cessairement fausser les belles intentions de redéployer les enseignants dans les écoles, partout où besoin se fait sentir. Les faits ne militent pas en faveur du régime actuel. Les différents concours d’entrée à la Fonction publique ont été entachés de graves irrégularités dont les commanditaires se trouvent au plus haut sommet de l’Etat. Les résultats de l’évaluation des enseignants contractuels, tenus secrets dans les inspections où ils ne sont toujours pas affichés. Une attitude qui, selon des enseignants contractuels, ne seraient pas clean. Les inspections de l’éducation ne joueraient pas franc jeu. Pourquoi gardent-elles secrets les résultats de l’évaluation ? Des sources bien informées ont indiqué que cette attitude des inspections n’est pas forcément dictée par des directives de l’administration centrale. Elle pourrait découler de stratégies visant à manipuler, à tout moment, les listes pour y placer des protégés et des « clients » éventuels qui seraient prêts à acheter leur place dans le système. Rendre les listes connues de tout le monde compliquerait le jeu. En fin de compte, si l’éventualité n’est pas à écarter, Daouda Mamadou Marthe n’aura réussi qu’un coup d’épée dans l’eau. Les inspecteurs, eux, tireront les marrons du feu sans brûler les doigts et la qualité des enseignements tant prônée ne connaîtra aucune amélioration.

14 septembre 2017
Source : Le Courrier