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Interview de M. Mahamadou Yahaya, Directeur Général de la Caisse Autonome des Retraites (CARENI)

Monsieur le Directeur, quelles sont les missions assignées à votre institution ?

Merci bien de l’opportunité que vous nous donnez et qu’on saisit avec beaucoup de plaisir pour présenter la structure que nous avons en charge de gérer, la Caisse Autonome de Retraite du Niger (CARENI).

En réponse à votre question, il faut retenir qu’au terme de ses statuts, la Caisse Autonome de Retraites du Niger (CARENI) a comme missions principales de liquider, concéder et payer les pensions attribuées en application aux dispositions législatives et règlementaires relatives au Régime Général de Retraites des fonctionnaires de l’Etat de la République du Niger. Ce tel que défini par la loi 2007-26 de 23 Juillet 2007 portant statut Général de la Fonction Publique de l’Etat ; le Décret 2008-244 du 31 Juillet 2008 portant modalité de son application ; le Décret 61-050 de 25 mars 1961 portant organisation du régime des statuts des retraites et les statuts autonomes, ainsi qu’aux fonctionnaires des administrations publiques de l’Etat, à l’exception du personnel non détaché des établissements publics  à caractère industriel ou commercial, des Offices, des Sociétés d’Etat ou d’Economie Mixte. Voilà en résumé ce qui est la mission de la CARENI.

Quand vous faites le parallèle, vous allez voir que la CARENI prend quelque part des attributions qui, jadis, étaient celles du ministère de la fonction publique en matière de la gestion des retraites et aussi celles du ministère des finances. Donc, voilà un peu comment la CARENI se trouve en lien avec sa situation.

 {xtypo_quote} « Du point de vue dynamique institutionnelle, nous sommes sur la bonne voie pour nous permettre une prise en charge effective des questions de la mensualisation des pensions si une fois elle est actée au niveau des ressources »{/xtypo_quote}

Monsieur le Directeur Général, le gouvernement vient d’apporter une nouvelle touche au mode de paiement des pensions pour les retraités. Quelles en sont les motivations et les avantages selon vous ?

C’est une bonne décision politique. C’est une très bonne décision du point de vue stratégique dans la gestion des questions des pensions et des retraites et dans l’accompagnement des retraités. Qu’est-ce qui a motivé cette décision ? Je pense qu’il faut mettre cela à l’actif de la volonté du gouvernement à améliorer les conditions de vie et d’existence des agents admis à faire valoir leur droit à la retraite et de leur ayant cause. Cette motivation fait suite, il faut le reconnaitre, à la demande aussi des centrales syndicales et les associations de retraités, certains en tout cas, pour que la pension soit mensualisée comme dans certains pays de la sous-région. Cela a besoin de beaucoup de décisions institutionnelles. L’engagement du Gouvernement à créer même la CARENI est dans la droite ligne de la recherche d’amélioration de conditions de prise en charge des questions de retraites au Niger. Mensualiser, c’est une seconde étape qui vient confirmer cet engagement. Il ne faut pas oublier que les retraités ce sont des personnes qui ont donné tout pour la République. Donc à partir de ce moment, vouloir mensualiser leur pension est un engagement important.

Les avantages sont de plusieurs ordres. Vous avez d’abord un avantage social qui repositionne l’agent qui a fait valoir droit à ces retraites, sa valeur de quelqu’un qui a donné à l’Etat ce qu’il pouvait. Donc, il n’y aura pas de rupture dans le paiement de ces retraites, étant entendu que c’est exonérer des taxes. Jadis, quand on dit que la pension est trimestrielle, l’agent perd en crédibilité vis-à-vis de ces créanciers. Automatiquement, on dit qu’il ne peut payer que dans les trois mois, il ne peut qu’honorer ses engagements que dans les trois mois. Ce qui fait qu’il perd en crédibilité communautairement parlant, il perd en statut social, parce qu’on pense qu’il est vulnérable. Et même dans les systèmes bancaires, c’est comme si c’est une faveur qu’on lui fait si on l’accepte à être client qui doit transférer sa pension au niveau des systèmes bancaires. Donc du point de vue de statut social, on perd beaucoup.

