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Dossier / Hausse des prix des céréales : Les consommateurs ne se retrouvent plus

Depuis quelques temps, les prix des céréales sur le marché a considérablement connu une hausse ‘’hallucinante ‘’. Les vendeuses de galettes, de beignets de haricot ou encore de farine de maïs ne se retrouvent plus dans le petit commerce qu’elles exercent pour subvenir à leurs besoins. En effet, en dehors des pères de famille, ces dames qui se cherchent dans les petits commerces à base de céréales sont dans une situation inconfortable voire embarrassante. Ainsi, dans les marchés tout comme dans la ville, les plaintes ne tarissent pas de la bouche des gens. Mme Halima, vendeuse de farine de maïs et vivant de ce petit commerce depuis quelques années, n’a pas manqué d’exprimer son désarroi face à cette situation. Selon elle, il est juste inconcevable que les prix des céréales connaissent une telle hausse en un temps record. Avec cette hausse, a-t-elle expliqué, elle est obligée de ‘’réduire sa main’’, autrement dit de diminuer la quantité de la farine qu’elle vend en sachet à 100 FCFA. « Si je dois payer la tasse de maïs à 1850 F, il me faudra au moins un bénéfice de 900 FCFA et donc je dois réduire un peu dans la quantité de farine que je mets dans le petit sachet blanc de 5 F pour pouvoir m’en sortir », a rapporté la bonne dame. Cette situation, selon elle, ne profite à personne. C’est pourquoi, elle souhaite que les autorités se penchent sur la question afin de revoir les prix des céréales.

Cependant, Mme Halima n’est pas la seule à souffrir de cette situation ; Mme Fili, vendeuse de beignets à base de haricot et de farine de blé, rencontre également des difficultés dans l’exercice de son métier avec la flambée des prix de céréales. Selon ces dires, avec la tasse de haricot qui se vend à 2000 F, rares sont les jours où elle gagne un bénéfice sur la vente de ces beignets. Sans compter ces jours noirs, a-t-elle dit, où elle se retrouve avec un reste de beignets non-vendu, ce qu’elle a d’ailleurs qualifié de grosse perte. « Avant, je n’avais pas peur d’avoir un reste de beignets de haricot car même si je ne vendais pas tout, je pouvais être sûre que j’aurais un bénéfice conséquent mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Même en vendant tout, ce n’est pas sûr d’avoir un bénéfice », a –t-elle déploré.

Hadjia Mariama aussi regrette cette situation. Elle a expliqué qu’avant la farine de maïs de 500 F qu’elle payait lui permettait de remplir son petit seau d’eau de pâte de maïs mais avec cette cherté des céréales, à peine elle a la moitié de son seau. Face à cette situation, elle se demande ce qu’il adviendra du pauvre citoyen dont l’alimentation est à 90% à base de céréales. Et pourtant, a-t-elle souligné, nous sommes dans une période dans laquelle l’espoir de nouvelles récoltes se fait sentir.

Ces mères de famille ne sont pas les seules à se plaindre : certains hommes aussi déplorent cela. Les amateurs de la bonne boule de mil ‘’foura ou donou’’ accompagnée de lait caillé avec ou sans sucre et les consommateurs de ‘’Dambou’’ ou couscous de maïs sont aussi dans le lot des frustrés. En somme, comme l’a dit Mme Halima, cette situation ne profite à personne.

Par Rahila Tagou


Les commerçants s’inquiètent et justifient la flambée des prix

Au Niger, la principale base de l’alimentation des populations est constituée par le mil, le maïs, le sorgho, le riz et le niébé, qui sont des cultures vivrières de ce pays sahélien de plus de 23,3 millions d’habitants. Même si le Niger produit ces denrées à travers des travaux champêtres et des cultures irriguées, la poussée démographique, la pression foncière et la dégradation continue des terres cultivables, obligent le pays à importer toutes ces céréales, pour combler le gap de la production et répondre ainsi à la demande nationale. Dans plusieurs régions du pays comme à Niamey la capitale, depuis un certain, on constate une flambée des prix de ces céréales, doublée d’une indisponibilité de ces produits dans certaines zones. Selon le 1er Vice-président du Syndicat des Commerçants Importateurs de céréales, Elhadj Manomi Tourmi, cette hausse et cette inaccessibilité des céréales s’expliquent par la décision prise par le Burkina Faso et le Bénin d’empêcher la sortie de leurs territoires de leurs productions céréalières. Des mesures qui sont aux antipodes des textes communautaires relatifs à la libre circulation des personnes et de leurs biens dans l’espace de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Mieux, ces attitudes et comportements nuisent gravement à l’intégration économique à l’ère où la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAF) devrait permettre au continent d’améliorer ses échanges commerciaux intra-africains. «Récemment, au Burkina, près d’une centaine de nos camions, transportant essentiellement du maïs vers le Niger ont été bloqués au niveau des deux frontières que nous partageons avec ce pays, à savoir Kantchari et Petelkole. Ces camions ont été renvoyés à Ouagadougou pour décharger leurs cargaisons et sont revenus bredouilles au Niger. Ils ont avancé comme prétexte le fait que leur production céréalière ne couvre pas, eux-mêmes, leur besoin. Donc, ils ne peuvent accepter qu’on l’exporte ailleurs », explique Elh. Manomi.

