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Notre modeste réflexion et contribution au débat que suscite l'ordonnance N°2024-05 du 23 février 2024

Issoufou Boubacar Kado Magagi 01L' Ordonnance n°2024-05 du 23 février 2024 portant dérogation à la législation relative aux marchés publics, aux impôts, taxes , redevances et à la comptabilité publique pose la problématique du respect de la règle de la comptabilité en régime d'exception.

La dissolution de la constitution ne peut donner lieu au non respect des règles universellement admises en matière de la gestion des finances publiques.

Un régime d'exception ne peut s'en passer des règles d'exécution des finances publiques dans sa mission d'assainissement des finances publiques et de la refondation de la république.

En effet, la dérogation portant sur des dépenses ayant pour objet l'acquisition d'équipements ou matériels militaires ou toute autre fourniture, la réalisation des travaux ou services destinés aux forces de défense et sécurité, des citoyens victimes de déplacements forcés liés à l'insécurité, exclusion du champ d'application de la comptabilité publique toutes les dépenses publiques en lien avec l'insécurité au Niger pose problème .
Les dispositions de cette ordonnance nuisent à la crédibilité des organes de la transition en matière de la gestion des biens publics.
Un décret d'application de cette ordonnance qui est sur toute les lèvres serait en cours.

À notre humble avis l'application de cette ordonnance sera très difficile par les services compétents.
En effet, le fait de soustraire les dépenses relatives aux forces de défense et de sécurité des règles de la comptabilité publique rend l'application de la dite ordonnance difficile, la procédure normale d'exécution des dépenses publiques obéi à quatre phases, l'engagement, la liquidation, l'ordonnance et le paiement .
Une exception est autorisée en cas d'urgence, c'est le paiement avant ordonnancement, toute fois une régularisation des dites dépenses est obligatoire.
Le principe des séparation de pouvoirs entre les ordonnateurs et les comptables publics est un principe très important et cher en matière des finances publiques.
La loi a prévu quelques dérogations au principe , les comptes spéciaux du trésor et la gestion de certaines regies d'avances .

En matière du recouvrement des recettes fiscales et douanières, le principe de séparation de pouvoirs entre ordonateurs et comptables s'applique aussi à toute catégorie des recettes publiques.

Le principe de séparation de pouvoirs entre ordonateurs et comptables permet un contrôle mutuel entre ordonateurs et comptables dans l'observation des règles de la comptabilité publique.

L' ordonateur et le comptable, chacun en ce qui le concerne est tenu de produire un compte de gestion qui sera soumis à la cour des comptes ou à la chambre administrative de la cour d'Etat.

La loi a prévu des dérogations , c'est ainsi que certains marchés publics sont exonérés des taxes, de droits des douanes par le ministre en charge des finances à la demande des parties concernées à l'appui d'une convention entre Etat ou bailleurs des fonds , des directions chargées d'exonération des impôts et taxes existent à cet effet, au sein des directions générales des impôts et des douanes .

La prise d'une ordonnance ne serait pas pas nécessaire.

En ce qui concerne l'exigence de la confidentialité de certaines informations requises ou la protection des intérêts supérieurs de l' Etat, le décret N° 20-22-743 PRN/PM portant code des marchés publics a pris en compte ces préoccupations .

Le chapitre V du décret traite des dispositions particulières aux marchés de défense et de sécurité.
En effet, l'article 54 dispose : "Par dérogation , les marchés ci-après, sont passés selon les dispositions de l'article 62 du présent code en raison d'exigences de confidentialité qui y sont requises ou pour la protection des intérêts essentiels de l'état qui est incompatible aux mesures de publicité " .
Que dit l'article 62 : " l'autorité contractante précise dans le document du marché, les mesures afin d'assurer des informations classées sensibles.
A cet effet, l'offre doit comporter l'engagement du soumissionnaire et des sous-traitants à préserver de manière idoine la confidentialité de toutes les informations sensibles en leur possession ou dont ils viendraient à prendre connaissance avant, pendant et après l'exécution du marché "

Au Mali voisin , c'est le décret N°0275/PT-RM du 3 mai 2023 qui fixe le régime des marchés de travaux ,de fournitures et des services exclus du champ d'application du code des marchés publics et des délégations des services publics.
Le contrat passé sous le seau de secrets en matière de la défense ou sous le seau des intérêts de l'Etat ne sont pas soumis aux méthodes de sélection et aux contrôles des organes prévus par le code des marchés publics.

À notre humble avis, l' ordonnance 2024-05 du 23 février 2024 pourrait faire l'objet d'une révision et correction qui permettra son exécution dans les meilleurs conditions nécessaires à l'exécution des finances publiques.

C'est le Niger qui gagne !

Issoufou BOUBACAR KADO MAGAGI.