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Lettre ouverte relative aux évènements du 26 Juillet 2023  : Par Ada Bouréima

Ne soyez point étonnés lorsque, pendant la saison des pluies, vous apercevez un père de famille sur le toit de sa maison. Sûrement que celle-ci coule et il est le seul à savoir avec exactitude par où passent les gouttes qui le trouvent sur son lit pour l’empêcher de dormir. Donc le 26 Juillet 2023, notre pays le Niger connaissait son sixième coup de force, coup d’Etat si vous préférez et si l’on considère que même la Conférence Nationale Souveraine, était aussi un coup d’Etat perpétré par le peuple contre un régime d’exception, mettant face à face, la force du verbe contre celle du fusil. Et, le verbe l’emporta.

A cette date mémorable, l’armée prenait le pouvoir et mettait fin à la septième république et à toutes ses institutions. Les partis politiques étaient suspendus, l’Assemblée Nationale dissoute, les frontières aériennes et terrestres fermées, un couvre-feu instauré. Comme le Conseil Militaire Suprême en 1974, le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, formé par un groupe de jeunes officiers dirigés par le Général de brigade Tiani Abdourahamane, allait pour une durée encore non déterminée exercer le pouvoir pris au PNDS (Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme) au nom duquel régnait le président Mohamed Bazoum, un professeur de philosophie qui avait succédé au président Mahamadou Issoufou de la même formation politique après dix ans de vie à la tête du pays.

L’histoire est souvent cruelle : Mahamadou Issoufou avait passé les commandes à Mohamed Bazoum, d’un pouvoir qu’il détenait du Général Salou Djibo qui l’avait pris de force au président Tanja Mamadou et que Bazoum à son tour venait de perdre par la force.

Mahamadou Issoufou et Mohamed Bazoum, étaient tous les deux élus aux suffrages universels même si ceux-ci étaient quelquefois contestés parce qu’entachés d’irrégularités.

Mais qu’importait la manière de leur venue au pouvoir à partir du moment où le principe démocratique était respecté : diriger par la voie des urnes.

Mahamadou Issoufou avait même reçu le prix Mo Ibrahim pour avoir, contrairement à ce qui se passait ailleurs, gentiment cédé la place à un autre après deux mandats de cinq ans. Ce comportement avait beaucoup émerveillé les Occidentaux qui voyaient en lui un fervent défenseur de la démocratie.

Ce qui étonne lorsqu’un coup d’Etat survient dans un de nos pays, c’est la condamnation spontanée qui émane de certains citoyens et surtout des partenaires extérieurs, qui, normalement, doivent observer une neutralité totale leur permettant de mesurer la valeur de l’évènement.

Dans tous les cas, lorsque la société civile qui, après une forte contestation renverse un régime comme dans le cas d’une conférence nationale souveraine, l’action devient normale et personne ne se plaint. Mais lorsque ce sont les militaires qui entrent par la force des armes dans l’arène politique, alors on crie tout de suite à la perturbation, voire au scandale parce que dit-on, ils viennent tordre le cou et assassiner la démocratie.

Croire que les soldats ne sont pas des démocrates, c’est refuser de reconnaître que la démocratie revêt deux formes qui obéissent toutes deux au principe de la violence. C’est oublier que l’homme est formé d’une partie humaine et d’une autre bestiale qui sont constamment en conflit. Il faut constamment et absolument engager une lutte acharnée contre soi pour agir en bien ou en mal.

Lorsque Seyni Kountché, tombeur de Diori Hamani met son propre frère en prison pour abus de pouvoir et que Ali Saibou qui lui succède autorise la tenue d’une conférence nationale souveraine qui lui ôte tout pouvoir de décision, tous deux généraux de l’armée nigérienne, n’était-ce pas là une attitude démocratique ?

Le soldat intervient lorsque la démocratie se transforme en autocratie, lorsque la démocratie ne respecte plus les libertés et les droits humains que le soldat a le devoir de protéger.

L’Occident a colonisé l’Afrique sans avoir psychologiquement fait l’effort de connaître ses habitants et d’une manière spécifique. Par exemple, le Nigérien est un homme pieux, patient et solidaire. Mais derrière son air affable qui frise la naïveté, se cache un homme intelligent et brave qui tient absolument à sa dignité comme à la prunelle de ses yeux. Respectez-le et il vous rendra la monnaie. Surtout ne le sous-estimez pas en croyant que vous pouvez le dompter par la force. Il n’oublie jamais de quels hommes illustres il est l’héritier : Kaocen, Bawa Jangorzo, Ousmane Dan Fodio, Mali Béro, Tagour, Korombeyzé Modi, Dan Kassaoua, Marou Karma, Amadou Kouran Daga, Alpha Mamane Diobbo, Mayaki Namaïlaya...qui ont laissé des traces indélébiles dans l’histoire.