En 30 ans de commercialisation de céréales, Manomi Tourmi dit n’avoir jamais vu le prix du sac de 100 Kg de maïs monter jusqu’à 30.000 FCFA. Selon lui, ce prix a toujours vacillé entre 22.000 et 23.000 FCFA. « Actuellement, même avec 30.000 FCFA, tu ne peux pas trouver le sac de maïs, car il y a rupture de stock », alerte-t-il. Le Vice-président du Syndicat des Commerçants Importateurs de céréales estime que ce genre de mesures, que prennent les pays voisins du Niger, sont contraires aux textes communautaires relatifs à la libre circulation des personnes et de leurs biens dans l’espace de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et de la Communauté Economiques des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Mieux, ajoute le commerçant, ces attitudes et comportements nuisent gravement à l’intégration économique à l’ère où la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAF) devrait permettre au continent d’améliorer les échanges commerciaux intra-africains. En dépit de cette situation, Elh. Manomi estime, qu’avec la récolte de cette année, même si la campagne agricole n’est pas totalement achevée et que par endroit elle n’a pas été bonne, non seulement les céréales seront disponibles mais aussi leurs prix vont chuter.

« Déjà, à certains endroits, on trouve le sac de 100 Kg de maïs entre 17.500 et 18.000 FCFA. Quant au mil, les 100 kg se vendent à 21.000 ou 22.000 FCFA, alors qu’il y a quelques semaines, c’était vendu à 28.000 FCFA. Quant au niébé, il était vendu jusqu’à 55.000 voire 60.000 FCFA. Ce que nous n’avons jamais vu auparavant. Mais heureusement le sac de 100 kg de niébé est retombé à 30.000 ou 31.000 FCFA », détaille le commerçant. Malgré cette relative accalmie des prix, le Vice-président du Syndicat des Commerçants Importateurs de céréales est sceptique et inquiet. «Vu que la campagne agricole n’est pas bonne partout, les prix risquent de connaître des flambées dans les semaines et mois à venir», s’alarme-t-il. Lançant un appel, Elh. Manomi propose à ce que les autorités prennent, dès à présent, la mesure des menaces pour prévoir des aides aux populations nécessiteuses et éventuellement négocier avec les autres pays pour permettre l’importation de ces céréales vers notre pays.

Par Mahamadou Diallo


«Pour avoir une stabilité des prix des produits vivriers au Niger, il faut un engagement politique très fort», selon le président de ADDC WADATA

