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Cinéma : Diagnostic de l’industrie cinématographique au Niger en 2019

Un Centre National de la cinématographie laxiste

Mais le constat est amer, quand il s’agit d’appliquer les textes par les cinéastes et la tutelle. Nous attendons toujours chez les cinéastes la mise en place d’un fonds d’aide à la production cinématographique nigérienne, ce qui est tout à fait juste et salutaire pour un cinéma nigérien vivant. D’ailleurs l’ordonnance du 29 juillet 2010 le prévoit. Mais, l’Etat du Niger, doit-il mettre ce fonds à la disposition des cinéastes et du centre de cinéma ? En effet, jusqu’en fin décembre 2018, aucune société de production nigérienne dans le cadre de la réalisation de ses films, n’a déposé les contrats des techniciens qui y sont sur leurs films au CNCN. De quoi intéresser le fisc nigérien.

Dieu, seul sait combien de films sont produits et diffusés au Niger, en tout cas pas par le CNCN, qui ne tient pas un registre public comme le dispose l’article 2 de l’ordonnance 2010-0-46 du 29 juillet 2010 qui stipule que : « Il est tenu au Centre National de la Cinématographie du Niger (CNCN) un registre public destiné à assurer la publicité des titres provisoires ou définitifs relatifs aux œuvres cinématographiques et vidéographiques produites, distribuées ou exploitées au Niger, ainsi que des contrats, conventions, actes, décisions judiciaires, et sentences arbitrales intervenus à l’occasion de leur production, de leur distribution, de leur exploitation ou de leur promotion ». Au Niger il y a des techniciens de cinéma et de l’audiovisuel qui prestent et gagnent assez de fonds dans l’informel à cause d’un CNCN limité pour y faire face.

Un registre public de cinématographie inexistant

En vue de générer de ressources et constituer une base de données pour la recherche scientifique et la conservation du patrimoine cinématographique du Niger, l’article 4 de l’ordonnance 2010-0-46 du 29 juillet 2010 a prévu 

que : « Le titre provisoire ou définitif d’une œuvre cinématographique ou vidéographique destinée à la représentation publique au Niger doit être déposé au registre public de la cinématographie par le producteur ou son représentant. Le conservateur du registre public attribue un numéro d’ordre au film dont le titre est déposé. Si le producteur d’une œuvre s’abstient d’effectuer ce dépôt, toute personne ayant et/ou intérêt pour demander l’inscription d’un acte, d’une convention ou d’un jugement pourra le faire.»

Un manque à gagner pour l’Etat et les cinéastes

C’est dire qu’autant de précautions ont été prises pour tendre vers une industrie du cinéma au Niger. Cette industrie qui doit regrouper l’ensemble des techniciens et acteurs de la production (du financement à la réalisation, de la distribution à l’exploitation), qui de manière encadrée concourent à la vie d’une œuvre, qui soit profitable à l’Etat par la mobilisation des taxes sur les différents contrats élaborés par le producteur et profitable aux acteurs qui sont sur le film. Mais, loin de là. Du CNCN aux cinéastes, l’amateurisme est gage de succès. Pourtant, il suffirait d’une petite rigueur pour que le cinéma nigérien s’autofinance. Nous donnons juste un petit exemple pour attirer l’attention de la tutelle et des autorités politiques que le cinéma nigérien peut devenir une industrie et les métiers du cinéma nourriraient leur homme. D’abord on ne fait pas un film pour en faire. Un projet de film se prépare à travers un dossier de production bien ficelé pour la recherche de son financement. Donc, plusieurs spécialistes travaillent autour de ce dossier. Une fois, le financement obtenu, là intervient d’autres acteurs pour le prêt à diffuser, la distribution, l’exploitation et la promotion pour que le film soit rentabilisé.

Il faut dire qu’à chacune des étapes, des contrats de prestation, de vente ou de location sont signés pour mettre tous les acteurs dans leurs droits. Au Niger, il faut souligner qu’il n’y a pas de grille tarifaire pour les prestations des différents acteurs sur un film, ce qui pourrait conduire à une exploitation des acteurs par le producteur et aussi, un manque à gagner pour le fisc nigérien, qui jusque-là ne s’est pas donné les moyens de contrôler le fonds des films des sociétés de production cinématographique. Il est alors temps d’accepter de se professionnaliser à l’instar des pays comme l’Afrique du Sud, le Maroc, le Ghana, le Nigéria où nous pouvons parler sans risque de nous tromper de véritable industrie de cinéma en Afrique, car leurs cinémas génèrent de fonds et sont encadrés.

Youssoufa Halidou Harouna / Critique de cinéma

10 octobre 2019
Source : http://www.lesahel.org/