Au regard de ce qui s’est passé dans mon pays depuis le 26 Juillet 2023 date à partir de laquelle le Général Tiani et ses compagnons ont décidé de prendre leur responsabilité et vu le comportement des pays de la CEDEAO où l’on ne trouve aucun sage, une organisation africaine téléguidée par la France à nous faire la guerre, on peut aujourd’hui, sans avoir un boeuf sur langue aisément comprendre et dire pourquoi à une certaine époque, cette dernière s’était catégoriquement opposée au projet d’un autre pays européen qui proposait à la Sonichar de transformer les montagnes des déchets provenant de la combustion du charbon, en ciment et en goudron. En effet, par ce refus, la France faisait comprendre à ce pays et aux Nigériens que le Niger et tout ce qui se trouve dans ou sur son sol sont sa propriété et qu’elle ne permet à personne d’y toucher.

Au lieu de nous faire la cour et de nous témoigner sa gratitude pour l’avoir aidée durant près d’un siècle à devenir ce qu’elle est aujourd’hui, la France, si elle pouvait le faire, n’hésiterait pas à détruire toute la population du Niger afin de disposer indéfiniment de toutes les ressources minières dont regorge notre sous-sol. Car elle n’a pas d’amis mais des intérêts à défendre. Elle l’a dit et redit à maintes reprises.

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Vouloir utiliser la force et ramener Bazoum au pouvoir et l’imposer lui ou un autre de sa formation politique aux Nigériens prouve parfaitement ce que nous disions tantôt : que la CEDEAO ne dispose d’aucun sage en son sein. A qui rend-t-on service et où est la justice en agissant de la sorte ? Pourquoi nous ramène-ton aux temps révolus des empires et des empereurs ?

Au fond, de qui, ces chefs d’Etats de la CEDEAO, auxquels nous nous garderons de manquer de respect parce que nous sommes bien éduqués, détiennent-ils le droit d’imposer un dirigeant à un pays souverain ? Si c’est de la France, comme tout semble nous le faire croire, alors nous demandons au Président français de nous dire si, par télépathie le Général De Gaulle lui aurait soufflé que la cérémonie de proclamation de l’indépendance du Niger, à laquelle assistaient certains hauts dignitaires français, ce fameux 3 Août 1960, n’était qu’un simulacre, une comédie, une plaisanterie, une farce.

Si c’est le cas, alors nous disons à Macron, ce jeune et beau président mal aimé chez lui, de publier un communiqué annonçant au monde, l’accession récente du Niger à une vraie indépendance politique, sociale et économique depuis la désormais inoubliable date du 26 Juillet 2023 et que le Général TianiAbdourahamane est son président pour une durée de mandat que nous, Nigériens, sommes seuls habilités à lui accorder.

Nous nous chargerons de porter l’information à la connaissance de Diori, Kountché, Ali Saibou, Wanké, Baré et Tanja qui sont en droit de porter plainte auprès de qui nous savons pour avoir été abusés. Mamane Ousmane, Issoufou Mahamadou, DjiboSalou et Bazoum, seront plus tard cités comme témoins. Imposer un président au Niger, si c’est un rêve, nous dirons à celui qui le fait de se réveiller parce que le pays est aujourd’hui peuplé d’une jeunesse consciente qui ne supportera pas d’être asservie comme l’avaient pendant plusieurs décennies été leurs parents.

Au lieu de chercher à s’imposer par tous les moyens, normalement un président démocrate qui aime son pays, de lui-même, sans contrainte, avant terme, doit être capable de rendre le tablier dès l’instant où il constate que ceux qui l’ont élu, lui ont retiré leur confiance afin d’éviter de provoquer la colère des soldats pour s’être transformé en despote. Ceux qui viennent de perdre le pouvoir ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes, tant, il est vrai que l’homme est l’auteur de sa propre répression. Leur premier péché en prenant la direction des affaires a été de s’attaquer, aux principaux partis politiques fortement implantés dans le pays : Particulièrement le Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD), la Convention pour la Démocratie et le Socialisme (CDS) et le Lumana Africa qu’ils ont concassés et réduits en petits partis qui sont allés s’agglutiner autour du leur pour le rendre plus puissant sur tous les plans. Ce faisant, ils divisaient des liens de fraternité, de solidarité et d’amitié qui existaient depuis de longues dates entre les Nigériens qui ne se faisaient plus confiance. Les adhésions au parti au pouvoir se multipliant, on tendait progressivement et dangereusement vers l’instauration de la pensée unique. N’était pas considéré et n’obtenait rien, qui n’était pas militant du PNDS et ce, quelle que soit sa valeur intrinsèque.

Le deuxième péché a consisté à ériger l’impunité en principe de gouvernance. Qui avait détourné des deniers publics ou émis des fausses factures, allait se cacher sous la protection des gouvernants sans poursuite judiciaire même s’il existait un dossier dressé par la Halcia, un organe de répression qui n’avait aucun pouvoir.

