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Interview : Le président de la HALCIA «Pour l’année 2018, nous allons beaucoup plus mener nos actions sur la prévention. Et face à ceux qui continueront à faire la sourde oreille, nous serons implacables», déclare M. Gousmane Abdourahamane

Gousmane Abdourahamane Halcia 01Monsieur le président, un certain nombre de dossiers initiés par la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA), défrayent actuellement la chronique. Il s’agit précisément du dossier sur les reversements de la douane et celui relatif à un marché attribué par la CAIMA. Pouvezvous nous éclairer sur le contenu de ces dossiers ?

Je voudrai de prime à bords saluer votre initiative, que je recommande d’ailleurs à tous les professionnels de medias, de venir vers nous pour s’informer sur nos activités, afin de satisfaire le droit du public à une information de qualité. Par rapport au dossier sur les reversements, il s’agit d’une mission tripartite, composée de la HALCIA, de l’Inspection d’Etat et de l’Inspection des finances. Cette mission a été mise en place sur la demande du Président de la République pour remettre l’Etat dans ses droits spoliés dans les domaines fiscal et douanier. Vous avez des personnes qui exercent des activités soumises au paiement d’impôts et taxes. Ces personnes font des déclarations pour payer moins d’impôts et taxes. Avec des experts des services de la Direction Générale des Impôts (DGI) et de l’administration des douanes, nous menons des investigations et effectuons des redressements fiscaux. Nous avons épinglé plusieurs sociétés qui s’adonnent à cette pratique qui tue l’économie de notre pays. Dans le domaine de la douane, on minore le dé­ douanement des marchandises ou des véhicules. Au lieu par exemple de payer la somme de 3.000.000 F CFA comme frais de douanes, on s’arrange avec la complicité de l’agent des douanes et du transitaire pour payer 800.000 F CFA ou moins. Quand au dossier CAIMA, il est pendant devant le cabinet du juge d’instruction du Pôle économique. La seule précision est qu’il n’y a eu aucune influence de qui que ça soit durant le dé­ roulement de l’enquête. Il s’agit des faits relayés par une presse de la place, et vu leur gravité, la HALCIA s’est autosaisie conformément à la loi n°2016­ 44 du 6 décembre 2016.

Entre autres attributions, la HALCIA a pour mission d’engager une lutte sans merci contre la corruption et les infractions assimilées. Peut­on avoir une idée sur l’ampleur de vos activités et l’approche privilégiée pour mettre l’Etat du Niger dans ses droits ?

La HALCIA a deux missions : la prévention et la répression. Pour la prévention, notre objectif primordial est d’amener nos concitoyens à changer de comportement vis­à­vis de la corruption. En refusant de corrompre pour obtenir un service dû, on combat la corruption et on peut amener l’autre à s’en dé­ partir. En dénonçant des cas de corruption aussi, on combat celle-­ci. Pour la répression, nous disposons d’une cellule d’investigations animée par des OPJ et APJ, qui agissent conformément aux dispositions du code de procédure pénale.

Pour l’année 2018, nous allons beaucoup plus mener nos actions sur la prévention. Et face à ceux qui continueront à faire la sourde oreille, nous serons implacables. Nous avons les moyens sur le plan juridique

La lutte contre la corruption est une œuvre difficile et de longue haleine qui nécessite une volonté politique forte. Sachant que le Chef de l’Etat en a fait son cheval de bataille, peut­on dire que la lutte contre la corruption est en bonne marche au Niger ?
Le Chef de l’Etat a prouvé aux Nigériens et à la communauté internationale qu’il tient à éradiquer le fléau de la corruption dans notre pays. Après avoir créé la HALCIA, il l’a dotée de tous les instruments juridiques qui puissent lui permettre de mener à bien sa mission. Nous avons entre autres la loi N°2016­ 44 du 06 décembre 2016 portant création, missions, attributions, composition, organisation et fonctionnement de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées. L’avènement de cette loi renforce et donne les pouvoirs suivants à la HALCIA : l’auto saisine ; l’accès aux rapports d’inspection ou de contrôle ; les pouvoirs de police judiciaire ; l’identification, la localisation, la mise sous mains de justice des biens provenant de la corruption ; la levée de secret bancaire ; la saisie et mise sous scellés des pièces à conviction ; la transmission directe de rapports au Procureur de la République et l’ouverture d’une information judiciaire ; le fait de requérir l’interdiction de sortie du territoire de tout suspect et le retrait de ses documents de voyage ; l’adoption de la Straté­gie Nationale de Lutte contre la Corruption par le conseil des ministres du 5 janvier 2018. C’est pour vous dire que la lutte contre la corruption est en marche.

Au ­delà de l’aspect répressif, la HALCIA a également comme mission de mener des actions de prévention. Quelles sont les actions de prévention que vous avez menées depuis la création de cette institution ?
Dans le cadre de la prévention, plusieurs actions ont été entreprises concourant à améliorer la connaissance du phénomène de la corruption, à sensibiliser l’opinion publique et les acteurs spécifiques au sein de l’Etat. Ces actions portées par la HALCIA ont trait aux aspects suivants : les enquêtes nationales sur la perception de la corruption ; l’organisation de rencontres sectorielles avec divers acteurs au sein de la communauté nationale ; la conduite de plusieurs études thématiques ; le renforcement des capacités des acteurs, notamment les membres des organes administratifs de lutte contre la corruption, les acteurs judiciaires et les membres des organisations de la société civile , en vue de les amener à mieux prendre en charge le phénomène de la corruption ; l’organisation de caravanes de sensibilisation au niveau de tous les chefs­lieux des régions et de certains chefslieux de département, sous formes de journées d’information et de sensibilisation ; l’animation de conférences à l’endroit des organisations de jeunesse et des organisations des scolaires et étudiants sur des thématiques liées à la lutte contre la corruption, à l’éthique et au civisme ; l’organisation de conférences à l’endroit des populations sur le fondement religieux de la lutte contre la corruption.

Quelles sont vos appréciations sur le résultat des actions engagées au Niger en matière de lutte contre la corruption avec la création de la HALCIA ?
Les résultats sont satisfaisants. La corruption est en régression si on s’en tient à l’indice de perception de la corruption de Transparency International, où notre classement s’est amélioré (de la 137e place qu’on occupait en 2011, le Niger est passé à la 101e place au classement de 2016), et l’espoir d’améliorer davantage ce score est permis. Seulement, comme vous l’avez souligné, la lutte contre la corruption est une œuvre difficile et de longue haleine. Pour gagner ce combat, il faut l’adhésion de tous les citoyens : la société civile, les syndicats, les partis politiques …

Interview réalisée par Oumarou Moussa

 

 

Lesahel.ne

19 janvier 2018
Source : http://lesahel.org/