Ces derniers temps, la population fait face à une cherté des produits viviers, notamment les céréales. Il est ainsi constaté la hausse des prix des produits comme le maïs, le mil et le niébé. Ainsi, les organisations de la société civile intervenant dans la défense des droits de consommateurs se prononcent sur cette question, avançant les raisons de cette hausse, mais aussi proposant des alternatives au gouvernement en vue de soutenir les populations les plus nécessiteuses. Pour le président de ADDC-wadata, M. Noura Mahamane, cette hausse des prix qui est observée ces derniers temps sur les marchés est relative. Dans ses analyses, il a expliqué qu’elle est plus constatée dans les zones urbaines. «Il y’a une hausse relative des prix des céréales sur les marchés. Mais cette hausse cache une certaine disparité. Elle n’est pas généralisée. Elle est plutôt beaucoup plus concentrée au niveau des centres urbains. Par exemple pour le niébé, on a constaté une baisse ; ensuite une hausse de ce produit. Cette baisse a atteint jusqu’à 650 Franc la mesure ( ’’tiya’’). Actuellement, le prix est remonté jusqu’à 800 francs la mesure dans certaines localités », a-t-il expliqué. En ce qui concerne le mil, le prix est un peu stable, ajoute-t-il. Le prix de la mesure tourne jusqu’à présent autour de 600 F voire 650 F. Le président de ADDAC-Wadata souligne par contre qu’au niveau du maïs, le prix de la mesure est aussi à 600 F, mais on constate une baisse relative qui cache une certaine disparité. « Cette hausse est beaucoup plus sensible particulièrement dans les grosses agglomérations urbaines. En zones locales, étant entendu que c’est la période des récoltes, on sent un certain apaisement par rapport à ces prix», a-t-il souligné. Parlant des raisons de cette hausse, M. Noura Mahamane a expliqué qu’elle est liée à deux facteurs. Le premier facteur, selon lui, est lié à l’épuisement du stock de sécurité alimentaire notamment de l’année passée mais aussi à la campagne agricole qui semble être un peu déficitaire dans certaines localités du pays. «L’installation particulièrement de la pluviométrie est un peu déficitaire dans certaines localités, par exemple dans la région de Tillabéry, un peu Tahoua, un peu aussi le Nord Dosso, ou le Nord Zinder. C’est vraiment des zones de production très importantes et dont les impacts par rapport à la disponibilité du stock au niveau du marché influent sur la baisse des prix. Cette année, on constate que la tendance dans ces zones est relativement déficitaire. Donc, c’est l’une des raisons de ces hausses relatives. Si on ne fait pas attention, cette hausse va encore s’exacerber», a-t-il averti.

Il a souligné que la deuxième raison est liée aux débuts des récoltes. «La récolte n’est pas effective dans toutes les régions et au sein même des régions dans les localités agricoles, elle est disparate. C’est pourquoi, on ne peut pas avoir la disponibilité des vivres sur les différents marchés », a précisé M. Noura Mahamane. Contrairement au maïs, dont la hausse est liée à l’importation, pour les autres produits, c’est ces raisons qu’il faut retenir, ajoute-t-il.

Actuellement, pour le maïs, c’est l’ancien stock importé qui est en vente. Mais, là également, le président de ADDC-wadata a souligné que la hausse ne va pas durer, c‘est une question de deux à trois semaines. «Elle va s’apaiser dans les deux ou trois semaines à venir. Le prix du maïs est aussi instable parce que tout simplement, à cause de l’indisponibilité des autres céréales, les consommateurs vont faire recours au maïs», a martelé M. Noura Mahamane. En perspective et pour faire face à ce genre de situations, le président de ADDC-wadata interpelle les autorités. « Pour avoir une stabilité des prix des produits vivriers au Niger, il faut un engagement politique très fort. Le stock de sécurité vivrière tel qu’on le prévoit, va toujours obliger l’Etat à demander aux partenaires de l’appuyer pour reconstituer le stock alimentaire. C’est vrai, c’est un dispositif qui permet à l’Etat d’avoir des produits, mais plus généralement, ce stock ne couvre pas les besoins de la population. Donc, il faut carrément changer le dispositif du stock de la sécurité alimentaire. Il s’agit à notre avis de multiplier les retenues d’eau afin de promouvoir la culture de contre saison. De cette façon, il y’aura une disponibilité en eau de surface. Ce qui permet dès la fin de la campagne agricole de commencer la culture de contre sison », a-t-il indiqué.

Il a souligné que les retombées de cette campagne de contre saison permettent de faire face aux déficits constatés dans certaines localités du pays. Aussi, en termes de solution, Noura Mahamane a préconisé aux pays de s’orienter vers la culture du maïs. «Nous sommes à 100% importateur du maïs, parce que nous ne le produisons pas. On ne peut pas être dépendant d’un produit particulièrement un produit utilisé à plus de 90% des ménages et ne pas être en mesure de le produire chez nous. Il faut que l’Etat revoie sa copie d’accompagnement de la population par rapport à la production des céréales. Il faut prévoir des régions ou des localités spécialisées dans la production du maïs », a-t-il lancé. Enfin, il a appelé les autorités à doubler la quantité du stock de sécurité alimentaire afin de couvrir l’ensemble des besoins des populations. M. Noura Mahamane a aussi saisi cette opportunité pour lancer un appel pressant aux opérateurs économiques, notamment les importateurs des produits céréaliers, et ceux qui achètent sur place pour stocker à avoir un regard en vers les plus pauvres.

Propos recueillis par Ali Maman

24 octobre 2021
Source : http://www.lesahel.org/