Le troisième péché a été l’opacité qui entourait la gestion des ressources du pays. Aucun Nigérien ne pouvait se vanter de savoir ce que rapportaient l’uranium, l’or et le pétrole et l’usage qui en a été fait. Le comportement suffisant de l’équipe au pouvoir avait, pendant douze ans, maintenu les Nigériens dans la famine et dans une pauvreté extrême pendant que ce formait une génération d’insolents nouveaux riches qui les narguaient en faisant l’étalage de leur opulence à travers des villas somptueuses, les voitures rutilantes et les comptes bancaires pleins à vomir.

Le quatrième péché c’était d’avoir mal équipé notre armée et d’avoir été complices dans la situation d’insécurité créée et entretenue par les occidentaux et qui a causé beaucoup de torts aux pays des trois frontières (Burkina Faso, Mali et Niger) : attaques meurtrières, enlèvements et assassinats, prélèvements d’impôts, vols d’animaux, incendies des villages, fermeture des établissements scolaires, déplacements des populations, etc…

La liste des péchés est loin d’être exhaustive mais le tout dernier a été d’avoir accepté contre la volonté du peuple, d’héberger l’armée française après qu’elle eût été chassée du Mali.

En considérant individuellement les pays Africains, ceux de la CEDEAO et de l’UEMOA en général mais tout particulièrement le Nigeria, le Tchad, le Bénin, la Côte d’Ivoire et le Togo, auquel nos soldats ont-ils causé du tort en prenant chez nous le pouvoir ? A aucun ! Alors, au risque de nous répéter, pourquoi cet acharnement à vouloir nous porter la guerre. ? De quel droit nous empêche-t-on de mouiller notre case qu’un incendie était en train de consumer ? En envahissant notre pays par une armée internationale, nous aimerions connaître le nom du pays qui entreprend ainsi sa reconquête. Autrement dit à qui profitera le crime ?

Nous restons polis jusqu’à une certaine limite mais à présent qu’on cherche à nous faire accepter l’arbitraire, nous disons ouvertement « MERDE » à tous ceux qui s’emploient à vouloir cyniquement, coûte que coûte détruire notre cher pays.

S’ils ne le savaient pas, alors qu’ils le sachent aujourd’hui que le Nigérien est ainsi fait que, Dieu Seul est capable de lui faire accepter ce qu’il ne veut pas.

Nous les voyons déjà baisser de honte la tête quand reviendra le calme et il reviendra « Incha Allahou ». Ils nous donneront alors raison parce que Dieu le Tout Puissant nous aura aidés devant notre détermination à vouloir réinstaurer la justice, la solidarité, la fraternité, l’équité, la paix et le bonheur dans notre pays et parce que toutes les armées des pays des présidents pyromanes qui veulent notre destruction, auront par la volonté divine, fait prévaloir le principe de la fraternité d’arme qui existe entre tous les soldats du monde.

Puisse Dieu faire que ces personnages sanguinaires subissent l’effet boumerang de leur funeste dessein.

Il faut saluer la manifestation de patriotisme des Nigériens dans tout le pays à travers les marches, les déclarations de soutien, les conférences. A nos vaillants soldats nous demandons, afin de mieux nous convaincre de la sincérité de leurs intentions en prenant le pouvoir :

-de rester soudés et tenir ferme

-d’occuper tous les postes stratégiques

-de réviser les contrats d’exploitation de nos ressources minières (pétrole, or, uranium, ciment…)

-de ne pas remettre le pouvoir aux civils avant d’avoir doté le pays d’une nouvelle constitution qui limiterait le nombre de partis politiques, définirait le système de gouvernance et la durée des mandats, réorganiserait la société pour une réelle participation au développement en réhabilitant la Samaria comme l’avait fait Kountché -avant d’avoir détruit le terrorisme et empêché toute rébellion

-d’auditer les 12 dernières années de gestion

-de combattre l’impunité en jugeant tous les dossiers en souffrance à la justice

-de définir le système économique en réformant l’agriculture et l’élevage

En jouant le jeu des Occidentaux qui ne cherchent qu’un prétexte pour déclencher la troisième guerre mondiale, les chefs d’Etats africains, avec les évènements survenus chez nous, sont en train de se comporter comme ceux par lesquels doit arriver le scandale.

Pour finir, nous disons : honte à l’intellectuel qui n’a pas convenablement su utiliser son savoir au service de son pays et de l’humanité.

PS : Des coups d’Etat, personne, hormis Dieu n’est et ne sera capable de faire en sorte que celui du 26 Juillet 2023 soit le dernier.

Il en existe qui sont en cours à travers le monde ; d’autres se préparent. Qui nous dit qu’un autre ne surviendra pas pendant qu’on s’occupe injustement de celui qui ne concerne que les Nigériens ?

Et si le Niger se retirait de la CEDEAO ?

Fraternellement

 

Ada Bouréima

Fonctionnaire à la retraite

Cel : 96.82.96.75 - Niamey