Affaire BAGRI : Rebondissement dans l’affaire, des langues se délient
Le détournement présumé de fonds à la Banque agricole du Niger (BAGRI) a pris des proportions exagérées où le faux aurait été érigé en vrai par une certaine officine politique. À la lumière des faits, il semble apparaître clairement que cette affaire est cousue de fil blanc.
Un rachat annoncé
L’affaire est rendue publique par une cabale médiatique inouïe lancée contre certains cadres de la Banque Agricole du Niger (BAGRI) par une poignée de ‘’cyber activistes’’ dont les liens avec le pouvoir en place sont plus qu’évidents. Tout laisse comprendre que l’opinion nationale (et même internationale) a été conditionnée dans le sens d’accepter toute la littérature tendancieuse produite autour de ce détournement présumé de fonds. En seulement quelques heures, la frontière entre le vrai et le faux a été franchie. C’est justement, selon des sources crédibles, le but recherché par les auteurs de cette machination. Pour détricoter ce tissu de mensonges, des langues se délient pour indiquer qu’il faut remonter aux sources de cette affaire dans laquelle s’entrechoquent des intérêts personnels sur fond de deals entre politiciens nigériens et hommes d’affaires étrangers.
En août 2018, la presse a fait cas d’une information selon laquelle : « La Banque populaire de Mauritanie (BPM) a été sélectionnée pour reprendre la Banque agricole du Niger (BAGRI) suite à l’appel d’offres international lancé par l’État nigérien pour la cession de 70% des parts de BAGRI ». Pour rappel, la BPM est contrôlée par l’homme d’affaires mauritanien Mohamed Ould Bouamatou, réputé proche de l’ancien président Issoufou Mahamadou. Autre précision de taille, c’est au moment où la BAGRI renaît de ses cendres (après sa mise sous administration provisoire de juillet 2013 à mars 2014) que le régime d’alors a décidé de placer un de ses protégés au sein du staff dirigeant de la banque. C’est un véritable lobbying qui a été fait pour catapulter un certain Maiga au poste de Directeur général adjoint (DGA) de la BAGRI. Ce dernier aurait été précédemment chef service réseau à la Banque Sahélo-Saharienne pour l’Investissement et le Commerce (BSIC).
Des flux créditeurs
Le détournement présumé de fonds dont il est ici question, aurait pour soubassement une dénonciation auprès de la Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF) portant sur deux (2) comptes d’épargne ouverts par l’ancien chef d’agence BAGRI-Plateau. Ces deux comptes auraient enregistré des mouvements créditeurs de près de quatre (4) milliards FCFA sur une période allant de 2018 à 2022. À noter que lesdits comptes auraient été ouverts aux noms de M.Z (agent de ménage à la BAGRI) et M.Y (électricien à l’Assemblée nationale). Ces deux personnes seraient respectivement le cousin et l’oncle de l’ancien chef d’agence BAGRI-Plateau. Sommé de s’expliquer sur les mouvements créditeurs constatés sur ces deux comptes, l’ancien responsable de l’agence BAGRI-Plateau aurait déclaré que c’était le moyen qu’il avait trouvé pour surmonter ses difficultés de trésorerie en cas de retraits importants. C’est sur l’ensemble de ces mouvements créditeurs que reposerait la dénonciation auprès de la CENTIF. Et à certains spécialistes du système bancaire de se poser la question de savoir si l’on pourrait parler de ‘’détournement de fonds’’, au sens comptable et juridique du terme ? Cela d’autant qu’à la date d’aujourd’hui, la BAGRI ne s’est plainte d’aucun préjudice financier. Pas un seul client de la banque ne s’est dit victime de quelque tort que ce soit. L’on se demande alors pourquoi est-ce que le Directeur général, le Directeur commercial et le Directeur financier de la BAGRI, sont toujours en détention ?
Contrairement à la fausse information distillée au sein de l’opinion, la banque n’aurait pas perdu près de 4 milliards FCFA. Dans le rapport sur la première édition du forum national des entreprises et établissements publics du Niger (octobre 2022), il est clairement écrit : « Sur la base des indicateurs de performance, seules 5 entreprises ont été performantes sur les 15 analysées ». La BAGRI fait partie de ces entreprises publiques dont les bilans financiers ne sont pas déficitaires. Ce satisfecit des autorités de tutelle n’existerait pas si la BAGRI avait réellement perdu près de 4 milliards FCFA, soit quasiment la moitié de son capital social. Également, si quelque 4.000 millions FCFA ont été sortis des caisses de la BAGRI de manière frauduleuse comme le font croire les ‘’cyber mercenaires’’, la Commission bancaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) aurait tiré la sonnette d’alarme depuis fort longtemps.
Des intérêts inavouables
Toutes les investigations journalistiques faites pour situer l’auteur de la fameuse dénonciation auprès de la CENTIF mènent vers un grand agent de la banque. Des forts doutes pèsent sur cet agent qui aurait joué un rôle de premier plan dans l’intrigue machiavélique ayant conduit à l’arrestation de plusieurs cadres de la BAGRI. Avant de saisir la CENTIF, l’agent aurait d’abord tenté d’embarquer la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA) dans sa combine. Cette félonie n’aurait pas prospéré. Très impliqué dans la reprise de la BAGRI par BPM, Issoufou Mahamadou se serait appuyé sur cet agent pour avoir des yeux (et des oreilles) sur les cadres de la BAGRI hostiles au deal que propose la banque mauritanienne. Malgré tout, et on ne saurait pour quelles raisons, le rachat de la BAGRI par BPM n’avait pas été conclu sous Issoufou Mahamadou. Voilà que ce projet refait surface le 28 décembre 2022 à l’occasion de l’inauguration d’une centrale thermique à Zinder en présence du Président Bazoum Mohamed. Curieusement, peu de temps après cette cérémonie, a débuté un tintamarre médiatique orchestré par des petites mains au service d’un lobby politique. La prétendue affaire BAGRI est ainsi née. Certains observateurs se demandent si ce sont les mêmes intérêts que ceux du temps d’Issoufou Mahamadou qui entrent en jeu dans la cabale dont sont aujourd’hui victimes certains cadres de la BAGRI. Avant la centrale thermique de Zinder, une autre a été inaugurée, le 17 mars 2021, à Goudel (Niamey) par le président Issoufou Mahamadou. Ces deux installations électriques ont étés réalisées par ISTITHMAR West Africa, une entreprise mauritanienne contrôlée par ISTITHMAR Word, une société d’investissements basée à Dubaï. Selon des sources crédibles, Bazoum Mohamed serait proche des dirigeants de ISTITHMAR Word.
Question : la BAGRI serait-elle finalement destinée à être absorbée par ISTITHMAR Word plutôt que par BPM ? Ce qui est sûr, le timing de l’ébruitement de l’affaire suscite des interrogations. Il pousse à l’évidence que dans ce dossier des intérêts inavouables se côtoient à tous les niveaux. Du reste, pendant que les auditions étaient en cours à la Police Judiciaire, au mépris du principe fondamental de la présomption d’innocence, les prévenus ont été « jugés et condamnés » par quelques mercenaires de la plume qui se sont déversés sur les réseaux sociaux. Certains médias internationaux ont été également mis à contribution par les commanditaires de la conspiration. La vitesse ahurissante avec laquelle le Conseil d’Administration s’est réuni pour désigner le directeur général par intérim, en dit long sur les intentions de ceux à qui profite la mise à l’écart de Lawan Mossi et ses compagnons d’infortune.
Des faits qui prouvent le complot tramé contre ces cadres de la BAGRI.
Alpha