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Gouvernance française : Comment sortir des révoltes africaines ?

L’avenir de la France en Afrique s’assombrit de jour en jour. Depuis quelques temps, par les peuples désormais debout pour s’assumer face à l’Histoire et souvent des dirigeants qui peuvent aussi enfin lever la tête devant elle, du moins ses autorités. Alors que les mentalités sur le continent mutaient, en France, les dirigeants ne purent suivre les évolutions sur le continent, continuant à regarder l’Afrique avec les mêmes yeux complexés et déformants des années 1930. Peut-être comptait-elle sur un système éducatif qu’elle laissait en héritage, plus conçu pour dominer les coeurs, renforcer les complexes que pour libérer les esprits des chaînes qu’elle leur mettait. Les relations entre l’Afrique et la France n’ont jamais connu de telles tensions qui mobilisent les peuples, poussés à la révolte, excédés par le comportement qu’elle a sur le continent, ne pouvant jamais comprendre le processus de maturation des consciences africaines.

Comportements et discours infantilisants à l’égard des peuples…
L’Afrique, on le sait, par la colonisation et l’esclavage, fondés tous deux par son racisme, n’a jamais eu d’attitude humaine vis-à-vis de cette Afrique que le mépris, la regardant, dédaigneuse, du haut de ses complexes et de ses préjugés congénitalement incarnés. Si, depuis des siècles, avant la mondialisation, et notamment celle des civilisations, cette France moqueuse pouvait, usant de son avance technique qui lui donnait des armes plus puissantes, se permettre de violenter pour rabaisser ces peuples qu’elle rencontrait pour les esclavagiser et les coloniser afin de mieux assurer sa puissance et s’en servir à construire son économie, aujourd’hui, par le contexte nouveau, cette France ne peut s’autoriser la même attitude vis-à-vis des africains, car rien, par le Droit international, ne peut lui permettre d’avoir ce regard humiliant par lequel, elle semble se donner ce droit indéfini du paternalisme et de la condescendance incommode pour l’époque. Cette France qui ne nous connait même plus bien malgré le long compagnonnage douloureux pour savoir ce que nous voulons, ne peut donc pas vouloir continuer à tout décider pour nous comme si nous serions un peuple-enfant et ne peut, non plus, à la place des peuples, choisir pour diriger à distance des Etats indépendants officiellement, et donc choisir les hommes de sa préférence, en violant la souveraineté des peuples à décider pour eux-mêmes et à choisir pour eux-mêmes. La France ne peut donc pas continuer à croire qu’elle peut toujours avoir cette place de choix dans nos souverainetés violées et nos indépendances ridiculisées.

Pour ne prendre qu’un exemple pratique car plus proches historiquement, et parce que nous concernant, comment peut-on comprendre, lorsque la France envoie des ambassadeurs dans nos pays pour diffuser ses valeurs et promouvoir sa puissance gardienne d’un certain ordre mondial, peut-elle, par les plaintes d’un dirigeant africain peu en phase avec son peuple qui viole des principes et se met en travers de ces valeurs qu’elle porte si fièrement, obtempérer à ses injonctions pour rappeler son ambassadeur et lui nommer un autre, capable de faire plaisir à celui-là qui tord le cou à la démocratie et aux libertés, fermant les yeux sur les graves atteintes qu’il peut porter contre les principes et les libertés pour se maintenir au pouvoir ? Les Nigériens ont en souvenance, notamment de ce premier ambassadeur français au Niger intrépides du premier mandat d’Issoufou, attaché à certaines valeurs et qui, pour aider le pays et sa démocratie à se consolider, avait imposé que les conditions d’une transparence soient créées afin que les élections en vue en 2016 ne soient pas contestées pour conduire le pays à des situations dommageables dont on aurait pu faire l’économie. Mais Issoufou Mahamadou qui se savait impopulaire dans le pays par le mal qu’il a fait, usant de ses proximités et de ses amitiés tissées à l’International Socialiste avec François Hollande, s’en est plaint à l’Elysée pour demander rien que le départ de l’« ambassadeur normal ». C’est ainsi, peut-être instruit dans ce sens, que le nouvel ambassadeur envoyé dans le pays, fit exactement comme le voulait « l’ami nigérien », le laissant tout brutaliser, piétinant la dignité des hommes et les valeurs sociétales pour s’ouvrir le boulevard qui le conduisit à rempiler par des élections inédites en démocratie, avec un adversaires « ligoté » qui ne peut plus se battre à armes égales ainsi que le veut la démocratie, et l’arbitre qu’est la France, à l’issue de telles élections bancales, pouvait crier à la victoire du candidat solidaire qui peut même, le ridicule ne tuant plus, donner quelque voix à un adversaire qui boycottait le scrutin, toute chose que la journée du 20 mars 2016 – mauvais signe pour la Francophonie dont c’était la journée de célébration – donnait à voir avec des bureaux de vote désertés à travers tout le pays, tristement vides toute la journée. En 2021, la solution, pour s’imposer et imposer son candidat, a été, carrément, d’empêcher de se présenter à l’élection un autre Nigérien face auquel – personne de ceux qui pouvaient aller dans l’élections – ne peut mieux se prévaloir d’intégrité et de compétence, pour se présenter à une élection qu’on lui refusait par des manigances outrageantes ? Les douleurs de telles injustices sont enfouies dans le corps social, et quand on sait la respiration haletante d’un peuple blessé dans sa sociologie, il va sans dire qu’un tel acte, finira par avoir dans le pays des retentissements, demain ou un autre jour, dans le pays, sans avoir hélas les moyens de les conjurer. Et comment, en plus, comprendre qu’au même moment, quand le régime en place au Niger, interdisait systématiquement toute manifestation, la France continue quand même de louer cette démocratie amputée des libertés qui la sous-tendent ?