Alors en mensualisant, on crée les conditions de manque de rupture. Cela veut dire que, en mensualisant, progressivement, on sera dans un système de solde. Parce que si c’est la CARENI qui doit payer la pension, cela va être comme un système de solde, parce que cela va être véritablement informatisé pour prendre cela en charge en collaboration avec les banques.  Donc, l’agent qui est parti à la retraite ne sentira pas la rupture et ne perd pas en crédibilité dans sa communauté, il garde sa personnalité, c’est-à-dire, cela crée les liens de confiance entre les institutions bancaires et les agents ayant fait valoir leur droit à la retraite. Donc vraiment, du point de vue social, du point de vue communautaire et du point de vue technique, cela a des avantages qui permettent à la personne de se sentir toujours en crédibilité. Surtout qu’au fond, un fonctionnaire ne perd qu’en moyenne 15 à 20% de son salaire initial. Donc, il n’est pas aussi vulnérable que cela parce qu’il est habitué à vivre avec son salaire à lui. Parce qu’il l’a de façon régulière et mensuel. Il ne sent pas la rupture parce qu’il a déjà modelé sa vie en fonction de son revenu. Et s’il ne perd que 20% du même revenu, je pense qu’il ne sentira pas qu’il a perdu les 20%, parce qu’il va continuer à percevoir sa pension chaque mois. La preuve quand quelqu’un prend un crédit bancaire, il paie des traites qui sont des diminutions dans son salaire, mais il ne le sent pas parce qu’il a modelé sa vie en fonction de ce qu’il a comme revenu. Donc, je trouve ça une bonne chose pour les retraités.

Quand est-ce que ce mode de paiement sera opérationnalisé au niveau de la CARENI surtout sur  l’ensemble du pays ?

Le plus difficile, c’est de prendre la décision politique. Maintenant, on a cet acquis, on a cet engagement politique de vouloir mensualiser les pensions. Comme vous, nous avons deux systèmes de gestion des retraites au Niger, la CARENI qui a charge de tout ce qui est public et la CNSS qui gère les questions privées, liées à la convention collective interprofessionnelle. La CNSS est une structure autonome et anciennement autonome dans la gestion des ressources des cotisations des agents du secteur dont elle a la charge. La CARENI est une émanation des services de pensions de l’Etat, qui a la responsabilité, à laquelle il faut transférer le Fonds National des Retraites. Ce transfert n’est pas encore effectif du ministère des finances vers la CARENI. Du point de vue des textes, il reste une étape, c’est celle de prendre le décret portant régime des retraites au Niger, qui est normalement dans les circuits du gouvernement. Une fois que ce décret est pris, les étapes vont être très simplifiées, parce que c’est ce décret qui consacre le prélèvement physique et le transfert physique des ressources du ministère des finances à la CARENI. Du point de vue de la mensualisation, l’étape suivante après les textes, c’est la décision budgétaire. Parce que le Fonds National des Retraites étant logé en tant que ressource au niveau du ministère des finances, il faut quelque part une modification de la loi des finances pour prendre en charge l’allocation conséquente permettant au ministère des finances la libération mensuelle des ressources qui seront allouées à la prise en charge des pensions et pour qu’elles soient mensuelles. Je pense personnellement que c’est des étapes qui vont être bouclées d’ici la fin de l’année 2021.

Cette opération nécessite des ressources et moyens conséquents ; Monsieur le Directeur, avez-vous ceux dont vous avez besoin pour l’opérationnalisation de cet engagement du Gouvernement ?

Vous savez, en matière de pilotage de ces genres d’organisations, le plus important, c’est la décision institutionnelle. Il faut qu’il y’ait des décisions institutionnelles ! Une fois que ces décisions sont actées, les ressources viennent automatiquement. Actuellement, les pensions sont payées sur l’ensemble du territoire comme d’habitude. Elles sont payées au niveau des trésoreries régionales, des trésoreries des départements et des services des pensions au niveau de Niamey. Donc, du point de vue du paiement, le mécanisme existe. Maintenant, dans la problématique de transition pour la mensualisation, les textes de loi qui créent la CARENI disent qu’il y’a la possibilité de la mise à disposition du même personnel à la CARENI jusqu’à ce que l’institution puisse disposer des compétences propres et/ou que les mêmes compétences puissent se déclarer en besoin de détachement et mises à la disposition de la CARENI. Donc, du point de vue du mécanisme et des ressources, au fond, tout y est. Maintenant, le transfert est une question d’organisation, parce que si les questions législatives et réglementaires sont réglées, la problématique des ressources est une question mineure par rapport à la mise en œuvre. C’est dans le même processus que nous sommes dans la problématique de la création des directions régionales au niveau de l’ensemble des régions du Niger et progressivement des directions au niveau des départements. Donc, du point de vue dynamique institutionnelle, nous sommes sur la bonne voie pour nous permettre une prise en charge effective des questions de la mensualisation des pensions  si une fois elle est actée au niveau des ressources.

