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Interview de Mme Amina Moumouni, ministre de l’Energie : « La Centrale électrique de Gorou Banda est d’un apport très appréciable dans la satisfaction de la demande énergétique des régions de Niamey et Tillabéry »

Maintenant, en ce qui concerne les besoins en énergie électrique, les prévisions de la NIGELEC sont de 152 MW de puissance maximale à satisfaire cette année dans la même zone. Cette demande est dans la limite de la capacité actuelle avec l’apport de la Centrale électrique de Gorou Banda, en l’absence d’aléas techniques.

Nous allons donc progressivement enregistrer une plus grande stabilité de la fourniture d’énergie électrique avec la mise en exploitation de la Centrale électrique de Gorou Banda. En outre, cet ouvrage va aussi contribuer significativement à la sécurisation de l’alimentation électrique, en plus de procurer plus d’autonomie dans l’approvisionnement électrique.

Toutefois, il faut dire aussi qu’il reste encore beaucoup d’investissements à réaliser pour minimiser les perturbations dans l’alimentation en énergie électrique qui, faut-il le signaler, peuvent aussi provenir des réseaux de distribution publique, dont le renforcement et la réhabilitation font l’objet de projets qui sont en cours de mise en œuvre.

Pouvez-vous nous préciser, Madame la ministre, les efforts financiers  consentis par l’Etat dans le cadre de la construction de la Centrale électrique de Gorou Banda ?

Dans l’ensemble, la construction de cette première tranche de 80 MW, d’un montant de 75,485 milliards de francs CFA, est financée par la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) et le Fonds de Développement de l’Energie (FDE) de l’UEMOA pour 50 milliards de francs CFA ; la Banque Islamique de Développement à hauteur de 17,31 milliards de francs CFA, et une contribution de l’Etat du Niger de 8,185 milliards de francs CFA.

On a entendu certains commentaires pessimistes sur la rentabilité, voire la viabilité  de la Centrale de Gorou Banda, relativement au coût de fonctionnement des installations jugé très élevé. Quelle assurance pouvez-vous donner aux consommateurs à ce propos ?

Pour rappel, cet investissement répond au souci d’augmenter la capacité et de sécuriser l’approvisionnement après les crises enregistrées dans les années 2010.

La Centrale électrique de Gorou Banda est d’un apport très appréciable dans la satisfaction de la demande énergétique des régions de Niamey et Tillabéry.

Le coût d’exploitation de ce genre d’installation est à la mesure de sa taille et en général, il est assez élevé à cause du combustible utilisé, comparativement par exemple à l’énergie hydroélectrique.  Et c’est pourquoi, la production de l’électricité se fait à partir de plusieurs sources qui sont mises à contribution suivant le coût le plus bas pour obtenir le tarif optimal.

Au Niger, la fourniture de l’énergie électrique se fait sur la base de différentes sources (importation du Nigéria, SONICHAR et centrales thermiques diesel dont celles de Niamey à savoir PC4, MTU, Turbines à Gaz et maintenant Gorou Banda) qui concourent chacune, avec son coût, à la formation du prix de vente national. Vous vous rendez ainsi compte de l’exercice à faire et surtout des efforts énormes consentis par l’Etat pour le maintien du tarif à son niveau actuel, quand on sait que celui en vigueur date de 1994 et est un des plus bas de la sous-région.

En tout état de cause, la Centrale de Gorou Banda fait partie d’un ensemble de sources d’énergie (Salkadamna, Kandadji, Extension SONICHAR, Solaire, Thermique pétrole et gaz dans les régions de Zinder et Diffa, Energie Electronucléaire) qui doivent contribuer toutes au développement d’un mix énergétique qui pourra garantir les meilleures conditions de fourniture d’électricité, y compris le tarif.

On sait, Madame la ministre, que le Programme de Renaissance II du Président de la République accorde une place de choix à la bataille pour l’indépendance énergétique de notre pays. Quelles sont les priorités de la politique énergétique définie par le Gouvernement ?

L’ambition nourrie par le Président de la République et son Gouvernement dirigé par le Premier ministre SEM. Brigi Rafini et la création récente du Ministère dédié à l’énergie en est l’illustration est la mise en valeur de nos ressources nationales afin de contribuer durablement au développement économique et social de notre pays.

C’est pourquoi il importe de réaliser de grands projets structurants tels que la centrale thermique de Salkadamna et la centrale thermique 2 de la SONICHAR, le barrage hydroélectrique de Kandadji.

D’autre part, en fonction de la demande et de la capacité d’absorption de nos réseaux actuels, nous comptons injecter de l’énergie solaire produite par système photovoltaïque pour pallier l’augmentation de la demande dans la région de Niamey aussi bien que dans les chefs-lieux de région. C’est ainsi que la construction de la centrale solaire photovoltaïque de 7 MW de Malbaza va démarrer incessamment.

En même temps, nous envisageons d’introduire le solaire comme source de production pour hybrider certaines centrales hors réseau et poursuivre ainsi l’amélioration de l’accès à l’électricité.

