Culture : Faire de la Parenté à Plaisanterie un instrument de développement national
Du 10 au 14 février 2023, dans le cadre du mois de l’expression des pratiques de la parenté à plaisanterie, se sont déroulées à Zinder des activités culturelles. Celles-ci qui ont regroupé, les huit (8) régions administratives du Niger, ont vu les troupes culturelles régionales présenter des sketches de quinze minutes et des séquences d’humour de cinq minutes. Les thématiques présentées ont tourné toutes autour de la cohésion sociale et de la paix ; ce qui avait été fort louable et fort appréciable. Membre du Jury National ayant eu à apprécier et à primer les œuvres culturelles présentées à Zinder, malgré les quelques recommandations pertinentes formulées sur place à Zinder, il nous a semblé nécessaire de faire quelques propositions additives d’amélioration, pour les échéances à venir.
De prime à abord, il conviendrait de savoir que contrairement à certaines idées farfelues et saugrenues répandues, contrairement à la conception simpliste de certains individus sous informés historiquement, et mal inspirés culturellement, la parenté à plaisanterie est tout sauf un jeu. C’est plutôt une pratique sociale ancestrale, séculaire, ancrée dans les mœurs sociales, remontant à la nuit des temps, laquelle a été instituée par nos aïeux. Elle a pour mobile principal, c’est-à-dire pour raison d’être principale, la coexistence pacifique des communautés vivant sur une aire géographique donnée. Mais elle implique obligatoirement en plus et nécessairement, des actions d’entraide, de solidarité, et de développement commun.
La parenté à plaisanterie n’a pas été instituée ex nihilo ; c’est-à-dire par hasard, par snobisme, par fanfaronnade, par besoin de se distraire le plus simplement du monde comme des gamins insouciants. Elle a été « construite » sur des substrats solides ; c’est-à-dire sur des fondements solides. Ceux-ci sont : le mariage, l’amitié, le pacte scellé, le bienfait, la migration, le phénomène surnaturel… Elle remplit trois fonctions sociales lesquelles sont : la fonction cathartique, la fonction affinitaire, la fonction unitaire ou fédératrice.
La fonction cathartique, consiste à concocter des blagues salaces et croustillantes dont on « affuble » le parent à plaisanterie, pour plaisanter. Histoire de rigoler à n’en pas finir, mais aussi histoire de faire valoir son droit naturel de parent à plaisanterie séculaire.
La fonction affinitaire, consiste à voir des communautés diverses vivant sur une aire géographique commune, entrer en contact, entretenir de arelations fécondes, s’apprécier, s’estimer, et finir par avoir des accointances, des attirances du fait de la coexistence pacifique.
La fonction unitaire ou fédératrice, consiste à voir à terme des communautés diverses vivant sur un espace territorial donné, se brasser, se mêler, s’unir, et finalement se constituer en une nation unique. Cela devrait être le vœu de tout dirigeant communautaire quel qu’il soit.
Comme la fonction cathartique est tellement la plus prisée par les gens, elle a fini par supplanter les deux autres fonctions non moins importantes. Pourtant, la parenté à plaisanterie on n’aura cesse, de le dire, n’est pas un jeu ; elle est plus qu’un jeu. Elle a des implications sociales, politiques, économiques. Des implications très importantes lesquelles font, qu’il est véritablement maladroit de croire que la parenté à plaisanterie se résume à être un simple jeu ; à être un simple divertissement.
Compte-tenu du fait que la parenté à plaisanterie accomplit d’autres fonctions, autre que la fonction cathartique, il est absolument nécessaire d’en faire un « véritable instrument » de développement. Avant de dire comment en faire un « véritable instrument » de développement, voyons les constats que nous avions faits, lors des différentes prestations culturelles à la Maison des Jeunes et de la Culture (MJC) Abdoussalam Adam de Zinder du 10 au 14 février 2023.
Le premier des constats que nous avions fait, c’est la confusion des genres culturels. Il y a eu amalgame souvent ; on a eu à confondre théâtre et sketch. Alors même qu’il y a une nette différence entre le théâtre et le sketch. Le théâtre se démultiplie en plusieurs tableaux ; alors même que le sketch ne comporte qu’un seul tableau.
Le deuxième des constats que nous avions fait, c’est par rapport à la maitrise de la langue maternelle utilisée. Beaucoup d’acteurs ont fait montre de défaillances langagières, quoique faisant usage des langues maternelles qu’ils sont censés parler à merveille. A l’avenir, il faut s’assurer de la parfaite maitrise de la langue maternelle utilisée par les différents acteurs.
Le troisième des constats, que nous avions fait, c’est l’inadéquation de la tenue portée par l’acteur et le rôle qu’il a joué. Une parfaite alliance est requise entre l’acteur jouant un rôle quelconque, d’avec la tenue vestimentaire qui sied. Cela est très important, car l’on doit faire comme si c’est vrai. L’acteur doit savoir être dans la peau du vrai « interprétateur » d’un rôle.
Le quatrième constat, que nous avions fait, c’est la « focalisation » unique sur les deux thématiques principales : Cohésion Sociale et Paix. Cela est certes louable et appréciable, cependant on aurait pu faire introduire de manière artistique, d’autres préoccupations de développement, intéressant les populations. Par exemple, profiter pour introduire une séquence sensibilisant les populations contre les méfaits de la drogue, ou introduire une séquence militant pour la vaccination en faveur de la Covid 19, ou introduire une séquence où l’on décide ensemble(divers parents à plaisanterie) de faire un grand champ commun que l’on exploiterait collectivement.
Le cinquième constat que nous avions fait, c’est « la pauvreté » de la quintessence des thématiques culturelles présentées. Il a été ainsi constaté un défaut de recherche culturelle tous azimuts. Les gens se sont contentés de rabibocher voire de rafistoler des thématiques culturelles anciennes, occultant ainsi le fait de faire des recherches certes laborieuses et fastidieuses, mais fécondes.
Le sixième constat que nous avions fait, c’est le besoin d’encadrement des troupes culturelles, pour une bonne maitrise de l’art dramatique d’une manière particulière, mais surtout de l’art tout simplement de façon générale. La culture tout comme la pédagogie est un art. Il faut répéter à l’envie, pour maitriser un apprentissage quelconque. Tant il est vrai qu’Aristote le Philosophe Grec a eu raison de dire : « Les choses qu’il faut apprendre pour les faire, c’est en les faisant que nous les apprenons ».
En clair, il faut que les Directeurs Régionaux de la Culture apprennent à apprendre aux troupes culturelles, afin que celles-ci améliorent leurs prestations culturelles.
ONEP
Source : http://lesahel.org/