En cautionnant de tels actes dans une démocratie, la France ne défend plus son image dans ces pays, porteuses des « Droits de l’Homme ». Le sentiment anti-français qu’elle ne peut toujours pas comprendre lorsque, bornée, elle continue à croire que cela n’est que le fait de manipulations de nouveaux « concurrents » qui sont venus lui disputer son espace sur le continent. Il n’en est rien. Sans aller à ses jeux troubles dans le terrorisme au Sahel que beaucoup de peuples lui reprochent aujourd’hui, ce sont ces attitudes, ses interférences partisanes dans les jeux électoraux qui lui valent tant de désamour sur le continent ? Le même sentiment se vit par exemple en Côte d’Ivoire, et dans d’autres démocraties de la sous-région.

Lorsque par son alliance militaire vantée par des dirigeants incapables ne portent pas de résultats et face à tant de responsables africains impotents qui ne peuvent honorer leurs devoirs constitutionnels de protéger les peuples et de garantir l’intégrité du territoire, qu’a-t-on à faire que de se moquer de l’expertise militaire de la France, non pas parce qu’elle pourrait manquer les moyens, mais parce que, venant chez nous, elle n’en a jamais eu la volonté mais voulait simplement, profitant d’une telle occasion, pour s’y déployer au Sahel pour d’autres intérêts, les mêmes pour lesquels, elle en veut à la Russie et perd sa sérénité. Et les peuples comprennent bien cette jalousie mise sur le dos d’un mercenariat dont elle se sert pour construire son discours à détruire l’image de la Russie et cacher les douleurs qu’elle endure de voir un autre venir se faire de la place au milieux des potentialités sahéliennes enviées et réussir ainsi à emballer le monde avec elle.

Face à une génération décomplexée…
La France n’a jamais imaginé qu’une génération d’Africains pouvait avoir l’audace de la regarder dans les yeux, de la défier, ne pouvant plus se complexer face à la blancheur accidentelle de ses enfants jamais choisie, ni même inventée dans ses laboratoires, pour comprendre qu’elle n’a en face d’elle qu’un être humain qu’une couleur ne saurait élever au-dessus d’elle, au rang d’anges, tous palpitant de coeurs et d’émotions. Les nouvelles générations n’ont connu ni l’esclavage ni la colonisation et ne peuvent porter les complexes par lesquels les aînés s’agenouillaient face sa toute-puissance blanche. Cette génération ne peut ni comprendre à fortiori accepter que ce qui appartient à l’Afrique servent plus à un autre qu’à elle-même. Et la France n’a plus de chance quand désormais dans l’ordre mondial, aujourd’hui, un Etat tiers peut se plaindre, si ce n’est devant une juridiction internationale, devant des instances internationales comme l’ONU. Le Mali venait de montrer la voie, portant plainte devant l’organisation onusienne contre la France qu’il accable de fournir des armes et des renseignements aux terroristes, avec des preuves qu’il peut brandir pour justifier le bien fondé de ses allégations qui ont douché la France, depuis quelques temps, silencieuse sur le cas du Mali. On aura compris que le dossier embarrasse, comme celui des 46 soldats « ivoiriens » pour la CEDEAO, les Nations-Unies qui, face à l’insistance des autorités maliennes qui peuvent, à l’Assemblée Génération tenues le mois dernier à New York, réitérer leurs accusations qui agacent Paris et certains de ses partenaires.