Nous entendons aussi poursuivre et intensifier les efforts dans le domaine des énergies domestiques en vue notamment de faciliter les travaux domestiques aux femmes et développer l’accès aux sources d’énergie moderne de cuisson, afin d’atténuer les effets du changement climatique et mettre fin à la destruction de notre couvert végétal. C’est dans ce sens qu’il sera entrepris, dans le cadre des politiques et programmes définis en la matière, des actions de promotion de l’utilisation du charbon minéral, des foyers améliorés et du gaz domestique, ainsi que l’utilisation des cuiseurs solaires. Il en sera de même pour l’installation  accélérée et l’utilisation des plateformes multifonctionnelles en vue de renforcer l’accès aux services énergétiques modernes.

Actuellement, nous travaillons à nous mettre à jour pour nous doter d’un nouveau Document de Politique de l’Energie, de documents de stratégies nationales dans le cadre de ‘’l’Initiative Mondiale Energie durable pour Tous – SE4ALL-2030’’ et d’accès à l’électricité, de plans d’actions ainsi que d’une note d’orientation pour la mobilisation des financements. Nous disposerons ainsi d’une planification énergétique jusqu’à l’horizon 2035 avec des plans directeurs qui guideront nos actions pour atteindre progressivement les objectifs intermédiaires et finaux.

C’est dire que l’énergie est un secteur en pleine mutation à la mesure de son rôle et des défis que pose la réalité nationale caractérisée par un taux d’accès à l’électricité de 10% (dont moins de 1% en milieu rural). Les réformes déjà entreprises ont permis l’adoption d’un nouveau Code de l’Electricité, la création de l’Autorité de Régulation du Secteur de l’Energie (ARSE) ainsi que l’adoption des décrets associés. D’autres dispositions sont en cours pour disposer d’un cadre de référence permettant le développement du secteur, notamment à travers l’intervention privée dans la production et l’exploitation des réseaux décentralisés.

Par ailleurs, nous appartenons à la CEDEAO qui promeut le marché régional de l’électricité à travers un système d’échanges (WAPP en anglais) au sein duquel nous allons réaliser la dorsale Nord. Dans ce cadre, nous pourrons aussi apporter notre contribution à la mesure de nos énormes potentialités énergétiques.

Il existe un vaste programme d’électrification rurale qui ambitionne de doter nos villages d’équipements électriques. Pouvez-vous nous donner un aperçu des actions menées dans le cadre de ce programme ?

Comme vous le savez, le Programme de la Renaissance 2011/2016 a prévu l’électrification de 500 villages à raison de 100 par année et qui a vu la réalisation, par la NIGELEC, d’environ 300 localités à fin 2016. Le reste est en cours.

La Renaissance 2 prévoit l’électrification de 200 localités par an soit 1000 sur le quinquennat. Ces objectifs, très ambitieux, méritent d’être adressés conséquemment.

Pour rappel, la création, en 2013, de l’Agence Nigérienne de Promotion de l’Electrification en milieu Rural (ANPER), procède de la volonté d’impulser significativement l’accès à l’électricité de nos populations rurales.

Il convient de souligner que nous sommes en train de nous doter de la Stratégie Nationale d’Accès à l’Electricité (SNAE) et de son premier Plan Quinquennal d’Actions, qui interviendront probablement en début du 2ème semestre 2017, ainsi que d’un Plan Directeur d’Electrification Rurale. Toutes choses qui nous ouvriront d’autres opportunités de financement.

D’ores et déjà, nous engageons, avec l’aide de nos partenaires, des actions pour prendre en charge l’accès à l’électricité différencié comme suit : électrification en réseau par raccordement au réseau existant actuel de la NIGELEC; électrification hors réseau par mini-réseaux isolés alimentés par centrales solaires photovoltaïques ou hybrides solaire-diesel ; électrification ‘’individuelle’’ par installation de kits solaires couvrant les besoins de services énergétiques modernes des utilisateurs: ménages, pompage/irrigation, entreprises artisanales et autres ; éclairage Public.

En attendant l’aboutissement des documents de stratégies et autres plans d’actions et schémas directeurs en cours d’élaboration, nous avons engagé des actions qui se traduiront, au cours de cette année 2017, par le financement de projets qui nous permettront le développement de l’accès aux services énergétiques modernes par le développement d’un marché de kits solaires autonomes qui bénéficiera aux populations rurales, incluant le financement associé et les mécanismes sous-jacents ; l’installation de mini-réseaux hybrides solaires par l’ANPER, destinés à permettre l’accès à 13 000 ménages, équipements collectifs et utilisateurs productifs (artisans, agriculteurs, éleveurs, pompage/irrigation), accompagné du dispositif d’exploitation ; l’hybridation solaire de 30 localités dotées de groupes électrogènes diesel exploités par la NIGELEC, avec l’extension de l’accès à 8 000 nouveaux clients.

Le Niger dispose d’un potentiel important exploitable sur le plan des énergies renouvelables, notamment dans les domaines de l’énergie solaire et éolienne. Quelles sont les ambitions du Niger dans ce domaine?

Le développement ci-avant répond en partie à votre question, notamment en matière d’énergie solaire. Pour l’éolien, j’avoue que malgré l’intérêt qu’il suscite, les technologies restent encore méconnues. Le CNES entreprend de réaliser l’atlas de l’éolien et celui de l’énergie solaire, et tout cela sera pris en compte en fonction des opportunités offertes le cas échéant.

Réalisée par Oumarou Moussa

02 avril 2017
Source : http://lesahel.org/