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Ali Karémi Abaghana, Maire de la Commune rurale de Damagaram Takaya : «Notre problème le plus crucial est celui de l’eau (…) Nous souffrons terriblement du manque d’eau»

Monsieur le Maire, de manière générale les communes du Niger sont confrontées à d’énormes difficultés de mobilisation des ressources fiscales. Est-ce que vos administrés s’acquittent de leurs devoirs civiques ?

Dans ce domaine, je peux dire que nous ne sommes pas loin des autres. Nous vivons les mêmes problèmes. La population a tendance à cultiver l’incivisme fiscal. Les arriérés de taxe municipale ne font que s’accumuler. Je vous donne à titre d’exemple le budget de 2018. Nous y avons voté à peu près 61.500.000 FCFA. Et dans ce montant, nous avons un stock très important d’arriérés étalé sur trois ans, environ 45.000.000 FCFA. Le recouvrement à la date de septembre 2018, était de 14.500.000 FCFA. Vous voyez donc à quel point nous sommes confrontés au même problème que les autres communes. Il ya donc lieu d’en faire un peu plus pour que cet incivisme soit enrayé.

Dans ce cas de figure, quelles sont les actions que la Mairie mène ou envisage de mener pour amener les populations à s’acquitter de leurs devoirs civiques ?

Nous avons constaté que cette année, il ya eu une amélioration par rapport aux années antérieures cela grâce à notre radio communautaire. Cette radio communautaire nous permet de toucher l’ensemble de la commune. Nous sommes écoutés dans un rayon de 70 kilomètres. Nous utilisons cet outil précieux pour sensibiliser la population, et lui faire comprendre ses droits et ses devoirs. S’il est vrai que la population veut que la commune vive, prospère et investisse, il faut nécessairement un sursaut de conscience. C’est ce que nous ne cessons de répéter tous les jours à la population. Et c’est ce qui a fait que nous avions constaté cette année, une nette amélioration dans le recouvrement, puisque nous avons recouvré jusqu’à 23,6% sur les ressources liées aux impôts, aux taxes municipales et aux taxes des marchés. C’est un travail de longue haleine. Nous sommes en démocratie, et les moyens de coercition doivent être bannis. Il faut sensibiliser les gens de manière à leur imposer une discipline qui sera librement consentie. C’est cela qui est plus durable.

Quelles sont les potentialités dont regorge la commune rurale de Damagaram Takaya ?

Pour l’alimentation du budget, nous avons les taxes de voirie, appelées communément taxe municipale ; nous avons les impôts directs et indirects qui sont prélevés dans le cadre des patentes ou des taxes de marché ; nous avons également les subventions de l’Etat à travers l’ANFICT ; et les appuis des partenaires dans le cadre du développement de la commune.

Justement dans le cadre du développement de la commune quelles sont les actions que vous menez au cours de cette mandature ?

Au cours de notre mandat, nous avons pu faire ce que nous pouvons, en tenant compte de ce que nous engrangeons. Je peux vous citer dans le domaine de l’environnement que nous avons eu à récupérer plusieurs hectares de terres. Cela est une grande fierté pour nous parce que nous avons de la terre latéritique qu’il faut viabiliser. Nous avons entrepris la récupération des terres, la protection des aires de pâturage ; nous avons construit des classes. Nous avons acheté un Tracteur pour 10.900.000Fcfa ; nous avons dans le domaine de l’agriculture, axé nos efforts surtout sur l’amélioration des semences. Le temps actuel milite en faveur des changements ; et le changement ne peut s’opérer qu’à travers des semences améliorées, hâtives. Nous avons une banque céréalière construite par un partenaire en collaboration avec la Mairie. Elle permet de résoudre le problème de l’alimentation des animaux. Il ya le siège de la Mairie que nous avions construit grâce à l’apport des partenaires et à la contribution de la commune. Nous avons distribué des chèvres grâce à l’appui des partenaires, et réalisé des microprojets dans le cadre de l’embouche bovine et des AGR.

Monsieur le Maire que prévoit votre Plan de Développement Communal (PDC)?

Notre PDC a été renouvelé en 2015. C’est un programme ambitieux étalé sur cinq ans. Pour toutes nos réalisations, nous nous inspirons du PDC. Il ya plusieurs domaines qui sont concernés comme l’agriculture, l’élevage, la santé, les AGR, la promotion de la femme, la promotion de l’enfant etc. Tout cela est réparti sur cinq années, et il faut évaluer au fur et à mesure de l’exécution.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face dans l’exécution de votre mission ?

La première des difficultés c’est le niveau d’instruction de la population. Très peu de gens ont été à l’école française ou à l’école coranique, et ils perçoivent tous ces changements qui interviennent comme étant une rupture avec le passé. Ceci est difficile pour nous d’autant plus qu’il faut un changement de comportement. C’est ce que nous attendons des populations. Et c’est dans ce sens que nous œuvrons. Mais notre problème le plus crucial et le plus important, est celui de l’eau. Nous souffrons terriblement du manque d’eau. Bien sûr, nous sommes au centre sur le socle, mais au sud et au nord, c’est la zone sédimentaire ; et c’est là qu’il faut aller pour chercher l’eau. A l’heure où je vous parle à Damagaram Takaya, allez-y voir la queue que font les gens au niveau des bornes fontaines. A défaut ils sont obligés d’aller avec leurs charrettes ou leurs véhicules chercher de l’eau à 3 ou 4 kilomètres. C’est le problème le plus criard de Damagaram Takaya. Nous avons connu aussi à Damagaram Takaya, quatre inondations pendant la saison pluvieuse. La dernière inondation, celle de 2010 a mis à terre beaucoup de maisons. Il fallait donc tout reconstruire, et imaginer ce qu’il faut faire pour lutter contre ce phénomène naturel. Nous avions imaginé qu’il fallait faire une digue pour protéger le village. Cela fait aujourd’hui huit ans que cette digue nous protège contre les inondations. Si vous venez ici pendant l’hivernage, vous verrez déferler les eaux de ruissèlement. Et quelque part on doit être interpelé par rapport à l’utilisation de ces eaux là. En grandes quantités, ces eaux vont vers le sud, en menaçant tout sur leur chemin. Alors qu’on pouvait faire des retenues d’eau pour pouvoir permettre à la population de pratiquer des cultures de contre-saison pendant la période sèche.

Propos recueillis par Oumarou Moussa, envoyé spécial(onep)

21 juin 2019
Source : http://www.lesahel.org