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Wanzam : le coiffeur traditionnel qui tient encore le fil de la transmission au Niger

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Wanzam Niger
Dans l’imaginaire collectif nigérien, le wanzam n’est pas un simple coiffeur. C’est un artisan de haut rang, héritier d’un métier ancestral, détenteur d’un savoir minutieux transmis au sein des familles depuis des générations. Dans de nombreuses régions du pays, surtout en milieu rural, il demeure une figure de confiance, à la fois pour l’esthétique, pour certains soins de santé populaires et pour l’accomplissement de rites sociaux majeurs.

Un métier qui se transmet par initiation
Devenir wanzam ne s’improvise pas. L’apprentissage se fait au long cours, auprès d’un maître qui montre, corrige, fait répéter les gestes jusqu’à ce qu’ils deviennent sûrs. Le maniement du rasoir, l’emblème du métier, doit être parfaitement maîtrisé : il sert à raser, inciser légèrement, tailler les cheveux et, parfois, à pratiquer de petits actes curatifs. Ce long compagnonnage permet non seulement d’apprendre les gestes techniques, mais aussi d’intégrer les règles, les interdits, les mots et même l’attitude qui sied à ce métier respecté.

Dans certaines communautés, la fonction reste attachée à une lignée ou à un groupe professionnel bien identifié : on naît dans la maison du wanzam et on y grandit en observant les anciens.

Plus qu’un coiffeur : un auxiliaire de santé populaire
Si, dans les grandes villes, les salons modernes se multiplient, dans les villages et villes du Niger le wanzam reste souvent le premier recours. Il assure la coiffure et le rasage, mais aussi de petits soins traditionnels : pose de ventouses, saignées légères, ouverture d’abcès superficiels. Ces pratiques, issues d’une médecine populaire ancienne, continuent d’être sollicitées parce qu’elles sont accessibles, connues et culturellement acceptées.

Surtout, le wanzam est souvent celui à qui l’on confie la circoncision, acte hautement symbolique dans la société. Réussir cet acte, le faire sans complications, dans le respect des usages, renforce son prestige et sa place au sein de la communauté. C’est l’une des raisons pour lesquelles ce métier n’a pas disparu malgré la médicalisation croissante.

Une adaptation aux exigences d’hygiène
Le contexte actuel impose toutefois des évolutions. Beaucoup de wanzam ont intégré des gestes d’hygiène modernes : nettoyage de la peau avant rasage ; désinfection du rasoir et des instruments, souvent à l’alcool ; application d’alcool ou de produit antiseptique après le rasage pour éviter irritations et infections.

Ces pratiques, introduites au fil du temps, montrent que le métier n’est pas figé. Le wanzam reste gardien de la tradition, mais il sait intégrer ce qui protège la santé de ses clients. Dans certains cas, il oriente même vers le centre de santé lorsque la situation dépasse son domaine.

Un rôle social toujours vivant
Ce qui fait la force du wanzam, c’est qu’il est inséré dans la vie communautaire. Il connaît les familles, intervient lors des préparatifs de fête, prépare les enfants lors des étapes de socialisation, accompagne certains rituels. Il est vu, respecté, parfois consulté. Dans de nombreuses localités, on continue à le payer en nature ou en petite somme, avec reconnaissance.

À l’heure où les modes capillaires urbaines gagnent du terrain, le wanzam demeure le lien visible entre culture, identité et mémoire artisanale. Il rappelle que le soin du corps, au Niger, n’a jamais été seulement esthétique : il a toujours été social, rituel et, dans une certaine mesure, thérapeutique.

Préserver un patrimoine vivant
Documenter ce métier, le valoriser et le transmettre aux jeunes générations est une manière de ne pas laisser disparaître une pièce importante du patrimoine immatériel nigérien. Car le wanzam raconte quelque chose de plus vaste : la capacité des sociétés nigériennes à faire vivre des métiers anciens en les adaptant, sans rompre le fil de la tradition.

Boubacar Guédé (Nigerdiaspora)

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