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Invité Afrique - Brigi Rafini: «Problème civilisationnel, c’est un peu trop fort quand même»


Depuis un an et demi, on parlait d'un « affaiblissement » de Boko Haram. Faut-il parler aujourd’hui d’un retour en force de cette organisation terroriste ?
A mon avis, il s’agit d’actions d’éclat. Avec le dispositif qui est actuellement déployé dans cette zone, il me paraît difficile qu’ils aient encore les capacités qu’ils avaient pendant un certain temps.

Autre menace terroriste, celle venue du nord du Mali. Le 2 Juillet à Bamako les cinq pays formant le G5 Sahel [Mali, Tchad, Niger, Mauritanie et Burkina Faso] ont décidé de créer une force conjointe. Où en est-on aujourd’hui ?
En tout cas c'est en très bonne voie. Je pense que les choses se mettent en place progressivement. Ce n’est pas une question de course ou de vitesse, c’est un dispositif qui va se mettre en place, pour que dans la durée nous puissions avoir des résultats durables.
Sur le plan financier, c’est une force qui va coûter très cher. On parle de 423 millions d’euros...
Oui. Ce n’est pas une tâche facile et vous le savez. Nos États – les cinq États du Sahel – ont besoin de l’aide de la communauté internationale. Et nous sommes en tout cas sûrs que nos amis nous aideront à boucler ce financement.

Et que représentera la contribution du Niger ?
La contribution du Niger, comme celle des autres États du G5, a été ajoutée et chacun des Etats est en train de s’employer à mettre en place cette contribution sans aucun atermoiement.

On parle de 10 millions d’euros par pays sahélien. C’est cela ? Vous confirmez ?
Oui, c’est un minimum, parce que, par exemple, au Niger, nous sommes déjà engagés au Mali.


{xtypo_quote}[Sur les hotspots], nous sommes informés, mais nous n’avons pas encore approché la question de manière appropriée et conséquente.{/xtypo_quote}


Monsieur le Premier ministre, face au problème des migrants, le président français Emmanuel Macron veut installer des centres d’examen avancés - ce que l’on appelle des « hot-spots » - dans trois pays sahéliens, dont le vôtre. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Nous avons entendu l’annonce. Les modalités sont certainement actuellement à l’étude. Nous allons aviser, le moment venu.

Mais a priori, êtes vous pour ou contre ?
Avant d’avoir abordé la question dans sa profondeur je ne saurais me prononcer.

Avez-vous été surpris par cette déclaration du président français ?
Pour nous, ce n’est pas une surprise parce que, sur la question migratoire, nous comprenons bien que la France cherche des solutions à travers des mécanismes à mettre en place dans les pays de transit. Mais il faut que les modalités soient soigneusement étudiées par les parties prenantes.

Et pour l’instant, ce n’est pas le cas ? Vous n’avez pas été consulté ?
Nous sommes informés, mais nous n’avons pas encore approché la question de manière appropriée et conséquente.

Mais très concrètement, Brigi Rafini, peut-on imaginer que l’OFRA (Office français de protection des réfugiés et des apatrides), s’installe sur le territoire du Niger ?
N’allons pas trop vite en besogne. Je crois que tout doit être étudié, examiné à la loupe. On n’a pas à se précipiter.
Il y a un mois, le président français Emmanuel Macron a fait sensation quand il a déclaré : « Quand des pays ont encore sept à huit enfants par femme, vous pouvez décider d'y dépenser

des milliards d'euros, vous ne stabiliserez rien ». Visiblement, il pensait très fort à votre pays, le Niger. Qu’en pensez-vous ?
La démographie au Niger constitue une vraie préoccupation, et j’ai trouvé des éléments justifiés dans ce qu’il a dénoncé. Mais nous sommes là dans un domaine où l'on peut faire des annonces qui peuvent… Disons que c’est un domaine assez particulier pour nous. Nous préférons l’aborder dans le contexte qui est le nôtre. Parce que je pense qu’il est difficile que, de loin, on puisse savoir exactement comment les choses vont évoluer. Nous avons, ici, nous-mêmes pris conscience de cette préoccupation et nous sommes en train de lui chercher des solutions localement.


{xtypo_quote}Nous avons un travail important d’information et de sensibilisation - que nous sommes en train de mener -, mais de là à le qualifier de «—problème civilisationnel—», je pense que c’est un peu trop fort quand même.{/xtypo_quote}

Et quand il a ajouté que cette question était un problème « civilisationnel », qu’en avez-vous pensé ?
Je pense que nous avons une perception différente, peut-être, de ce point de vue. C’est vrai que nous avons un travail important d’information et de sensibilisation - que nous sommes en train de mener -, mais de là à le qualifier de « problème civilisationnel », je pense que c’est un peu trop fort quand même.

 10 août 2017
Source : http://www.rfi.fr/emission/