La France doit donc comprendre qu’elle n’a plus les mêmes peuples et doit savoir mieux gérer ses relations avec le continent en se rapprochant plus des peuples, sinon des aspirations des peuples que des désidératas de dirigeants malaimés dans leurs pays pour ne pas subir à la place de ceux-là, les colères trop profondes d’Africains qui aspirent aujourd’hui à plus de dignité et de respect. Il est dommage que ce Président – Emmanuel Macron – qui en arrivant au pouvoir il y a quelque cinq ans, dans les fougues de sa jeunesse, promettait à la Jeunesse africaine avec laquelle il pouvait même avoir le courage d’un dialogue direct lorsqu’il la rencontrait à Ouagadougou, dévia vite de cette trajectoire annoncée pour s’embourber dans des relations incestueuses décriées naguère. Depuis personne ne peut croire qu’il puisse être l’homme du changement pour refonder la relation françafrique.

Complications…
La situation pour la France se complique sur le continent. Tout est en train de se gâter comme dirait l’autre. C’est pendant que la France et sa CEDEAO soumise s’acharnaient contre le Mali pour des motifs fallacieux qui ne sauraient distinguer son cas d’autres dans le même espace, que d’autres événements surviennent, déroutant la France dans ses choix pour sortir du pétrin africain. Cajolant le fils de Deby, indulgent à l’endroit de Damiba renversé il y a un peu plus d’une semaine, et caressant Niamey, Abidjan et Dakar, alors que partout dans ces Etats, il y a à redire, la France a réussi à se discréditer davantage auprès des peuples, notamment quand elle ne peut plus dire la vérité que tout le monde sait, notamment par rapport à la qualité de la gestion des Etats et de la conduite des élections pour s’en faire le complice le plus détesté. Alors que la France et la CEDEAO s’acharnaient contre le Mali, Goïta et son équipe, surviennent deux événements majeurs pleins d’enseignements pour elles : le rallongement de la transition tchadienne de deux années supplémentaires et – cerise sur le gâteau – la possibilité qui lui est désormais donnée de se présenter, s’il le veut, à la future présidentielle gagnée de fait, faisant ainsi du pouvoir au Tchad une histoire de famille, ce qui, il va sans dire, ne manquera pas de porter un grave coup à la quiétude déjà précaire d’un pays trop habitué à la guerre. Puis, au Burkina, un deuxième coup d’Etat, dans la même période vient rectifier le premier qui semblait être récupéré par la France ainsi qu’en ont le sentiment de nombreux Burkinabés. Les derniers événements dans le pays des hommes intègres doivent servir de leçon. L’Afrique est en train de bouger et c’est irréversible. Ce discours qu’on entend depuis quelques temps ne peut que se perpétuer, et se propager à travers les générations.
A force de se fixer sur un cas – le Mali – la France qui a manqué de vision, risque de tout perdre sur le continent. Que peut-elle dire aujourd’hui au Fils de Déby que l’on sait tout aussi, révolté depuis qu’il restait silencieux par rapport à l’assassinat de son père pour lequel, il se peut qu’il garde bien de secrets gênants ? Que peut-elle dire au Capitaine Ibrahim Traoré quand dans son pays, malgré l’engagement militaire de la France au Sahel, la situation sécuritaire ne fait que se dégrader ? Que peut-elle lui dire, quand, face à d’autres qui ont forcé les élections chez eux, ou trituré des constitutions pour se maintenir au pouvoir, elle ne peut rien dire ? La France ne doit pas s’étonner de voir les populations excédées de sa présence, germe de troubles et de d’instabilité.

Comment en sortir ?
Tant que la France n’aura pas vis-à-vis des dirigeants africains qui volent les peuples un langage de fermeté, ses jours sont comptés en Afrique quand, à la faveur de la mondialisation, et les espaces autant que les marchés qui s’ouvrent, l’Afrique a la chance de rencontrer de nouveaux partenaires qui nouent des relations plus positives, faites de respect mutuel. La France n’a d’autres choix car elle ne pourra plus rien faire par le forcing. Pour revenir sur le continent, si ce n’est pas déjà trop tard pour certains cas, elle doit changer de discours, convaincre par les actes, et regarder plus ces peuples qui souffrent, ces peuples qui n’ont plus d’agriculture, qui n’ont plus d’école, qui n’ont plus de systèmes de santé, qui n’ont plus de routes. Qui n’ont plus d’avenir…
Par Waz-Za