Monsieur le Directeur, avez-vous d’autres aspects à  évoquer  relativement à la gestion des dossiers des retraités par la CARENI ?

Ce que je souhaiterais dire autour de ces questions concerne la problématique de l’informatisation que nous avons engagée au niveau de la CARENI. Il faut reconnaitre que les reformes sont  nombreuses et du point du vue de la documentation et du point de vue des mécanismes de prise en charge aujourd’hui des questions des pensions. Nous sommes partis de trois mois pour gérer un dossier de pension à aujourd’hui au maximum une semaine ou dix jours. C’est pour que  véritablement, si un dossier de pension est réellement dans les normes, nous est transmis au complet, le traitement de ce dossier, c’est trois jours. Donc, c’est dire quand même que des avancées sont faites à ce niveau-là mais qu’on ne sent pas. Je fais un appel pour que les responsable des ressources humaines des institutions affiliées, notamment les ministères, prennent les dispositions pour que les dossiers particulièrement les questions administratives soient mieux gérées. Parce que ce qui fatigue les retraités, ce n’est pas la CARENI c’est souvent le manque des pièces  notamment les avancements des agents. Ces documents d’avancements très souvent fatiguent les retraités, ce n’est pas la CARENI. Ces dossiers, ces papiers fatiguent les retraités et ils font six mois, huit mois sans les avoir et ils disent qu’ils sont venus à la CARERNI et on n’a pas pris le dossier. Alors qu’on ne peut pas le liquider si ces pièces manquent. Jadis, la transmission est faite officiellement par les ministères, aujourd’hui les personnes concernées s’impliquent elles-mêmes leurs dossiers. Mais, ils ont du mal à trouver ces papiers d’avancements, donc ce n’est pas la faute de la CARENI, c’est la faute à ces ministères en charge de ces agents qui n’archivent pas correctement, ce n’est pas une accusation, juste qu’il ne leur facilite pas la tâche pour avoir ces données. Donc j’en appelle à la responsabilité des responsables des ressources humaines au niveau des ministères pour que ces documents, si nécessaire qu’ils rendent ampliataire la CARENI des documents ; cela permettra d’anticiper et de nous permettre de constituer une base de données nous permettant véritablement d’aider au mieux les retraités à faire face à ces questions. La seconde complication que nous avons, c’est la gestion des détachés. Vous avez des personnalités qui sont en détachement et ne sont pas informées sur véritablement le mécanisme de la gestion de leur carrière et du coup c’est quand ils vont à la retraite, qu’ils se rendent compte des problèmes administratifs dans la gestion de leur dossier. Et tous cela, on l’impute à la CARENI, alors qu’elle n’a rien à voir avec ça. Nous sommes en train de prendre des dispositions pour écrire à ces institutions afin qu’elles puissent garantir ce suivi.  Sinon, à la CARENI, le traitement d’un dossier complet c’est trois jours. Aujourd’hui, nous signons en premier et en dernier ressort les livrets. Nous avons des livrets à l’effigie de la CARENI, nous les autorisons, nous les signons, ce n’est plus le long processus habituel. Quand les livrets quittent la CARENI, ils seront utilisables déjà. A partir du mois prochain, nous amortissons la véritable informatisation de traitement des dossiers, c’est-à-dire que ,si la CARENI a le dossier dans les normes et à temps jusqu’au paiement, ça ne doit pas excéder 5 jours. Voilà, là où nous en sommes et j’aimerai vraiment attirer l’attention de nos concitoyens par rapport au suivi de leur carrière. Si  on ne suit pas sa carrière, on se vulnérabilise soit même et on expose ses ayant droit, voilà pourquoi j’attire l’attention des agents et des DRH pour un bon suivi de ces questions.

Réalisée par Alil Maman(onep)

25 juin 2021
Source : http://www.lesahel.org/